Deux époux avaient consenti une promesse de vente d’un bien immobilier à une société civile immobilière, jusque-là locataire dudit bien. La bénéficiaire de la promesse ayant levé l’option, le prix de vente fut versé entre les mains d’un notaire. Ce dernier releva alors l’existence d’une inscription hypothécaire. À défaut d’accord entre les parties sur les modalités de la mainlevée de cette sûreté, le notaire dressa successivement deux procès-verbaux de difficultés. Les vendeurs persistèrent à refuser la purge amiable de l’hypothèque, en dépit de l’accord du créancier hypothécaire. Ils assignèrent la SCI en réalisation judiciaire de la vente avec séquestration ou consignation du prix à hauteur d’une offre réelle de paiement faite au créancier, dans l’attente de la décision à intervenir dans l’instance en radiation sans paiement introduite contre celui-ci.
La cour d’appel enjoignit aux vendeurs de signer l’acte authentique de vente sans les modalités particulières exigées et les condamna au paiement de dommages-intérêts, considérant leur refus de procéder à la purge amiable de l’immeuble illégitime. Elle rejeta par ailleurs leur demande en paiement d’une indemnité d’occupation et les condamna à restituer à la SCI le dépôt de garantie, aux motifs que les lieux n’étaient plus occupés matériellement par le preneur.
Dans leur pourvoi en cassation, les vendeurs invoquent, d’une part, la violation par la cour d’appel de l’article 2475 du code civil, lequel ne leur imposerait pas de consentir à la purge amiable de l’immeuble. Ils soutiennent, d’autre part, qu’il appartient au preneur, qui a la charge de la preuve, de restituer l’immeuble loué à l’expiration du bail. La cour d’appel aurait ainsi violé l’article 1737 du code civil en ne constatant pas que le preneur leur avait bel et bien remis les clés.
Dans l’arrêt de cassation rapporté du 5 mars 2020, la troisième chambre civile précise, pour la première fois à notre connaissance, le caractère facultatif de la purge amiable. Cette décision est, par ailleurs, l’occasion de rappeler la solution traditionnelle selon laquelle la libération des lieux à l’expiration du bail ne peut résulter que de la remise effective des clés au bailleur ou à son mandataire.
Affirmation du caractère facultatif de la purge amiable
En cas de vente d’un immeuble hypothéqué, le créancier hypothécaire ne dispose pas d’un droit de préférence sur le prix de vente amiable du bien (Civ. 3e, 8 févr. 2018, n° 16-27.941, D. 2018. 350
L’arrêt commenté offre l’occasion à la Cour de cassation de préciser que cette procédure de purge amiable est seulement facultative pour le vendeur, lequel a parfaitement le droit de la refuser quand bien même le créancier hypothécaire y aurait, de son côté, donné son accord. Une telle analyse est conforme au texte de l’article 2475 du code civil, lequel subordonne expressément la purge amiable à l’existence d’un accord entre les créanciers inscrits et le débiteur (al. 1er). À défaut d’accord entre eux, la purge doit être réalisée conformément aux articles suivants (ce que précise l’al. 3 de l’art. 2475).
Le rappel de l’exigence d’une remise effective des clés au bailleur pour la libération des lieux
Un bail à durée déterminée comprend un terme extinctif. Il prend ainsi fin à l’arrivée du terme (C. civ., art. 1737). Le preneur est alors tenu de libérer les lieux loués. Le bailleur peut prétendre, à défaut, au versement d’une indemnité d’occupation, laquelle « est la contrepartie de l’utilisation sans titre du bien » (Civ. 2e, 6 juin 2019, n° 18-12.353, D. 2019. 1235
Toute la question était en l’espèce de déterminer si les locataires avaient libéré les lieux au terme du bail. Tandis que la cour d’appel se fonde sur un faisceau d’indices, tels que la résiliation des contrats de fourniture d’eau et d’électricité, pour répondre positivement à cette question, la Cour de cassation rappelle fermement que la libération des lieux ne peut résulter que de la remise des clés au bailleur en personne ou à un mandataire dûment habilité à les recevoir.
La solution est classique (Civ. 3e, 13 oct. 1999, n° 97-21.683, D. 1999. 87