L’article L. 643-11, I, du code de commerce dispose que « le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l’exercice individuel de leurs actions contre le débiteur » (v. à ce sujet P. Le Cannu et D. Robine, Droit des entreprises en difficulté, 8e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2020, nos 1276 s.). Il existe toutefois des exceptions à ce principe, l’une des plus évidentes étant celle prévue par le II du même texte qui dispose, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives, que « les coobligés et les personnes ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie peuvent poursuivre le débiteur s’ils ont payé à la place de celui-ci » (comp. anc. art. L. 643-11, II : « Toutefois, la caution ou le coobligé qui a payé au lieu et place du débiteur peut poursuivre celui-ci » ; sur l’évolution de ce texte, v. J.-D. Pellier, La poursuite de la construction d’un régime des sûretés pour autrui. À propos de la modification de l’article L. 643-11 du code de commerce par l’ordonnance du 12 mars 2014, D. 2014. 1054  
La cour d’appel d’Angers déclare cette demande irrecevable dans un arrêt du 28 janvier 2020, au motif qu’« elle ne peut soutenir agir sur le fondement de l’article L. 643-11, II, contre le cofidéjusseur qui ne constitue pas le débiteur pour qui elle a réglé en conséquence de l’engagement de caution consenti. Le fait que M. C… ait été par extension en liquidation judiciaire avec la SCI California n’a pas eu pour conséquence de faire disparaître la personnalité juridique de chacun des débiteurs et l’action fondée sur l’article L. 643-11, II, ne peut davantage être engagée à l’encontre de M. C…, qui reste distinct du seul débiteur au regard de ce texte : la SCI California » (Angers, 28 janv. 2020, n° 18/00214). Naturellement, la caution s’est pourvue en cassation, mais en vain, la cour régulatrice considérant que « l’article L. 643-11, II, du code de commerce, qui autorise les coobligés et personnes ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie à poursuivre le débiteur après la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif, s’ils ont payé à la place de celui-ci, ne permet pas à la caution qui a acquitté la dette principale d’exercer dans les conditions prévues par ce texte un recours contre un cofidéjusseur, en application de l’article 2310 du code civil, à moins que le patrimoine de celui-ci soit confondu avec celui du débiteur principal, ce qui n’est pas le cas » (pt 6) et qu’en conséquence, « le moyen qui postule le contraire n’est donc pas fondé » (pt 7).
La solution repose sur une interprétation littérale de l’article L. 643-11, II, du code de commerce. Aux termes de ce texte, c’est en effet « le débiteur » que le garant solvens peut poursuivre et non son cofidéjusseur (sur cette notion, v. J. Mestre, Les cofidéjusseurs, Dr. et patr., janv. 1998, p. 66 et avr. 1998, p. 64). Il est certes fait exception à ce principe, comme le précisent les hauts magistrats, dans l’hypothèse où le patrimoine de ce dernier se confondrait avec celui du débiteur principal (sur la confusion des patrimoines, v. F. Reille, La notion de confusion des patrimoines, cause d’extension des procédures collectives, préf. P. Pétel, Litec, coll. « Bibliothèque de droit de l’entreprise », t. 74, 2007 ; v. égal. A. Bézert, Les effets de l’extension de la procédure collective pour confusion des patrimoines, préf. P. Pétel, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit des entreprises en difficulté », t. 21, 2021). Mais tel n’était manifestement pas le cas en l’occurrence (on suppose donc que l’extension de la procédure résultait de la fictivité de la personne morale).
La solution est toutefois sévère à l’endroit du garant (qu’il s’agisse de la caution, comme en l’espèce, ou d’un autre garant, personnel ou réel). Le recours de celui-ci à l’égard du débiteur principal est en effet bien souvent illusoire (v. en ce sens P. Le Cannu et D. Robine, op. cit., n° 1290). L’empêcher de l’exercer à l’égard d’un cofidéjusseur peut dès lors paraître injuste. Au demeurant, sur le plan technique, l’argument avancé au soutien du pourvoi n’était pas dénué de pertinence, tant s’en faut. Il était soutenu « qu’indépendamment de la confusion des patrimoines, le caractère accessoire du cautionnement implique que la notion de débiteur au sens de l’article L. 643-11, II, du code de commerce, soit dans le cadre d’une poursuite engagée au terme d’une procédure de liquidation judiciaire, inclue la caution du débiteur principal ; qu’au cas présent, la cour d’appel a déclaré irrecevable la demande de paiement de la CEGC [Compagnie européenne de garanties et cautions] aux motifs qu’à défaut de démontrer la confusion des patrimoines de la société California et de M. R…, ce dernier ne pouvait être considéré comme le débiteur au sens de l’article L. 643-11 du code de commerce ; qu’en ayant exclu cette qualification en dépit du caractère accessoire du cautionnement dont il résulte une unicité de la dette, la cour d’appel a violé les articles L. 643-11 et R. 643-20 du code de commerce et l’article 2306 du code civil » (pt 5). Abstraction faite de la référence au caractère accessoire du cautionnement, qui nous semble contestable, il est en effet possible de soutenir que les cofidéjusseurs sont tenus, aux côtés du débiteur principal, de la même dette (sur l’unicité de la dette en matière de cautionnement, v. J.-D. Pellier, Essai d’une théorie des sûretés personnelles à la lumière de la notion d’obligation. Contribution à l’étude du concept de coobligation, préf. P. Delebecque, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit privé », t. 539, 2012, nos 157 s.). Par conséquent, le paiement de cette dette devrait permettre au solvens d’agir non seulement contre le débiteur principal, mais également contre ses cofidéjusseurs, et ce en dépit de la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif. Un tel recours serait d’ailleurs mesuré puisque l’article 2310 du code civil prévoit, en son alinéa 1er, que, « lorsque plusieurs personnes ont cautionné un même débiteur pour une même dette, la caution qui a acquitté la dette a recours contre les autres cautions, chacune pour sa part et portion » (comp. avant-projet d’ordonnance portant réforme du droit des sûretés du 18 décembre 2020, art. 2316 : « En cas de pluralité de cautions, celle qui a payé a un recours personnel et un recours subrogatoire contre les autres, chacune pour sa part »).