Salariés en congé de reclassement et bénéfice de l’intéressement : quelles modalités de calcul et de répartition ?

À défaut de dispositions conventionnelles assimilant le congé de reclassement à du temps de travail effectif et dès lors que l’allocation de reclassement qui excède la durée du préavis n’entre pas dans l’assiette de la répartition de l’intéressement prévue par voie d’accord, l’employeur n’est pas tenu de prendre en compte les périodes de congé de reclassement pour le calcul et la répartition des produits de l’intéressement.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1058 lectures

Impossibilité de reclassement et dispense de consultation des représentants du personnel

Selon l’article L. 1226-12 du code du travail, l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi. Lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi, l’employeur, qui n’est pas tenu de rechercher un reclassement, n’a pas l’obligation de consulter les délégués du personnel.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1023 lectures

Quelle jurisprudence à l’ère des données judiciaires ouvertes ?

En juillet 2021, nous commentions dans ces colonnes le rapport « Cour de cassation 2030 » (D. actu., 15 juill. 2021, note C. Hélaine) projetant la Cour de cassation dans son futur à travers une série de propositions plus ou moins originales (opinions dissidentes, meilleur dialogue des juges, recours à une motivation enrichie plus fréquente entre autres). Le 14 juin 2022, c’est un second rapport qui a été remis aux Chefs de Cour, sur la diffusion des données décisionnelles et la jurisprudence. La genèse du projet remonte au 23 juillet 2021 : Mme Chantal Arens, Première Présidente de la Cour de cassation, et M. François Molins, Procureur Général, ont confié à M. Loïc Cadiet, Mme Cécile Chainais (tous deux professeurs des universités) et M. Jean-Michel Sommer (directeur du service de documentation, des études et du rapport à la Cour de cassation) une mission de réflexion sur cette thématique. Le but était de mener une étude sur l’incidence de l’open data des décisions de justice qui a débuté récemment mais également sur le rôle des différents acteurs du monde judiciaire à ce sujet (magistrats, avocats sans oublier les universitaires). Dans la lettre de mission, Mme Arens et M. Molins résument bien l’objet même de cette réflexion, à savoir « reconsidérer la notion même de jurisprudence ». Les difficultés majeures gravitent alors inévitablement autour du rôle du précédent interrogeant tour à tour l’office du juge mais également l’organisation judiciaire entre les juridictions du fond et la Cour de cassation. Or le rôle de cette dernière reste que « l’interprétation de la loi soit la même pour tous » comme le rappelle élégamment la page d’accueil de son site internet à chaque visiteur. La diffusion massive de nouvelles données décisionnelles implique de s’interroger sur les outils au service de la continuité de ce rôle. Le développement des sites internet de « jurimétrie » interpelle également et avec ces derniers, naît un questionnement autour de la réutilisation des données issues de ces décisions. La lettre de mission reste donc très dense et axée autour d’une question majeure que nous reproduisons ci-dessous afin de déterminer dans cette étude quelles réponses y apportent le rapport déposé le 14 juin 2022 :

Dans quelle mesure la connaissance d’une telle masse de décisions, permise par l’open data, peut-elle conduire à la reconnaissance, consacrée ou imposée, d’une jurisprudence « horizontale », au point de conférer une valeur normative et régulatrice aux décisions des juridictions du fond ?

En somme, la question reste celle de l’adéquation des décisions entre elles mais également de leur autorité, voire de leur force normative. L’interrogation est évidemment tant pratique (notamment en raison du développement d’algorithmes analysant les décisions de justice par les acteurs de la Legal Tech) que théorique sur des problématiques intéressant l’organisation judiciaire en France. C’est dans ce contexte que se présentait donc la mission confiée le 23 juillet 2021 aux présidents du groupe de réflexion. Le produit fini remis à la Cour de cassation dénote de la grande qualité de l’exécution de cette tâche : 160 pages d’une précision millimétrée, livrées dans les temps souhaités. La mixité professionnelle des rapporteurs par la présence d’un universitaire (M. Sylvain Jobert, professeur des universités) et d’une conseillère référendaire (Mme Estelle Jond-Necand) a permis à ce rapport de mêler la théorie et la pratique avec beaucoup de soin. L’introduction du rapport reprend le questionnement de la lettre de mission en étudiant l’évolution historique de la notion de jurisprudence (p. 23) et en s’interrogeant notamment sur une question pivot : les décisions rendues par les juges du fond sont-elles constitutives d’une jurisprudence ? Question à la réponse nuancée, que le rapport explore plus avant dans son corps et dans les recommandations listées. L’introduction note encore que la réflexion (pp. 27 et 28 du rapport) implique de s’interroger sur l’articulation des jurisprudences entre celle de la Cour de cassation et celles des juges du fond. 

Nous analyserons tour à tour l’état des lieux dressé des formes de diffusion des décisions de justice en France avant d’examiner les perspectives dessinées par le groupe d’étude, notamment en prenant en compte les risques de l’open data et ses éventuelles mises à profit.

Une diversification et une pluralité des modes de diffusion des décisions

Le rapport note le caractère inédit d’un tel état des lieux sur la diffusion des données décisionnelles (p. 32). Il est vrai que peu d’études ont eu l’occasion d’être menées sur la question notamment en raison de la difficulté d’être exhaustif à ce sujet. Le groupe de travail a accordé une grande précision à cette première partie qui sert de base structurelle à tout l’édifice du rapport. L’état des lieux invite à évoquer la diversité de la diffusion et l’intérêt de sa réception.

De l’importance et de la diversité de la diffusion...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1231 lectures

Quelle jurisprudence à l’ère des données judiciaires ouvertes ?

La Cour de cassation a publié le 15 juin 2022 un important rapport qui examine le rôle de la jurisprudence à l’heure des données judiciaires ouvertes. Dalloz actualité revient sur ce document et sur ses diverses recommandations pour anticiper l’open data des décisions de justice.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  0 lectures

Prestation de compensation du handicap et préjudice économique de l’aidant familial

La deuxième chambre civile rappelle que la prestation de compensation du handicap affectée au dédommagement de l’aidant familial doit être considérée comme une ressource de l’aidant incluse dans le revenu de référence du foyer pour calculer son préjudice économique. 

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1069 lectures

L’indemnité de rupture conventionnelle est acquise dès l’homologation de la convention

Il résulte des articles L. 1237-11, L. 1237-13 et L. 1237-14 du code du travail que la créance d’indemnité de rupture conventionnelle, si elle n’est exigible qu’à la date fixée par la rupture, naît dès l’homologation de la convention. Dans l’hypothèse du décès du salarié après la date d’homologation administrative, mais avant la date de rupture du contrat de travail envisagée dans la convention, les ayants droit sont donc fondés à solliciter le versement de cette indemnité.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1036 lectures

Impropriété à la destination : risque sanitaire résultant d’odeurs nauséabondes

L’absence de raccordement des évents provoquant des odeurs nauséabondes présentant un danger pour la santé des personnes, le risque sanitaire lié aux nuisances olfactives rendait, en lui-même, l’ouvrage impropre à sa destination durant le délai d’épreuve. 

en lire plus

  1072 lectures

Transparence de la vie publique : le débat enfle autour du « qui fait quoi ? »

« La multiplication des acteurs impliqués dans la [lutte contre la corruption a entraîné] une interpénétration croissante de leurs activités, parfois source de confusion. » Tel est le constat dressé par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) dans son rapport annuel rendu public le 1er juin (www.hatvp.fr). 

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  956 lectures

Difficulté grave dans le fonctionnement des organes statutaires justifiant l’intervention du ministre de l’Enseignement supérieur

Par deux arrêts du 1er juin, le Conseil d’État s’est penché sur la compétence du ministre chargé de l’enseignement supérieur pour prendre à titre exceptionnel, sur le fondement de l’article L. 719-8 du code de l’éducation, des mesures pour pallier une difficulté grave dans le fonctionnement des organes statutaires d’un établissement public d’enseignement supérieur.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  997 lectures

La concentration des demandes en cause d’appel et le partage

L’article 910-4 du code de procédure civile oblige les parties à concentrer leurs prétentions dans leur premier jeu de conclusions. Une partie ne saurait donc se borner à solliciter la réformation du jugement entrepris pour ultérieurement, dans un nouveau jeu de conclusions, présenter ses prétentions. Mais cette règle ne produit guère de conséquences en matière de partage. Car toute prétention doit être appréhendée comme une « défense » à celle formée par l’adversaire.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1142 lectures

Préjudice personnel et faute contractuelle invoquée par le tiers

L’arrêt rendu par l’assemblée plénière de la Cour de cassation le 6 octobre 2006 (Cass., ass. plén., 6 oct. 2006, n° 05-13.255 P, Myr’Ho [Sté], D. 2006. 2825, obs. I. Gallmeister image, note G. Viney image ; ibid. 2007. 1827, obs. L. Rozès image ; ibid. 2897, obs. P. Brun et P. Jourdain image ; ibid. 2966, obs. S. Amrani-Mekki et B. Fauvarque-Cosson image ; AJDI 2007. 295 image, obs. N. Damas image ; RDI 2006. 504, obs. P. Malinvaud image ; RTD civ. 2007. 61, obs. P. Deumier image ; ibid. 115, obs. J. Mestre et B. Fages image ; ibid. 123, obs. P. Jourdain image), dénommé « Bootshop Myr’ho », aura sans nul doute été l’une des décisions du début du XXIe siècle les plus commentées en droit civil (v. pour une synthèse F. Terré, P. Simler, Y. Lequette et F. Chénedé, Droit civil. Les obligations, 12e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2018, p. 755, n° 680 ; Y. Lequette, F. Terré, H. Capitant et F. Chénedé, Les grands arrêts de la jurisprudence civile. Tome 2. Obligations, contrats spéciaux, sûretés, Dalloz, coll. « Grands arrêts », 2015, p. 228 s., n° 177). Le résumer est fort simple : le tiers au contrat peut invoquer sur le fondement délictuel un manquement contractuel quand celui-ci lui cause un dommage. Récemment, un second arrêt d’assemblée plénière dit « Sucrerie de Bois Rouge » est venu confirmer cette position en janvier 2020 (Cass., ass. plén., 13 janv. 2020, n° 17-19.963, Dalloz actualité, 24 janv. 2020, obs. J.-D. Pellier ; ibid., 27 fév. 2020, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2020. 416, et les obs. image, note J.-S. Borghetti image ; ibid. 353, obs. M. Mekki image ; ibid. 394, point de vue M. Bacache image ; ibid. 2021. 46, obs. P. Brun, O. Gout et C. Quézel-Ambrunaz image ; ibid. 310, obs. R. Boffa et M. Mekki image ; AJ contrat 2020. 80 image, obs. M. Latina image ; RFDA 2020. 443, note J. Bousquet image ; Rev. crit. DIP 2020. 711, étude D. Sindres image ; RTD civ. 2020. 96, obs. H. Barbier image ; ibid. 395, obs. P. Jourdain image). L’arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 15 juin 2022 ne revient pas sur le principe de ce que l’on a pu appeler l’identité des fautes contractuelle et délictuelle. En revanche, il apporte une limite dans un contentieux où ce problème est assez récurrent, à savoir celui des successions. Rappelons les faits ayant donné lieu au pourvoi. Une personne physique souscrit le 15 mai 2001 un prêt auprès d’un établissement bancaire pour un montant de 7 500 000 F soit 1 143 367,63 € arrivant à échéance le 31 mai 2008. L’emprunteur a versé le montant de l’emprunt sur un contrat d’assurance-vie souscrit par l’intermédiaire de la société venant aux droits de la banque prêteuse de deniers. Le rachat du contrat d’assurance-vie devait permettre le remboursement du prêt à son terme. Le rachat est intervenu le 3 décembre 2008. Problème : l’emprunteur reste débiteur d’une somme de 684 982,56 € après le rachat. Il rembourse donc le solde du prêt au moyen d’une ouverture de crédit utilisable par découvert en compte consenti par un autre établissement bancaire. L’emprunteur meurt : ses héritiers décident d’assigner l’établissement bancaire en indemnisation des préjudices résultant de manquements à leurs obligations d’information et de conseil envers leur parent emprunteur. La cour d’appel de Paris confirme le jugement de première instance rendu en toutes ses dispositions. Les juges du fond avaient considéré que les héritiers invoquant un préjudice causé par les manquements de la banque se prévalaient non pas d’un préjudice personnel mais subi par leur parent et dont...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1306 lectures

Préjudice personnel et faute contractuelle invoquée par le tiers

Dans un arrêt du 15 juin 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation est venue préciser qu’un héritier ne peut agir sur le fondement délictuel en invoquant un manquement contractuel qu’en réparation d’un préjudice qui lui est personnel.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1147 lectures

Le secret médical n’est pas un totem d’immunité disciplinaire

Un salarié professionnel de santé ne peut opposer à son employeur le secret médical pour empêcher ce dernier de se fonder sur des informations médicales concernant des patients afin de sanctionner les fautes commises par le salarié dans le suivi de soins des patients.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1100 lectures

Contrefaçon d’une pièce de théâtre : quand les versions successives questionnent le respect des droits d’auteur

La reprise de la deuxième version d’une pièce de théâtre par des auteurs en vue d’en réaliser une troisième version est qualifiée de contrefaisante dès lors que ces derniers n’ont pas obtenu l’accord de l’auteur de la deuxième version, et cela alors même que parmi les auteurs de la troisième version figurait celui qui était à l’origine de la première version. Une affaire qui retiendra l’attention, tant elle ne manque pas d’originalité.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1156 lectures

Contrats de construction et clauses abusives

Dans un arrêt du 15 juin 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation est venue rappeler quelques constantes autour des règles gouvernant le réputé non écrit des clauses abusives en droit de la consommation dans le contentieux particulier de la construction.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1067 lectures

Contrats de construction et clauses abusives

Dans un arrêt du 15 juin 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation est venue rappeler quelques constantes autour des règles gouvernant le réputé non écrit des clauses abusives en droit de la consommation dans le contentieux particulier de la construction.

en lire plus

  1333 lectures

Contrats de construction et clauses abusives

Dans un arrêt du 15 juin 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation est venue rappeler quelques constantes autour des règles gouvernant le réputé non écrit des clauses abusives en droit de la consommation dans le contentieux particulier de la construction.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  0 lectures

Contrats de construction et clauses abusives

Le contentieux des clauses abusives ne tarit pas devant la Cour de cassation. Après s’être penchée sur les prêts libellés en devises étrangères (Civ. 1re, 20 avr. 2022, nos 19-11.599, Dalloz actualité, 12 mai 2022, obs. C. Hélaine ; D. 2022. 789 image et 20-16.316, Dalloz actualité, 12 mai 2022, obs. C. Hélaine), mais également sur l’imprescriptibilité du réputé non écrit tiré de l’article L. 132-1 du code de la consommation (Civ. 1re, 30 mars 2022, n° 19-17.996, Dalloz actualité, 4 avr. 2022, obs. C. Hélaine ; D. 2022. 974 image, note J. Lasserre Capdeville image), la première chambre civile explore dans l’arrêt du 15 juin 2022 un contentieux particulier, celui de la construction. Les faits à l’origine du pourvoi sont assez originaux. Une association d’aide aux maîtres d’ouvrage individuels listait sur son site internet des pratiques qu’elle estimait abusives de certains constructeurs professionnels. C’était le cas de clauses contenues dans certains contrats de deux sociétés de construction. Le 22 juillet 2007, le tribunal de grande instance de Valence a ordonné le retrait de telles assertions sur le site internet concerné pour ces deux dernières sociétés. Par assignation en date du 11 mars 2013, l’association d’aide aux maîtres d’ouvrage individuels a saisi le tribunal de grande instance de Lyon pour obtenir réparation du préjudice subi en raison de certaines clauses abusives et pour que ces clauses soient supprimées. Le tribunal répute non écrites une série de clauses en raison de leur caractère abusif. La cour d’appel de Lyon confirme le jugement entrepris et ajoute toute une série de clauses qu’elle répute également non écrites en raison d’une omission de statuer. Les deux sociétés de construction proposant ces clauses dans leurs contrats se pourvoient en cassation. Elles estiment que l’association d’aide aux maîtres d’ouvrage individuels n’avait pas qualité à agir dans ce contentieux. Sur le fond, elles reprochent un problème d’application de la loi dans le temps des articles L. 421-1 et L. 421-6 du code de la consommation, servant de support à l’action de l’association. Elles avancent également des griefs sur les clauses réputées non écrites. L’association d’aide aux maîtres d’ouvrage individuels exerce également un pourvoi incident en reprochant à l’arrêt de ne pas avoir réputé non écrite une dernière clause qui se réfère à un texte de loi sans le citer expressément dans le corps de la stipulation.

L’arrêt aboutit à un rejet du pourvoi après vingt-huit paragraphes, faisant de l’arrêt du 15 juin 2022 l’un des plus longs rendus à propos des clauses abusives depuis deux ans en étudiant près d’une dizaine de clauses différentes. Nous allons examiner tour à tour les différentes problématiques ayant justifié le rejet du pourvoi.

Qualité à agir et application de la loi dans le temps

Sur le problème de la qualité à agir, l’arrêt reste l’occasion de rappeler quelques constantes sur les associations régulièrement habilitées et déclarées ayant pour objet statutaire explicite la défense des intérêts des...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  0 lectures

Vote électronique : atteinte au principe d’égalité en cas d’impossibilité matérielle d’exercer son droit de vote

Le recours au vote électronique ne permet pas de déroger aux principes généraux du droit électoral. Le principe d’égalité face à l’exercice du droit de vote étant un principe général du droit électoral, l’employeur est tenu de prendre les précautions appropriées pour que ne soit écartée du scrutin aucune personne ne disposant pas du matériel nécessaire ou résidant dans une zone non couverte par Internet.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1041 lectures

L’objection de conscience, motif d’octroi de la qualité de réfugié

Le recours d’un Turc d’origine kurde contre le rejet de sa demande d’asile est l’occasion pour la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) de préciser les modalités d’évaluation d’une telle demande fondée sur le motif de l’objection de conscience au service militaire.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1097 lectures

Une personne publique peut-elle écarter une clause irrégulière ?

La décision d’une personne publique d’écarter elle-même une clause d’un contrat qu’elle estime « nulle et non écrite » ne vaut que pour l’avenir. Pour obtenir sa disparition rétroactive, il lui faut saisir le juge d’un recours de plein contentieux.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  990 lectures

Un concours pour « réenchanter le droit administratif »

Les maires sont invités cet été à prendre des arrêtés insolites et créatifs. Un jury présidé par l’ancien Premier ministre Édouard Philippe récompensera les plus inventifs.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1002 lectures

Fiscalité des œuvres d’art : une société n’est pas un auteur

La cour administrative d’appel de Paris précise qu’en droit fiscal, l’auteur d’un tableau est l’artiste ayant peint l’œuvre de sa main. Ainsi, une galerie ayant acquis des tableaux d’une société ne peut arguer les avoir achetés à leur auteur pour bénéficier d’un régime fiscal favorable.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1154 lectures

L’obligation de délivrance face au défaut de permis de construire

Le défaut de permis de construire d’un local commercial constitue un manquement pour le bailleur à son obligation de délivrance.

en lire plus

  1109 lectures

L’obligation de délivrance face au défaut de permis de construire

Le défaut de permis de construire d’un local commercial constitue un manquement pour le bailleur à son obligation de délivrance.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1157 lectures

Actualité du deuxième trimestre 2022 du droit des entreprises en difficulté

Cet article dresse un panorama des jurisprudences les plus significatives intervenues en droit des entreprises en difficulté au cours du deuxième trimestre 2022. Les thématiques abordées sont variées, cette fois encore, mais sont dominées par la question des effets de la procédure de la liquidation judiciaire.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1083 lectures

Régime de sécurité sociale applicable au personnel navigant d’une compagnie aérienne [i]low cost[/i]

Pour la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), le personnel navigant d’une compagnie aérienne low cost non couvert par des certificats E101 qui travaille 45 minutes par jour dans le local de cette compagnie aérienne destiné à accueillir l’équipage à l’aéroport de Bergame en Italie et qui, pour le temps de travail restant, se trouve à bord des aéronefs de ladite compagnie aérienne, est soumis à la législation de sécurité sociale italienne et non pas à la législation irlandaise, moins protectrice.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1092 lectures

Régime de sécurité sociale applicable au personnel navigant d’une compagnie aérienne [i]low cost[/i]

Pour la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), le personnel navigant d’une compagnie aérienne low cost non couvert par des certificats E101 qui travaille 45 minutes par jour dans le local de cette compagnie aérienne destiné à accueillir l’équipage à l’aéroport de Bergame en Italie et qui, pour le temps de travail restant, se trouve à bord des aéronefs de ladite compagnie aérienne, est soumis à la législation de sécurité sociale italienne et non pas à la législation irlandaise, moins protectrice.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1074 lectures

Experts judiciaires : limite d’âge

Le décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 relatif aux experts judiciaires dispose, par son article 1, qu’il est dressé chaque année une liste nationale par le bureau de la Cour de cassation, et une liste par cour d’appel sur lesquelles sont inscrits les experts désignés tant en matière civile qu’en matière pénale.

Dans ce cadre, les experts judiciaires sont soumis à une limite d’âge.

Selon l’article 2, 7°, de ce décret, une personne physique ne peut être inscrite ou réinscrite sur une liste d’experts que si, sous réserve des dispositions de l’article 18, elle est âgée de moins de soixante-dix ans.

Ce principe est intangible pour les experts relevant des listes dressées par les cours d’appel. La jurisprudence précise ainsi qu’aucune disposition ne prévoit de possibilité de déroger à titre exceptionnel à cette condition pour l’inscription ou la réinscription sur ces listes (par ex., Civ. 2e, 7 avr. 2016, n° 15-60.277).

Le principe connaît en revanche une exception lorsqu’il s’agit de la liste nationale. Selon l’article 18, alinéa 3, du décret, à titre exceptionnel, le bureau de la Cour de...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1244 lectures

Cession de créance et pouvoirs du juge de l’exécution

L’arrêt prononcé le 9 juin 2022 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation vient enrichir la – très longue – liste des décisions ayant trait à l’étendue des pouvoirs du juge de l’exécution et permet de raisonner, pour l’occasion, dans le contexte des règles applicables aux cessions de créances. Pour rappel, une telle cession de créance est un contrat – dont le régime est précisé aux articles 1321 à 1326 du code civil – « par lequel le créancier cédant transmet, à titre onéreux ou gratuit, tout ou partie de sa créance contre le débiteur cédé à un tiers appelé le cessionnaire » (C. civ., art. 1321, al. 1er).

On le sait, le juge de l’exécution bénéficie d’une compétence exclusive notamment pour connaître « des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée »,...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1156 lectures

Le Conseil d’État vole au secours du grand tétras

L’association France nature environnement (FNE) Midi-Pyrénées obtient un moratoire de cinq ans sur la chasse du grand tétras. Le Conseil d’État donne au ministre chargé de la chasse jusqu’au 15 juillet pour prendre un arrêté en ce sens. La haute juridiction refuse, en revanche, par une décision du même jour, de retirer le gallinacé ainsi que la barge à queue noire, le coulis cendré et la tourterelle des bois de la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  991 lectures

Quel préfet est compétent pour prendre une obligation de quitter le territoire ?

Pour l’application des dispositions du I de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), désormais reprises à l’article L. 611-1 du même code, le préfet de département compétent pour prendre la mesure d’éloignement est-il, exclusivement, soit le préfet du lieu de domicile de l’étranger, soit le préfet du lieu de l’interpellation, ou y a-t-il lieu de faire varier la compétence selon le fondement retenu pour prononcer l’obligation de quitter le territoire français ?

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  963 lectures

Envoi du matériel remis hors délai : compétence discrétionnaire de la commission électorale

Si le Conseil d’État reconnaît à la commission électorale la possibilité de refuser ou d’accepter d’envoyer aux bureaux de vote des Français établis hors de France le matériel électoral remis hors délai par les candidats, il s’agit pour les plus retardataires d’assumer leur manque de diligence.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  957 lectures

Pas de nullité de l’opération de crédit de la seule violation du monopole bancaire

La question du monopole bancaire (M. Mignot, J. Lasserre-Capdeville, M. Storck, N. Eréséo et J.-P. Kovar, Droit bancaire, 3e éd., Précis, Dalloz, 2021, p. 43, nos 58 s.) peut entrer en collision avec la théorie générale des obligations, notamment pour les opérations de crédit. L’arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 15 juin 2022 en est un très bon exemple. Il s’inscrit, dans une certaine mesure, en complémentarité avec un autre arrêt cette fois-ci rendu par la première chambre civile il y a quelques mois (Civ. 1re, 6 avr. 2022, n° 21-12.045, Dalloz actualité, 12 avr. 2022, obs. C. Hélaine ; D. 2022. 702 image) où un contrat avait été annulé en raison de la violation d’une règle déontologique. Dans l’arrêt commenté aujourd’hui, c’est la méconnaissance de la règle de l’article L. 511-5 du code monétaire et financier qui était le point de cristallisation du débat, à savoir la disposition selon laquelle il est interdit à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de banque à titre habituel. Pour plusieurs raisons, la solution donnée dans l’arrêt du 15 juin 2022 se démarque de la décision de la première chambre civile rendue il y a quelques mois, interrogeant utilement et implicitement la notion de licéité du contenu du contrat.

Les faits ayant donné lieu au pourvoi sont simples. Aux termes d’un contrat en date du 19 novembre 2012, une société spécialisée dans les deux-roues s’engage à acheter chaque année pendant cinq ans une certaine quantité de produits (des lubrifiants) lui ouvrant droit à des remises. La société venderesse consent à son partenaire économique une avance d’un montant de 30 000 €, amortissable en cinq annuités de 6 833 € chacune. Le gérant de la société de deux-roues et son épouse se rendent cautions solidaires des engagements ainsi souscrits. Mais voici que ladite société est mise en liquidation judiciaire. La société venderesse des produits lubrifiants pour deux roues assigne les cautions en paiement de la somme restant due au titre de l’avance sur remises. La Cour d’appel de Paris considère qu’une opération de crédit avait été consentie au sens de l’article L. 313-1 du code monétaire et financier en violation de l’interdiction de l’article L. 511-5 du même code au sujet des 30 000 € correspondant aux avances consenties. Pour en justifier la nullité, les juges du fond avancent que la société créancière a précisé pratiquer habituellement ce type d’opérations auprès de sa clientèle. Le contrat souscrit en violation du monopole bancaire est donc annulé, sur son volet relatif au crédit. La société venderesse se pourvoit en cassation. Elle considère qu’il n’y avait pas de crédit au sens du code monétaire et financier mais simplement des délais ou avance de paiement. En d’autres termes, il n’existait pas en l’espèce une opération purement financière mais un simple complément indissociable du contrat d’approvisionnement exclusif entrant dans le champ de son activité habituelle. Elle fait également grief à l’arrêt, d’une part, de ne pas avoir mis dans la cause le débiteur principal ou son liquidateur mais aussi, d’autre part, d’avoir annulé le contrat alors que le monopole bancaire n’implique pas la nullité des contrats conclus en violation de cette seule règle.

L’arrêt est finalement cassé notamment en ce qu’il n’a pas appelé à l’instance le liquidateur de la société débitrice principale et en ce qu’il a annulé le contrat pris en violation du monopole bancaire de l’article L. 511-5 du code monétaire et financier. Sur le premier point, il n’y a aucune originalité à noter, il ne s’agit que d’une application de l’article 14 du code de procédure civile. Sur la question du monopole bancaire et de ses conséquences, l’arrêt est plus original : nous le commenterons à ce sujet, qui explique d’ailleurs sa publication au Bulletin.

Afin d’analyser la solution, nous examinerons la qualification de l’opération de crédit avant d’étudier sa survie face à la violation de la règle du code monétaire et financier.

De la qualification d’opération de crédit

La première difficulté consistait à savoir si les faits à l’origine du pourvoi signaient une opération de crédit ou non et ce afin de savoir si le monopole bancaire de l’article L. 511-5 du code monétaire et financière avait été violé. Pour rappel, avait été consentie une avance d’un montant de 30 000 € remboursable et comprenant des annuités. Afin de qualifier l’opération, la lecture de l’arrêt attaqué est d’une grande aide ici : la Cour d’appel de Paris avait remarqué l’intitulé du contrat litigieux nommé par les parties « avance lubrifiants montant du prêt » (nous soulignons). Certes, le juge n’est pas lié par la dénomination de l’acte mais il s’agissait d’un indice sur la volonté des parties. Ce prêt était accompagné d’un « taux d’intérêt élevé » et le contrat faisait référence au taux effectif global « mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt ». Voici un certain nombre d’éléments pouvant guider vers une qualification d’opération de crédit (§ n° 6 de l’arrêt).

L’argumentation développée par le demandeur n’a pas séduit la chambre commerciale. Celui-ci énonçait que l’avance constituait un complément indissociable du contrat d’approvisionnement exclusif entrant dans le champ de son activité habituelle. La Cour de cassation considère l’argument comme parfaitement inopérant et c’est donc à bon droit que les juges du fond ont qualifié l’opération de crédit. On retiendra de la motivation du paragraphe concerné que peu importe ce que les parties avaient dans leur esprit, l’opération de crédit était constituée par la réunion des indices précédemment cités.

Nul doute que la solution n’encourt que peu de critiques sur ce point. Il n’y avait ici ni délais de paiement ni perception d’avances de paiement permettant de rejeter la qualification d’opération de crédit. Les juges avaient enfin remarqué que « la société a précisé pratiquer habituellement ce type de prêts auprès de sa clientèle ». Autant dire que la violation de l’article L. 511-5 du code de monétaire et financier – le monopole bancaire en terme d’opération de banque – était consommée.

Mais, pour quels effets ? C’est ici que le bât blesse selon la chambre commerciale.

L’absence de nullité consécutive à la violation du monopole

D’une manière plus intéressante encore, la chambre commerciale vient préciser que « aux termes de ce texte (ndlr : l’art. L. 511-5 C. mon. fin.), il est interdit à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de banque à titre habituel. Le seul fait qu’une opération de crédit ait été conclue en méconnaissance de cette interdiction n’est pas de nature à en entraîner l’annulation » (nous soulignons). En d’autres termes, la seule violation de la règle du monopole bancaire ne peut pas suffire à annuler le contrat. Elle reprend, pour ce faire, une jurisprudence constante de l’Assemblée plénière qui avait précisé que « la seule méconnaissance par un établissement de crédit de l’exigence d’agrément, au respect de laquelle l’article 15 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984, devenu les articles L. 511-10, L. 511-14 et L. 612-2 du code monétaire et financier, subordonne l’exercice de son activité, n’est pas de nature à entraîner la nullité des contrats qu’il a conclus » (Cass., ass. plén., 4 mars 2005, n° 03-11.725, Axa Bank (Sté), D. 2005. 836 image, obs. X. Delpech image ; ibid. 785, tribune B. Sousi image ; ibid. 2006. 155, obs. D. R. Martin et H. Synvet image ; RTD civ. 2005. 388, obs. J. Mestre et B. Fages image ; RTD com. 2005. 400, obs. D. Legeais image). On remarquera la motivation calquée qui présente pour similitude une subtilité : la seule violation de la règle ne suffit pas mais elle peut être un des éléments constitutifs du vice de formation de l’acte.

Malgré la jurisprudence constante, il reste possible de noter deux types d’arguments contraires en pareille situation.

D’une part, la nullité sanctionne un problème de formation du contrat. Or, en l’espèce, le contenu du contrat pourrait être au moins atteint d’un problème de licéité. Ce dernier serait le résultat d’une atteinte à une règle fondamentale du crédit, à savoir ici le monopole bancaire de l’article L. 511-5 du code monétaire et financier. Dans un arrêt récent rendu par la première chambre civile (Civ. 1re, 6 avr. 2022, n° 21-12.045, préc.), la Cour de cassation avait pourtant précisé que la violation d’une règle de déontologie suffisait à annuler le contrat. Existe-t-il alors une hiérarchie dans laquelle la violation de certaines prescriptions légales entrainerait la nullité du contrat conclu en méconnaissance de la règle tandis que d’autres violations ne suffiraient pas ? La question se discute tant elle interroge la théorie générale du contrat. 

D’autre part, l’annulation du contrat pour la seule violation du monopole bancaire viendrait sacrifier sur l’autel du monopole la force obligatoire du contrat entre les parties. La solution qui viserait à annuler le contrat pourrait alors manquer de pragmatisme et aboutirait à une libération du débiteur bien peu compréhensible pour le créancier attendant le remboursement des sommes prêtées. C’est sans doute cette seconde argumentation que la chambre commerciale a voulu faire triompher, peut-être au détriment de la licéité du contrat en suivant la position de l’Assemblée plénière de 2005. En tout état de cause, il s’agit pour l’heure de la ligne directrice de la Cour de cassation depuis un certain nombre d’années.

En somme, pas de nullité pour la seule violation du monopole bancaire de l’article L. 511-5 du code monétaire et financier. Le résultat reste l’absence de véritable conséquence civile permettant l’anéantissement de l’acte juridique conclu en violation de prescriptions légales pourtant claires et connues. La solution peut étonner mais elle s’inscrit dans une certaine forme de pragmatisme, peut-être légèrement à rebours d’une lecture classique du droit des contrats.

  1168 lectures

Pas de nullité de l’opération de crédit de la seule violation du monopole bancaire

Dans un arrêt en date du 15 juin 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation a précisé que l’opération de crédit conclue en méconnaissance de l’article L. 511-5 du code monétaire et financier n’encourt pas la nullité pour cette seule violation.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1101 lectures

La recevabilité des prétentions nouvelles en matière de partage successoral

La liquidation et le partage d’une succession sont des opérations de nature particulière qui échappent aux incombances procédurales gouvernant les demandes nouvelles.

En l’espèce, trois héritiers étaient en désaccord à propos des opérations de liquidation, compte et partage de la succession de leurs deux parents. En appel, l’une des héritières sollicitait la condamnation des deux autres au rapport de certaines libéralités dont les aurait gratifiés les de cujus. Sa demande est jugée irrecevable car tardive dans un arrêt rendu le 19 mai 2020 par la cour d’appel de Rennes. Les juges d’appel avaient considéré qu’une telle prétention aurait dû être formulée dans les premières conclusions déposées devant eux. En effet, selon l’alinéa premier de l’article 910-4 du code de procédure civile : « À peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond ». Or, faute de survenance ou de révélation d’un fait postérieur à ces écritures, ne sont recevables que les prétentions formées dans les conclusions formant appel incident, ce qui exclut celles contenues dans les conclusions ultérieures (§ 7).

Sur pourvoi, l’arrêt d’appel est pourtant cassé pour violation de la loi au visa de l’article 910-4 du code de procédure civile. La première chambre civile rappelle d’abord qu’en application de l’alinéa 2 du texte, l’irrecevabilité prévue par son alinéa 1er ne s’applique pas aux prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses (§ 5). Elle énonce ensuite en attendu de principe qu’« en matière de partage (…), les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse » (§ 6). Elle en conclut que les prétentions formées dans les dernières conclusions, qui portaient sur de nouvelles demandes de rapports dus par les cohéritiers, avaient trait au partage de l’indivision successorale, de sorte qu’elles devaient s’analyser en une défense aux prétentions adverses (§ 8).

Il est ainsi reproché aux juges rennais de n’avoir envisagé que l’alinéa 1er de l’article 910-4 du code de procédure civile, c’est-à-dire le principe de concentration des prétentions dans les premières conclusions déposées en appel, et d’avoir négligé l’alinéa 2 du même texte qui en tempère la rigueur pour « les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait ».

L’issue n’est pas surprenante mais elle n’est pas dépourvue d’intérêt. Elle n’est pas surprenante car la formule de principe utilisée par la Cour de cassation est classique : en matière de partage, les parties sont respectivement demanderesses et défenderesses, de sorte que toute demande est en réalité une défense à une prétention adverse. Cette jurisprudence est constante depuis 1928 (Civ. 20 avr. 1928 P ; Civ. 1re, 25 sept. 2013, n° 12-21.280 P, Dalloz actualité, 11 oct. 2013, obs. J. Marrocchella ; D. 2014. 1905, obs. V. Brémond, M. Nicod et J. Revel image ; AJ fam. 2013. 722, obs. P. Hilt image ; RTD civ. 2013. 882, obs. B. Vareille image ; ibid. 884, obs. B. Vareille image ; Gaz. Pal. 29 oct. 2013, p. 18, note J. Casey ; ibid. 21 janv. 2014, p. 19, note J. Casey ; JCP 2013. 1323, obs. P. Simler ; 3 avr. 2001, n° 99-20.717 NP, Procédures 2001, n° 155, note H. Croze ; 17 juin 1976, n° 74-14.697 P ; 10 janv. 1978, n° 76-10.835 P ; 20 mars 1989, n° 87-10.798 P ; Civ. 2e, 3 févr. 1983, n° 80-16.702 P, Gaz. Pal. 1983. 1. Pan. 170, obs. S. Guinchard ; Civ. 1re, 12 nov. 1987, n° 86-10.258 NP ; 1er oct. 1996, n° 94-18.297, inédit ; Procédures 1996, n° 322, note R. Perrot).

La décision est cependant intéressante pour au moins deux raisons.

Le partage comme limite au principe de concentration des prétentions en appel

D’une part, c’est la première fois que la Cour de cassation déploie ce raisonnement juridique pour l’application de l’article 910-4 du code de procédure civile. Jusqu’à présent, elle n’avait statué qu’au visa des articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile ou de l’article 107 du décret du 28 août 1972. En d’autres termes, la recevabilité des demandes nouvelles présentées dans le cadre du partage n’était jusqu’à présent qu’un tempérament à l’effet dévolutif de l’appel, qui interdit de soumettre au juge d’appel des prétentions sur lesquelles le premier juge n’a pas statué. Désormais, le partage est aussi une limite au principe de concentration des prétentions en appel, c’est-à-dire à la nécessité de présenter toutes les demandes dès le dépôt des premières conclusions, à peine d’irrecevabilité. Il en résulte une plus grande souplesse pour les parties. Non seulement elles peuvent placer dans le débat en appel des prétentions qui n’ont pas été discutées en première instance, mais elles sont dorénavant autorisées à formuler des demandes dans des conclusions postérieures à celles présentées pour la première fois devant la cour d’appel.

La qualification d’une demande de rapport successoral en défense en prétention adverse

D’autre part, la position de la Cour de cassation, quoique classique et fort opportune, peut être juridiquement discutée. En effet, il est un peu réducteur de qualifier une demande de rapport successoral en défense à une prétention adverse. Ce n’est pas parce qu’un héritier se prétend créancier d’un rapport au titre d’une libéralité qu’il conteste être lui-même débiteur du rapport d’une autre libéralité. Dis plus simplement, je peux prétendre que ma sœur me doit 30 000 € sans contester lui en devoir 50 000 €. Il y a là deux demandes distinctes qui ne sont en rien inconciliables.

Ce n’est qu’en raisonnant de manière globale, par une logique de compte, que l’on peut concevoir la demande de l’un comme une défense à la prétention adverse. La Cour n’évoque pas autre chose lorsqu’elle précise que les parties sont respectivement demanderesses et défenderesses « quant à l’établissement de l’actif et du passif ». Ainsi, en prétendant que ma sœur me doit 30.000€ je ne nie pas lui devoir 50 000 € mais je m’oppose à sa demande en paiement de cette somme, que je souhaite ramener à 20 000 €. Il s’agit bien d’une discussion sur la détermination de l’actif.

Dès lors, la demande de rapport n’est pas moins destinée à faire écarter les prétentions adverses qu’à opposer compensation. La nuance est sans incidence à propos de l’article 564 du code de procédure civile qui évoque clairement les deux finalités : « opposer compensation, [ou] faire écarter les prétentions adverses ». Cependant l’article 910-4 du code de procédure civile ici en cause n’évoque pas la compensation. Le seul moyen pour la Cour de cassation d’étendre sa jurisprudence était donc de continuer à raisonner en termes de tentatives de faire écarter les prétentions adverses plutôt que selon une logique de compensation.

Sur un plan purement juridique, la Cour de cassation aurait donc eu les moyens de se montrer plus exigeante envers les plaideurs si elle l’avait souhaité. Il lui aurait suffi de raisonner à l’échelle de l’obligation au rapport et non à celle de l’actif global et de privilégier le raisonnement fondé sur la compensation. La recevabilité des demandes tardives est donc un véritable choix de sa part. Un choix salutaire, très opportun, voire nécessaire pour tempérer la rigueur de l’effet dévolutif de l’appel et du principe de concentration des prétentions en appel.

Notons pour finir que ce n’est pas tant la notion de partage que celle de la liquidation qui devrait juridiquement fonder la solution. Le partage n’est en somme qu’une opération permettant d’attribuer à chacun son dû et de mettre fin à une indivision, donc de passer d’une propriété collective à plusieurs propriétés privatives. Ce sont plutôt les opérations de liquidation qui permettent de déterminer l’actif et le passif d’une succession, donc d’opérer compensation entre les dettes et créances des parties. La preuve en est que la solution s’applique également en matière de calcul de créance de participation dans le régime matrimonial de participations aux acquêts (Civ. 1re, 22 févr. 2005, n° 02-11.904 NP). Il n’y est pourtant pas question de partage, faute de propriété collective, mais simplement de liquidation, ce qui est suffisant pour justifier la recevabilité des demandes nouvelles en appel. La solution doit donc pouvoir s’appliquer à tous les cas dans lesquels il est nécessaire de réaliser une liquidation en dehors de toute demande en partage, comme par exemple s’agissant du calcul d’une indemnité de réduction en l’absence d’indivision entre le donataire ou légataire et l’héritier réservataire.

  1193 lectures

Régime de la demande de restitution de meubles présentée avant l’ouverture de la procédure collective

Il résulte de la combinaison des articles L. 624-9 et L. 622-23 du code de commerce que la demande de restitution de meubles présentée avant l’ouverture de la procédure collective de leur détenteur précaire n’est pas soumise aux dispositions du premier relatives à la revendication et se poursuit selon celles du second relatives aux instances qui ne tendent pas au paiement d’une somme d’argent.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1064 lectures

De l’autonomie des procédures d’exécution forcée

Si la procédure d’avis à tiers détenteur peut porter sur les rémunérations du débiteur, elle demeure distincte de la procédure de saisie des rémunérations prévue par le code du travail.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1130 lectures

De l’autonomie des procédures d’exécution forcée

En parfaite cohérence avec les standards internationaux de l’exécution (v., par ex., Commission européenne pour l’efficacité de la justice, Guide des bonnes pratiques en matière d’exécution des décisions de justice, CEPEJ (2015)10, 11 déc. 2015, spéc. pt 36), le droit français comporte des procédures d’exécution adaptées non seulement aux différents types d’obligations susceptibles d’être consacrées dans un titre exécutoire (obligation de faire, de s’abstenir de faire ou de payer), mais également à la composition des patrimoines (ex. : meubles ou immeubles, corporels ou incorporels) ou encore à la qualité des personnes impliquées (ex. : particulier ou comptable public). Si cette diversité de procédures sert l’efficacité de l’exécution, elle peut également parfois engendrer des difficultés portant sur l’articulation de ces procédures.

Dans l’affaire ayant conduit au prononcé de l’arrêt sous commentaire, ces interrogations portaient sur les cas respectifs d’application d’une saisie des rémunérations (C. trav., art. L./R. 3252-1 s.) et d’un avis à tiers détenteur (LPF, art. L. 262 s., rédaction antérieure à la loi n° 2017-1775, 28 déc. 2017). À la faveur d’un moyen de pur droit relevé d’office – en application des dispositions de l’article 620, alinéa 2, du code de procédure civile et dans...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1157 lectures

Droit des marques : cas de forclusion par tolérance

La régularisation d’un acte introductif d’instance postérieure à l’expiration du délai de forclusion par tolérance, et après mise en demeure dûment notifiée, n’exclut pas la forclusion si cela résulte d’un manque de diligence de la partie requérante, qui ne peut donc plus solliciter de mesures de cessation ni annexes.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1165 lectures

Éoliennes : pas d’intérêt pour agir pour le département

Par une décision en date du 31 mai 2022, la cour administrative d’appel de Bordeaux a jugé que le département de la Charente-Maritime n’avait pas d’intérêt à agir contre la décision préfectorale d’installer et d’exploiter une ferme de huit éoliennes sur une commune du département, au regard des dispositions de l’article L. 511-1 du code de l’environnement auquel renvoie l’article L. 181-3 du même code. 

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1103 lectures

Notion de gardien d’un ouvrage irrégulièrement implanté sur le domaine public maritime

Le litige opposant la société civile immobilière (SCI) Mayer au préfet des Alpes-Maritimes est l’occasion pour le Conseil d’État de concrétiser la notion de gardien d’un ouvrage immobilier irrégulièrement implanté sur le domaine public maritime (CGPPP, art. L. 2132-3).

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1027 lectures

Notion de gardien d’un ouvrage irrégulièrement implanté sur le domaine public maritime

Le litige opposant la société civile immobilière (SCI) Mayer au préfet des Alpes-Maritimes est l’occasion pour le Conseil d’État de concrétiser la notion de gardien d’un ouvrage immobilier irrégulièrement implanté sur le domaine public maritime (CGPPP, art. L. 2132-3).

en lire plus

  981 lectures

Loyers commerciaux au 1[SUP]er[/SUP] trimestre 2022 : l’ICC et l’ILAT toujours plus haut !

Au premier trimestre 2022, l’ICC et l’ILAT continuent à s’envoler, tandis que la nouvelle formule de l’ILC limite la casse.

Sur la boutique Dalloz

en lire plus

  952 lectures

Loyers commerciaux au 1[SUP]er[/SUP] trimestre 2022 : l’ICC et l’ILAT toujours plus haut !

Au premier trimestre 2022, l’ICC et l’ILAT continuent à s’envoler, tandis que la nouvelle formule de l’ILC limite la casse.

Sur la boutique Dalloz

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1308 lectures

De la précision des délais d’exécution dans le bon de commande

Le contentieux autour de l’installation des panneaux photovoltaïques continue d’alimenter en pourvois la première chambre civile de la Cour de cassation. Au printemps 2021, nous avions examiné un arrêt ayant précisé que le défaut du prix unitaire dans le bon de commande ne permettait pas d’engager la nullité du contrat conclu (Civ. 1re, 2 juin 2021, n° 19-22.607 F-P, Dalloz actualité, 15 juin 2021, obs. C. Hélaine ; D. 2021. 1132 image). Le 15 juin 2022, la première chambre civile a pu se pencher sur la question des mentions exigées dans le bon de commande et figurant à l’article L. 111-1 du code de la consommation, notamment sur le moment d’exécution des obligations du vendeur. À l’origine du pourvoi, on retrouve un démarchage à domicile classique. Une personne physique décide de conclure auprès d’une société un contrat de fourniture et d’installation de panneaux photovoltaïques et de chauffe-eau thermodynamique financé par un crédit consenti par un établissement bancaire, souscrit la veille avec son épouse. Les acquéreurs invoquent diverses irrégularités sur le bon de commande en estimant notamment que le délai d’exécution est trop vague. Ils assignent le vendeur et la banque en annulation du contrat de vente mais également du prêt souscrit. La cour d’appel de Poitiers relève une anomalie dans le bon de commande : celui-ci comportait une mention pré-imprimée indiquant que la livraison du ou des matériaux et la pose auraient lieu dans un délai maximum de 120 jours. La cour d’appel annule le contrat principal de ce chef sur le fondement de l’article L. 111-1, 3°, du code de la consommation. Elle refuse de voir dans le comportement des acquéreurs une volonté tacite de confirmer le contrat ainsi nul. La société venderesse se pourvoit en cassation et la banque émet un pourvoi incident. Le vendeur et la banque font grief à l’arrêt d’annuler le contrat. Ils estiment que l’indication par le professionnel du délai auquel il s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service suffit au sens de l’article L. 111-1, 3°, du code de la consommation. Le vendeur reprochait également de ne pas avoir considéré que l’acquéreur s’était exécuté en connaissance de cause et avait donc renoncé à se prévaloir de l’irrégularité entachant le bon de commande.

Le pourvoi est rejeté. Dans la droite ligne de la jurisprudence de la première chambre civile en droit de la consommation, la solution vient préciser quelques contours originaux et inédits en matière de rigueur du bon de commande. L’arrêt interroge également la confirmation de l’acte nul.

De l’importance de la précision des délais dans le bon de commande

La Cour de cassation vient opter pour une lecture qui peut paraître exigeante de l’article L. 111-1, 3°, du code de la consommation lequel précisait dans sa rédaction applicable au litige que le vendeur doit mentionner « en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel (il) s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ». On sait qu’il existe depuis quelques années une certaine tolérance de la jurisprudence sur cette disposition (J.-D. Pellier, Droit de la consommation, 3e éd., Dalloz, coll. « Cours », 2021, p. 51, n° 29). La solution du 15 juin 2022 s’inscrit, au contraire, dans une certaine forme de sévérité en refusant de voir remplie la condition posée par le texte par une mention pré-imprimée selon laquelle la livraison du ou des matériaux et la pose auraient lieu dans un délai maximum de 120 jours. La première chambre civile vient donc sanctionner non l’absence de délai mais un délai qui paraît « global » et ne permettant pas aux acquéreurs de déceler quand le vendeur exécuterait ses différentes obligations. En réalité, ce que la Cour de cassation critique reste le contournement de la prescription légale par une sorte de délai maximal, standardisé à tous les contrats concernés et pré-imprimés sur chaque bon de commande.

La motivation des juges du fond est particulièrement bien menée sur ce point : « toutefois, cette indication est trop vague pour être conforme aux dispositions susvisées de l’article L. 111-1, 3°, du code de la consommation, puisqu’elle ne distinguait pas entre le délai de pose des modules et celui de réalisation des prestations à caractère administratif (…) » (nous soulignons). Il faut donc, pour les professionnels rédigeant des bons de commande, veiller à détailler les différents délais jusqu’à remplir la formalité de l’article L. 111-1, 3°, du code de la consommation.

La sanction est sévère puisque c’est la nullité du contrat qui est ici prononcée par les juges du fond. Le pourvoi était, bien évidemment, orienté tout entier pour pouvoir éviter cet anéantissement rétroactif en pensant que l’indication prévue au contrat était suffisante. Il faut, en tout état de cause, toujours se méfier des mentions « pré-imprimées ». Elles ne sont pas toujours garantes d’un respect individualisé à chaque situation. Mieux vaut donc adapter le bon de commande si plusieurs délais doivent être appliqués, ce qui était logique ici pour installer les différents éléments de l’installation photovoltaïque.

L’arrêt permet également de s’interroger sur les conditions de la confirmation tacite.

De la recherche d’une confirmation par les acquéreurs

Les cocontractants du couple de consommateurs ont joué leur ultime carte dans la seconde partie de leur pourvoi. Ils arguaient de la possibilité de voir une confirmation de l’acte entaché de nullité dans le comportement des acquéreurs, notamment par la signature de l’attestation de livraison et d’installation, par le versement du montant du capital dans les mains du vendeur par la banque mais également par la conclusion d’un contrat d’achat d’énergie électrique au 28 novembre 2016. Pour les demandeurs au pourvoi, le contrat avait été exécuté si bien que les effets de la nullité relative ne trouveraient pas à s’appliquer.

La Cour d’appel de Poitiers avait procédé à une adoption de motifs ici. Le jugement entrepris avait considéré que ni la banque ni le vendeur n’avaient « rapporté la preuve, exigée par l’article 1338 du code civil, que les emprunteurs avaient eu connaissance du vice affectant l’obligation et qu’ils avaient eu l’intention de le réparer ». Sur ce point, la première chambre civile refuse de suivre le raisonnement des demandeurs au pourvoi qui voyaient dans la conclusion de toute une série d’actes postérieurs la présence d’une confirmation, au moins tacite du contrat.

On retrouve ici les motifs habituels des conditions de la confirmation tacite (F. Terré, P. Simler, Y. Lequette et F. Chénedé, Droit civil – Les obligations, 12e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2018, p. 628, n° 554). La solution est heureuse car le comportement de l’acquéreur n’a pas de rapport réel avec le contrat initial et sa nullité. Pour que la confirmation puisse agir encore faut-il une « volonté univoque de ratifier le contrat en toute connaissance de cause » ; ce qui n’est pas le cas ici. Du moins, la preuve n’en est pas rapportée. La motivation est exempte de toute critique fondamentale. 

La première chambre civile opte donc pour une solution assez rigide eu égard au bon de commande de l’article L. 111-1 du code de la consommation et plus particulièrement des délais d’exécution. La prudence commande la précision dans le bon de commande en distinguant les différentes étapes d’exécution et en évitant au maximum les délais globaux qui ne parviennent pas à remplir l’objectif du texte sur ce point. Sur la confirmation, la solution est classique : celle-ci ne se présume pas, encore faut-il rapporter la preuve de la volonté univoque de ratifier le contrat en connaissance de cause. Le droit de la consommation ne fait pas exception ici, bien au contraire. Voici donc une solution dans la plus grande orthodoxie sous l’angle de la théorie générale du contrat. 

  1175 lectures

De la précision des délais d’exécution dans le bon de commande

Dans un arrêt rendu le 15 juin 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation est venue préciser les contours de l’article L. 111-1, 3°, du code de la consommation à propos d’un bon de commande sur lequel figurait une mention pré-imprimée avec un délai global de quatre mois.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1310 lectures

Cabinets de conseil : le Sénat veut une loi McKinsey

Après leur retentissante commission d’enquête sur l’influence des cabinets de conseil dans la sphère étatique, les sénateurs viennent de déposer une proposition de loi transpartisane pour mieux encadrer leur action. Un texte consensuel au Sénat, qui vise surtout l’action gouvernementale.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1214 lectures

De la précision des délais d’exécution dans le bon de commande

Dans un arrêt rendu le 15 juin 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation est venue préciser les contours de l’article L. 111-1, 3°, du code de la consommation à propos d’un bon de commande sur lequel figurait une mention pré-imprimée avec un délai global de quatre mois.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  0 lectures

Surendettement des particuliers : acte propre à faciliter le paiement de la dette

par Guillaume Payan, Professeur de droit privé, Université de Toulonle 27 juin 2022

Civ. 2e, 9 juin 2022, F-B, n° 19-26.230

Aux termes de l’article L. 733-7 du code de la consommation, la commission de surendettement des particuliers peut imposer que les mesures protectrices du débiteur surendetté prévues aux articles L. 733-1 (par ex. rééchelonnement du paiement des dettes, imputation des paiements prioritairement sur le capital, suspension de l’exigibilité de certaines créances, etc.) et L. 733-4 (par ex. effacement partiel des créances) de ce même code « soient subordonnées à l’accomplissement par le débiteur d’actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette ». Il en va de même pour le juge des contentieux de la protection (C. consom., art. L. 733-10) saisi d’une contestation des mesures imposées par ladite commission (C. consom., art. L. 733-13).

La Cour de cassation a déjà jugé que la vente d’un immeuble peut compter parmi ces « actes » attendus de la part des débiteurs (v. not. Civ. 1re, 15 janv. 2002, n° 00-04.079). Cette solution est reprise dans l’arrêt de la...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1087 lectures

Surendettement des particuliers : acte propre à faciliter le paiement de la dette

Il résulte des articles L. 733-7 et L. 733-13 du code de la consommation que la commission de surendettement des particuliers, comme le juge, peut subordonner les mesures de redressement à la vente par le débiteur surendetté de son immeuble.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1253 lectures

Surendettement des particuliers : acte propre à faciliter le paiement de la dette

Il résulte des articles L. 733-7 et L. 733-13 du code de la consommation que la commission de surendettement des particuliers, comme le juge, peut subordonner les mesures de redressement à la vente par le débiteur surendetté de son immeuble.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  0 lectures

Validation d’aides d’État à des compagnies aériennes en difficulté

Le Tribunal de l’Union européenne a confirmé la décision de la Commission approuvant l’aide au sauvetage à hauteur de 36 660 000 d’euros accordée par la Roumanie à sa compagnie aérienne nationale TAROM. Il a également confirmé la compatibilité de l’aide allemande au sauvetage de la compagnie Condor avec le droit de l’Union européenne.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1152 lectures

Les mesures de sûreté conservatoires et les exigences du droit à un procès équitable

Il est bien admis qu’il découle de l’article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales que, en matière pénale, la personne poursuivie ou son avocat dispose de la parole en dernier (Crim., 18 mai 2022, n° 22-81.573 NP ; 10 nov. 2021, n° 21-85.182 P, Dalloz actualité, 24 nov. 2021, obs.  David Pamart ; D. 2021. 2048 image ; AJ pénal 2022. 41 image ; comp. Crim. 25 nov. 1998, n° 98-81.273 P ; 17 févr. 1983, n° 82-90.664 P). Mais cette exigence ne cesse pas de produire ses effets en atteignant les frontières du procès pénal. La première chambre civile l’applique ainsi en matière disciplinaire (Civ. 1re, 25 mars 2020, n° 19-14.413 NP ; 20 févr. 2019, n° 18-12.298 P, Dalloz actualité, 14 mars 2019, obs. A. Bolze ; D. 2019. 438 image ; 1er juin 2016, n° 15-11.243, Dalloz actualité, 22 juin 2016, obs. F. Mélin ; et 15-11.244 P ; 3 juill. 2013, n° 12-23.553 P, Ordre des avocats au barreau des Pyrénées-Orientales, Dalloz actualité, 16 juill. 2013, obs. A. Portmann ; D. 2013. 1840 image ; 16 mai 2012, n° 11-17.683 P, Proc. rép. près TGI Chartres, Dalloz actualité, 1er juin 2012, obs. L. Dargent ; D. 2012. 1411 image ; 25 févr. 2010, n° 09-11.180 P, Dalloz actualité, 5 mars 2010, obs. L. Dargent ; D. 2010. 658, obs. L. Dargent image), au contraire de la chambre commerciale qui, paraissant accorder une grande importance à la possibilité de produire une note en délibéré, juge que le droit à un procès équitable n’implique pas que la personne à l’encontre de laquelle il est demandé le prononcé d’une sanction professionnelle ait la parole en dernier « avant la clôture des débats » (Com. 29 sept. 2021, n° 19-25.112 P, Dalloz actualité, 15 oct. 2021, obs. G. Teboul ; D. 2021. 1765 image).

L’application de cette règle, issue du droit à un procès équitable, peut toutefois donner lieu à quelques difficultés lorsqu’est ordonnée une « mesure de suspension provisoire ». Lorsqu’un officier public ou ministériel fait l’objet d’une poursuite pénale ou disciplinaire, le...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1046 lectures

Les mesures de sûreté conservatoires et les exigences du droit à un procès équitable

La Cour de cassation juge que la suspension provisoire des fonctions d’un huissier de justice pendant la durée des poursuites pénales ou disciplinaires dont il fait l’objet ne constitue pas une sanction, mais « une mesure de sûreté conservatoire » ; elle en déduit qu’il n’est pas nécessaire qu’il ait la parole en dernier lors de l’audience.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1027 lectures

Requalification d’un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein : point de départ et durée du délai de prescription

Tenant compte de la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur la requalification d’un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet doit être soumise à la prescription triennale de l’article L. 3245-1 du code du travail. Le point de départ du délai de prescription se situe à la date d’exigibilité des rappels de salaire dus au titre de la requalification.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  964 lectures

Pas de contribution aux charges du mariage par apport de fonds pour la construction d’un bien à usage familial

La Cour de cassation réaffirme et étend sa position relative au périmètre de la contribution aux charges du mariage : pour l’acquisition comme pour l’amélioration par voie de construction d’un bien indivis affecté à l’usage familial, l’apport en capital de fonds personnels effectué par un époux séparé de biens ne participe pas de l’exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage, sauf convention contraire des époux.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1075 lectures

Erreur sur les qualités substantielles et défiscalisation

La chambre commerciale de la Cour de cassation a précisé que les parties peuvent convenir que les conditions d’éligibilité à une défiscalisation peuvent constituer une qualité substantielle d’un contrat. La Cour ordonne également, de manière originale, une médiation avant le renvoi à une cour d’appel.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1146 lectures

Erreur sur les qualités substantielles et défiscalisation

La chambre commerciale de la Cour de cassation a précisé que les parties peuvent convenir que les conditions d’éligibilité à une défiscalisation peuvent constituer une qualité substantielle d’un contrat. La Cour ordonne également, de manière originale, une médiation avant le renvoi à une cour d’appel.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1205 lectures

Experts judiciaires : nécessité de l’indépendance

Par un arrêt du 16 juin 2022, la Cour de cassation se prononce à nouveau sur la condition d’indépendance qui s’impose à toute personne souhaitant être expert judiciaire.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1139 lectures

CCMI : le temps de la révision du prix

La période à prendre en compte pour le calcul de la révision du prix d’un contrat de construction de maison individuelle est celle s’écoulant entre la signature du contrat et le mois suivant la plus tardive des deux dates entre l’obtention du permis de construire et la réalisation de la condition suspensive d’obtention de prêt. 

en lire plus

  1045 lectures

Prescription de l’action en responsabilité contre le transporteur aérien à titre gratuit

La Cour de cassation rappelle que l’action en responsabilité contre le transporteur est intentée, sous peine de déchéance, dans le délai de deux ans à compter de l’arrivée à destination, du jour où l’aéronef aurait dû arriver ou de l’arrêt du transport. Le fait que la pilote ait été déclarée coupable d’homicide involontaire sur la passagère n’a pas pour effet de retarder le point de départ de ce délai de prescription de deux ans.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1131 lectures

L’Observatoire des finances locales dresse son bilan post-covid

Coiffé de sa double casquette de président du Comité des finances locales (CFL) et de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales, André Laignel a présenté à la presse le 21 juin les grands chiffres du prérapport de l’Observatoire sur les finances des collectivités en 2022.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1011 lectures

L’opposabilité de la désignation syndicale adressée au président d’une UES

La désignation d’un délégué syndical ou d’un représentant de section syndicale au sein d’une unité économique et sociale déjà reconnue est valablement notifiée à une seule personne lorsque celle-ci a la qualité de président des entités juridiques composant l’unité économique et sociale.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1064 lectures

Renouer un dialogue serein et fécond entre magistrats et avocats

Le 20 juin 2022, le Conseil consultatif conjoint de la déontologie de la relation magistrat-avocat s’est vu remettre les trois rapports des groupes de travail lancés le 26 mai 2021. Dalloz actualité revient sur les principales recommandations qui s’en dégagent.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1167 lectures

Profits subsistants liés à l’acquisition et à l’amélioration d’un même bien : évaluations distinctes

Lorsqu’un bien a été acquis puis amélioré et que chacune de ces opérations a fait naître une créance entre époux, les profits subsistants doivent être déterminés distinctement. La créance liée à l’acquisition se détermine d’après la valeur du bien au jour de la liquidation selon son état au jour de l’acquisition. Celle liée à l’amélioration se calcule d’après la différence entre la valeur du bien amélioré au jour de la liquidation et celle qui aurait été la sienne sans les travaux.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1190 lectures

La procédure de vérification des créances, le pouvoir juridictionnel et l’effet dévolutif de l’appel

Lorsque se présente devant le juge-commissaire une contestation sérieuse dépassant son office juridictionnel, le magistrat renvoie les parties à mieux se pourvoir et sursoit à statuer dans l’attente de la décision du juge « compétent ». Ce dernier doit alors statuer sur la contestation, mais ne peut pas se prononcer sur l’admission ou le rejet de la créance au passif. Or, en l’espèce, une cour d’appel était saisie d’un recours contre le jugement d’un tribunal ayant déclaré irrecevables et mal fondées les contestations sérieuses d’un débiteur sur une déclaration de créance et ordonné, en excédant son pouvoir, l’admission de ladite créance au passif. Dans ces conditions et pour la Cour de cassation, la cour d’appel se trouvait saisie, par l’effet dévolutif, de la connaissance des contestations soulevées. Par conséquent, elle ne pouvait pas annuler l’ensemble des dispositions du jugement, en se fondant sur l’indivisibilité des demandes, sans statuer sur la recevabilité et le bien-fondé des contestations.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1175 lectures

Désignation et organisation du conseil syndical

Le groupe de recherche sur la copropriété (GRECCO) a rendu une préconisation sur la désignation et l’organisation du conseil syndical.

Sur la boutique Dalloz

en lire plus

  1060 lectures

La procédure de vérification des créances, le pouvoir juridictionnel et l’effet dévolutif de l’appel

Lorsque se présente devant le juge-commissaire une contestation sérieuse dépassant son office juridictionnel, le magistrat renvoie les parties à mieux se pourvoir et sursoit à statuer dans l’attente de la décision du juge « compétent ». Ce dernier doit alors statuer sur la contestation, mais ne peut pas se prononcer sur l’admission ou le rejet de la créance au passif. Or, en l’espèce, une cour d’appel était saisie d’un recours contre le jugement d’un tribunal ayant déclaré irrecevables et mal fondées les contestations sérieuses d’un débiteur sur une déclaration de créance et ordonné, en excédant son pouvoir, l’admission de ladite créance au passif. Dans ces conditions et pour la Cour de cassation, la cour d’appel se trouvait saisie, par l’effet dévolutif, de la connaissance des contestations soulevées. Par conséquent, elle ne pouvait pas annuler l’ensemble des dispositions du jugement, en se fondant sur l’indivisibilité des demandes, sans statuer sur la recevabilité et le bien-fondé des contestations.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1234 lectures

La procédure de vérification des créances, le pouvoir juridictionnel et l’effet dévolutif de l’appel

La problématique de la vérification des créances constitue indéniablement l’un des contentieux les plus importants du droit des entreprises en difficulté. Aussi, la jurisprudence a souvent l’occasion de se prononcer sur l’étendue des pouvoirs reconnus au juge-commissaire dans le cadre de la procédure de vérification des créances. Si l’arrêt sous commentaire s’inscrit dans ce mouvement jurisprudentiel, il le dépasse néanmoins en apportant d’intéressantes précisions sur les conséquences procédurales du régime des pouvoirs reconnus au juge-commissaire.

L’éventail de ces derniers est prévu à l’article L. 624-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi de sauvegarde du 26 juillet 2005 et applicable en l’espèce. Le texte prévoyait qu’« au vu des propositions du mandataire judiciaire, le juge-commissaire décide de l’admission ou du rejet des créances ou constate soit qu’une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence ». S’agissant de la décision d’incompétence, l’article R. 624-5 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi de sauvegarde, disposait que « la décision d’incompétence ouvre au créancier, au débiteur et au mandataire judiciaire un délai d’un mois à compter de la notification ou de la réception de l’avis délivré pour saisir la juridiction compétente à peine de forclusion […] ».

Aux côtés de ces précisions textuelles, la jurisprudence est venue quelque peu affiner le domaine des décisions susceptibles d’être prises par le juge-commissaire. Ainsi a-t-elle ajouté à l’hypothèse d’une discussion relevant de la compétence d’une autre juridiction, celle du défaut de pouvoir juridictionnel du juge-commissaire en présence d’une contestation sérieuse sur le fond de la créance, ce qui sera, par la suite, repris par l’ordonnance du 12 mars 2014. En ce domaine, puisque le juge-commissaire ne peut statuer qu’en tant que juge « de l’évidence », il a été jugé qu’il commettrait un excès de pouvoir s’il tranchait une contestation échappant à ses prérogatives et relevant du seul pouvoir juridictionnel du juge du fond (v., par ex., Com. 12 avr. 2005, n° 03-17.207 NP). En réalité, et en présence d’une contestation sérieuse, le juge-commissaire doit surseoir à statuer sur l’admission de la créance et inviter les parties à saisir le juge compétent pour que soit tranchée la contestation sérieuse (Com. 28 janv. 2014, Marseillaise de crédit (Sté), n° 12-35.048 P, Dalloz actualité, 12 févr. 2014, obs. A. Lienhard ; D. 2014. 368, obs. A. Lienhard image ; RTD com. 2014. 863, obs. A. Martin-Serf image).

L’arrêt sous commentaire témoigne de la mise en œuvre et des conséquences procédurales de cette technique sur les pouvoirs juridictionnels du juge du fond chargé de trancher la contestation...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  0 lectures

Un coup d’arrêt à l’ubérisation, à propos des arrêts du Tribunal fédéral suisse du 30 mai 2022, une première en Suisse

La Cour de justice suisse a retenu sans arbitraire que la recourante [Uber] était liée aux chauffeurs [et aux livreurs] par un contrat de travail.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1057 lectures

Responsabilité du fait d’une préemption légale et de son abandon

La responsabilité sans faute d’une commune peut être engagée du fait de décisions légales de préemption puis de renonciation à l’exercice de ce droit.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  994 lectures

Responsabilité du fait d’une préemption légale et de son abandon

La responsabilité sans faute d’une commune peut être engagée du fait de décisions légales de préemption puis de renonciation à l’exercice de ce droit.

en lire plus

  1056 lectures

Une mise en demeure de remise en état du domaine public est insusceptible de recours

Une mise en demeure de procéder à la remise en état du domaine public maritime naturel avant l’engagement d’une procédure de contravention de grande voirie n’est pas susceptible de recours, juge le Conseil d’État.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  908 lectures

Loi applicable aux accidents de la circulation

L’arrêt prononcé par la première chambre civile du 15 juin 2022 mérite, même s’il n’est pas un grand arrêt, de retenir l’attention. Il permet en effet de s’arrêter sur la Convention de La Haye du 4 mai 1971 sur la loi applicable en matière d’accidents de la circulation routière, qui est bien connue des universitaires, mais sans doute assez ignorée des praticiens.

Rappelons que cette convention détermine la loi applicable à la responsabilité civile extracontractuelle découlant d’un accident de la circulation routière (art. 1).

Conformément au principe traditionnel qui conduit à appliquer en matière de responsabilité délictuelle la lex...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1219 lectures

L’exercice du droit de surplomb précisé par décret

Texte d’application de la loi « Climat et résilience » du 22 août 2021, un décret du 23 juin 2022 s’intéresse au droit de surplomb pour l’isolation thermique par l’extérieur d’un bâtiment.

Sur la boutique Dalloz

en lire plus

  1120 lectures

Le renforcement du contradictoire dans les procédures orales

Lorsque la procédure est orale, le juge qui constate l’absence de production d’une pièce, dont la communication est pourtant visée dans les écritures, doit-il inviter les parties à s’expliquer sur cette anomalie ? C’est à cette question qu’a répondu la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans l’arrêt du 9 juin 2022 sous commentaire.

Alors qu’un avocat était en litige avec un (ancien) de ses clients (au sujet des honoraires dus par le second au premier), le premier président d’une cour d’appel avait cru pouvoir condamner le client au versement d’une certaine somme car celui-ci n’avait versé aux débats ni le relevé bancaire ni la copie du chèque établissant le paiement qu’il prétendait avoir effectué. Même si cette absence de production aux débats, constatée par le premier président, était sans doute difficilement contestable, le client forma un pourvoi en cassation afin de soutenir que le magistrat aurait pu l’avertir de cette omission dès lors que l’en-tête de ses observations écrites, régulièrement soutenues à l’audience, mentionnait la communication de ces pièces et que cette communication n’était pas discutée par l’adversaire. La Cour de cassation fit droit à ce moyen et censura l’ordonnance rendue par le premier président de la cour d’appel.

Cette solution n’est pas inconnue. Lorsque la procédure est écrite, la Cour de cassation répète à l’envi, en s’appuyant sur l’article 16 du code de procédure civile, que le juge doit inviter les parties à s’expliquer sur l’absence de production d’une pièce figurant dans le bordereau annexé aux conclusions et dont la communication n’a pas été discutée (Com. 25 mai 2022, n° 20-16.676 NP ; Soc. 13 avr. 2022, n° 20-23.668 NP ; Com. 30 mars 2022, n° 19-20.624 NP ; Civ. 3e, 16 sept. 2021, n° 19-22.160 NP ; Civ. 2e, 28 janv. 2021, n° 19-24.803 NP ; Civ. 3e, 16 mars 2011, n° 09-69.544 P, Dalloz actualité, 29 mars 2011, obs. G. Forest ; Ferrera, AJDA 2011. 862 image ; D. 2011. 948, obs. G. Forest image ; ibid. 2127, chron. G. Forest image ; ibid. 2298, obs. B. Mallet-Bricout et N. Reboul-Maupin image ; AJDI 2012. 93, chron. S. Gilbert image ; ibid. 93, chron. S. Gilbert image ; RDI 2011. 325, obs. R. Hostiou image ; AJCT 2011. 365, obs. J.-F. Struillou image). L’absence de production d’une telle pièce constitue en effet une anomalie procédurale : il s’agit vraisemblablement d’un oubli, bien dommageable pour le détenteur de la pièce, même si on ne peut totalement exclure que celle-ci n’ait pas été produite volontairement parce qu’elle contenait des éléments défavorables à sa cause (R. Perrot, obs. ss Civ. 2e, 11 janv. 2006, n° 04-11.129, RTD civ. 2006. 374 image). En invitant l’ensemble des parties à s’expliquer, le juge devrait pouvoir y voir plus clair… Mais l’enfer est toujours pavé de bonnes intentions. Contraindre le juge à solliciter les explications des parties dès que la production d’une pièce, même insignifiante pour la solution du litige, a été omise serait sans doute excessif ; c’est donc uniquement lorsqu’il s’est fondé sur l’absence de production d’une pièce...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1101 lectures

Cada : des droits nouveaux pour journalistes et ONG

Le bilan de la Cada est d’abord quantitatif. Le nombre de demandes d’avis et de conseils reçus en 2021 a augmenté de près de 30 % par rapport à 2020 (année covid). C’est supérieur de 23 % à la moyenne des quatre années précédentes. La commission a réussi à augmenter le nombre de dossiers bouclés : de 5 029 avis et conseils rendus en 2018, ce chiffre est passé 7 842 en 2021, un record. Alors qu’en 2018-2019, elle mettait en moyenne six mois à répondre, ce délai est de quatre-vingts jours, notamment grâce à la réorganisation de la commission.

L’an dernier, la Cada a obtenu une modification législative dans la loi 3DS pour mieux traiter les demandes sérielles. En 2021, dix demandeurs, dont huit journalistes et associations, ont, à eux seuls, entraîné à 1 280 avis. La modification législative vise à simplifier l’action de la Cada en cas de demandes massives d’un même document à plusieurs collectivités.

Des droits nouveaux pour les journalistes, chercheurs et ONG

Comme le note Jean-Luc Nevache, le président de la Cada, dans son avant-propos, sous l’impulsion de...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1138 lectures

Partage de responsabilité en cas d’illégalité d’une autorisation de licenciement d’un salarié protégé

Si la responsabilité de l’État peut être engagée au titre de l’illégalité de l’autorisation de licenciement d’un salarié protégé, la faute commise par l’employeur peut être une cause d’exonération partielle.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  944 lectures

Partage de responsabilité en cas d’illégalité d’une autorisation de licenciement d’un salarié protégé

Si la responsabilité de l’État peut être engagée au titre de l’illégalité de l’autorisation de licenciement d’un salarié protégé, la faute commise par l’employeur peut être une cause d’exonération partielle.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  929 lectures

Notion de dépenses utiles engagées pour l’exécution d’un contrat annulé pour entente

Nouveau volet dans l’affaire dite du « cartel des panneaux routiers », une décision du 17 juin est l’occasion pour le Conseil d’État, après avoir précisé la notion de dépenses utiles à la personne publique engagées pour l’exécution d’un contrat annulé pour entente, de censurer la méthode retenue en l’espèce.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  988 lectures

Pas de cristallisation des règles d’urbanisme sans cession des lots

Le bénéficiaire d’un arrêté de non-opposition à déclaration préalable de lotissement ne peut se prévaloir, à l’occasion d’une demande de permis de construire, de la cristallisation des règles d’urbanisme en l’absence de tout transfert de propriété ou de jouissance du lot résultant de la division de la parcelle. 

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  965 lectures

Compétence de l’ONIAM : rappel du principe de subsidiarité

La compétence de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux et affection iatrogène (ONIAM) obéit au principe de subsidiarité, lequel implique la possibilité, pour le fonds d’indemnisation, d’exercer un recours subrogatoire contre le responsable du dommage et contre son assureur.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1291 lectures

Compétence de l’ONIAM : rappel du principe de subsidiarité

À l’occasion d’un arrêt rendu le 15 juin 2022, la première chambre civile est venue rappeler que la compétence de l’ONIAM obéit au principe de subsidiarité, lequel implique la possibilité, pour le fonds d’indemnisation, d’exercer un recours subrogatoire contre le responsable du dommage et contre son assureur.

En l’espèce, le 12 janvier 2007, à l’occasion d’une intervention médicale effectuée dans une clinique, une patiente a chuté de la table d’opération, ce qui a entraîné une fracture de vertèbres dorsales avec contusion de la moelle épinière.

Le 21 janvier 2008, la victime a saisi la commission de conciliation et d’indemnisation de la région Aquitaine (CCI), laquelle a estimé que le dommage résultait d’un défaut de surveillance imputable à l’infirmière panseuse et au médecin anesthésiste exerçant à titre libéral. Dès lors, il appartenait à l’assureur du médecin anesthésiste ainsi qu’à celui de la clinique de faire une offre d’indemnisation. Selon la CCI, la charge de la réparation devait être répartie entre eux pour moitié.

L’assureur du médecin anesthésiste a présenté une offre d’indemnisation à la victime, couvrant la moitié des préjudices, qui a été acceptée. En revanche, l’assureur de la clinique a refusé de faire une telle offre.

Afin de pallier cette carence, l’ONIAM s’est substitué à l’assureur et a indemnisé la victime pour l’autre moitié de son préjudice. Par la suite, l’ONIAM a entendu exercer un recours subrogatoire contre l’assureur de la clinique. Son recours a toutefois été rejeté, de sorte que l’ONIAM a finalement assigné le médecin anesthésiste et son assureur afin d’obtenir le remboursement des sommes versées. La cour d’appel de Pau a rejeté cette demande. Les juges du fond ont considéré que le fonds s’était substitué à l’assureur de la clinique, et non à l’assureur du médecin anesthésiste. Ainsi, l’ONIAM n’était pas fondé à exercer un recours subrogatoire contre le médecin anesthésiste et son assureur.

Dans un arrêt du 15 juin 2022, la Cour de cassation casse et annule la décision des juges du fond. Au visa des articles L. 1142-1, II, L. 1142-14 et L. 1142-15 du code de la santé publique, elle rappelle que la compétence de l’ONIAM et l’indemnisation au titre de la solidarité nationale ont un caractère subsidiaire, et admet le recours subrogatoire du fonds contre le médecin anesthésiste et son assureur.

Institué par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, l’ONIAM a pour compétence principale l’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CSP, art. L. 1142-22). Cette compétence obéit à une condition préalable négative, qui est l’absence de responsabilité d’un professionnel de santé. La compétence de l’ONIAM est ainsi subsidiaire, dans le sens où la victime ne peut bénéficier du fonds que si aucune responsabilité ne peut être mise en jeu à l’encontre d’un professionnel de santé (M. Bacache-Gibeili, Les obligations. La...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1180 lectures

La neutralisation des clauses de médiation préalable dans le contrat de travail

À l’instar de tout autre droit, l’action peut faire l’objet d’actes juridiques. Parmi ceux-ci figurent des conventions visant à la « suspendre temporairement » (N. Cayrol, Les actes ayant pour objet l’action en justice, thèse, préf. F. Grua [dir.], Economica, 2001, spéc. nos 327 s.). Les clauses contractuelles de conciliation et de médiation préalables en sont une illustration topique : elles subordonnent l’exercice du droit d’action à un préalable amiable contractuellement organisé. Mettant fin à des divergences jurisprudentielles, une chambre mixte de la Cour de cassation proclama en 2003 que « licite, la clause d’un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en œuvre suspend jusqu’à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s’impose au juge si les parties l’invoquent » (Cass., ch. mixte, 14 févr. 2003, n° 00-19.423 P, D. 2003. 1386, et les obs. image, note P. Ancel et M. Cottin image ; ibid. 2480, obs. T. Clay image ; Dr. soc. 2003. 890, obs. M. Keller image ; RTD civ. 2003. 294, obs. J. Mestre et B. Fages image ; ibid. 349, obs. R. Perrot image). Ainsi, la demande en justice non précédée de la mise en œuvre de la clause sera déclarée irrecevable. La force obligatoire du contrat s’impose au juge ; il n’a aucun pouvoir d’appréciation, même s’il ne dispose pas du pouvoir de relever d’office cette irrecevabilité, la fin de non-recevoir n’étant pas d’ordre public et ne concernant pas le défaut d’intérêt, le défaut de qualité ou la chose jugée (C. pr. civ., art. 125).

Il ne faut cependant pas occulter que derrière ce droit technique qu’est l’action en justice se dresse un droit fondamental : celui d’accéder à la justice. Ce droit-là est garanti au plus haut niveau, conventionnel (CEDH 21 févr. 1975, n° 4451/70, Golder c. Royaume-Uni) et constitutionnel (v. par ex. Cons. const. 27 juill. 2006, n° 2006-540 DC, D. 2006. 2157, chron. C. Castets-Renard image ; ibid. 2878, chron. X. Magnon image ; ibid. 2007. 1166, obs. V. Bernaud, L. Gay et C. Severino image ; RTD civ. 2006. 791, obs. T. Revet image ; ibid. 2007. 80, obs. R. Encinas de Munagorri imageconsid. 11). Les clauses de médiation et de conciliation ne sont pas en soi incompatibles avec le droit d’accès au juge : ce droit n’est pas absolu (par ex. CEDH, gr. ch., 18 févr. 1999, n° 28934/95, Beer et Regan c. Allemagne, § 49) et tolère des formes de renonciation (par ex. CEDH, gr. ch., 17 sept. 2009, n° 10249/03, AJDA 2010. 997, chron. J.-F. Flauss image ; D. 2010. 2732, obs. G. Roujou de Boubée, T. Garé et S. Mirabail image ; RSC 2010. 234, obs. J.-P. Marguénaud image; Scoppola c. Italie (n° 2), § 135). Il en résulte la possibilité pour un plaideur de renoncer temporairement à l’exercice de l’action par des clauses de suspension telles que les clauses de médiation ou de conciliation. La fermeture du droit au juge n’est, dans ce cas, même pas définitive (v. not. P. Ancel et M. Cottin, L’efficacité procédurale des clauses de conciliation ou de médiation, D. 2003. 1386 image, n° 5).

Cela étant, il n’est pas neutre de déclarer irrecevable la demande en justice d’un justiciable au seul motif qu’une clause imposant un préalable de médiation ou de conciliation n’a pas été respectée. La sanction est particulièrement énergique. Elle peut être invoquée en tout état de cause, même pour la première fois en appel (Com. 24 juin 2020, n° 18-15.249, D. 2020. 2484, obs. T. Clay image ; ibid. 2021. 718, obs. N. Ferrier image ; RTD civ. 2020. 869, obs. H. Barbier image), donc bien après le commencement du procès. La jurisprudence n’admet pas l’idée qu’en acceptant le débat sur le fond, le défendeur a renoncé à se prévaloir de cette fin de non-recevoir (pourtant suggérée par une doctrine autorisée, not. R. Perrot, Clause de conciliation préalable, RTD civ. 2003. 349 image). De surcroît, lorsque l’adversaire se prévaut de la fin de non-recevoir, le demandeur n’a pas d’échappatoire : la mise en œuvre de la clause de médiation ou de conciliation en cours d’instance ne régularise pas la situation puisque la clause imposait le préalable amiable avant la saisine du juge (Cass., ch. mixte, 12 déc. 2014, n° 13-19.684 P, Dalloz actualité, 6 janv. 2015, obs. M. Kebir ; D. 2015. 298, obs. C. de presse image, note C. Boillot image ; ibid. 287, obs. N. Fricero image ; RDI 2015. 177, obs. K. De la Asuncion Planes image ; AJCA 2015. 128, obs. K. de la Asuncion Planes image ; D. avocats 2015. 122, obs. N. Fricero image ; RTD civ. 2015. 131, obs. H. Barbier image ; ibid. 187, obs. P. Théry image). Or, et c’est là le risque, lorsqu’elle est prononcée, l’irrecevabilité prive la demande en justice de son effet interruptif de prescription (C. civ., art. 2243 ; Com. 26 janv. 2016, n° 14-17.952 P, Dalloz actualité, 15 fév. 2016, obs. F. Mélin; Cormier c/ Mandataires judiciaires associés, D. 2016. 310 image ; Civ. 2e, 21 mars 2019, n° 17-10.663 P, Dalloz actualité, 8 avr. 2019, obs. R. Laffly; D. 2019. 648 image). C’est dire que la sanction retenue, pour légitime qu’elle soit (L. Cadiet, L’effet processuel des clauses de médiation, RDC 2003. 182) peut conduire à une suppression totale du droit d’accès au juge !

En raison des dangers que la clause ainsi sanctionnée fait peser sur l’effectivité de ce droit fondamental, celle-ci doit faire l’objet d’une attention particulière. La jurisprudence veille, de manière générale, à ce que la clause témoigne d’une renonciation temporaire non équivoque à l’action, à défaut de quoi l’irrecevabilité serait une ingérence injustifiée dans le droit au juge. Pour reprendre les termes de l’arrêt de 2003, seule la « clause d’un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge » donne lieu à sanction. Encore faut-il déplorer les divergences jurisprudentielles concernant cette qualification. Quand la chambre commerciale exige de la clause qu’elle comporte des « conditions particulières de mise en œuvre » (Com., 29 avr. 2014, no 12-27.004 P, Medissimo (Sté) c/ CGI France (Sté), D. 2014. 1044 image ; ibid. 2541, obs. T. Clay image ; ibid. 2015. 287, obs. N. Fricero image ; AJCA 2014. 176, obs. N. Fricero image ; RTD civ. 2014. 655, obs. H. Barbier image), la troisième chambre civile ne définit pas de critère et s’en remet à l’appréciation souveraine des juges du fond (Civ. 3e, 19 mai 2016, no 15-14.464 P, Dalloz actualité, 3 juin 2016, obs. M. Kebir; D. 2016. 2377 image, note V. Mazeaud image ; ibid. 2589, obs. T. Clay image ; ibid. 2017. 375, obs. M. Mekki image ; ibid. 422, obs. N. Fricero image ; RTD civ. 2016. 621, obs. H. Barbier image). Le départ entre la clause purement indicative (se contentant « de prôner, de manière incantatoire, la recherche d’une solution amiable entre les parties », v. J. Mestre, « Clause de conciliation et de médiation », in F. Buy et al., Les principales clauses des contrats d’affaires, 2e éd., 2019, LGDJ, coll. « Les Intégrales », p. 139-149, spéc. n° 296, p. 146) et celle instituant une véritable procédure amiable préalable ne s’en trouve pas facilitée. Tout au plus la clause de médiation ou de conciliation imprécise ou ambiguë pourra-t-elle être requalifiée en clause de style et privée de sa force obligatoire (Civ. 3e, 11 juill. 2019, n° 18-13.460, D. 2020. 576, obs. N. Fricero image ; AJDI 2019. 919 image), sans que la prévisibilité des solutions soit assurée (sur l’analyse de la jurisprudence, v. not. L. Veyre, La clause de conciliation : un régime à perfectionner !, D. 2020. 1046 image ; V. Lasserre, Les effets des clauses de conciliation ou de médiation, JCP 2021. 271). De manière spécifique, la clause est neutralisée lorsque le droit au juge se fait prégnant (en cas d’urgence) ou lorsque la renonciation provisoire peut être présumée équivoque.

C’est à ce mouvement que pourrait être rattaché l’avis rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 14 juin 2022. En l’espèce, la Cour de cassation a été saisie d’une demande d’avis formée par la cour d’appel de Colmar ainsi formulée : « la convention instituant un préliminaire obligatoire de médiation s’impose-t-elle au juge du fond dès lors que les parties l’invoquent et doit-elle en conséquence entraîner l’irrecevabilité d’une demande formée sans que la procédure de médiation ait été mise en œuvre ? » La Cour de cassation répond par la négative en se fondant sur l’article L. 1411-1 du code du travail qui définit l’office du conseil de prud’hommes, lequel « règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu’ils emploient » et « juge les litiges lorsque la conciliation n’a pas abouti ». La chambre sociale en déduit « qu’en raison de l’existence en matière prud’homale d’une procédure de conciliation préliminaire et obligatoire, une clause du contrat de travail qui institue une procédure de médiation préalable en cas de litige survenant à l’occasion de ce contrat n’empêche pas les parties de saisir directement le juge prud’homal de leur différend ».

Cette réponse peut étonner dans la mesure où elle n’est pas parfaitement ajustée à la question. Alors que la question posée visait la saisine de tout juge du fond, la Cour de cassation s’appuie dans sa réponse sur la seule procédure prud’homale. Il est vrai que la compétence du conseil de prud’hommes a vocation à épuiser le champ des relations individuelles nouées entre l’employeur et le salarié à l’occasion du contrat de travail (C. trav., art. L. 1411-1). L’avis ne donne pas de précision sur le sort de la clause dans le cadre d’un litige qui ne serait pas soumis au conseil de prud’hommes (par exemple, en matière d’accidents du travail, v. Soc. 30 sept. 2010, n° 09-41.451 P, Dalloz actualité, 21 oct. 2010, obs. L. Perrin ; CPAM de Saint-Etienne c/ Chanut (Mme), D. 2010. 2372 image). La chambre sociale a déjà admis le jeu de la sanction de la clause de conciliation dans un litige opposant un syndicat et un employeur au titre de l’application d’une convention collective (Soc. 4 nov. 2020, n° 19-13.922).

Par ailleurs, le raisonnement présenté par la Cour est original. Les raisons invoquées par l’avis peuvent être discutées, ce qui laisse entrevoir d’autres interprétations du résultat pragmatique auquel il aboutit.

La raison invoquée par l’avis : une clause respectée dans la procédure prud’homale

Pour la chambre sociale, la procédure de conciliation préliminaire et obligatoire instaurée dans le procès prud’homal constituerait une sorte de mode d’exécution de la clause de médiation préalable. En d’autres termes, la saisine directe du juge prud’homal, qui a un office de conciliation, respecterait les prévisions de la clause.

Le même raisonnement avait été tenu à propos d’une clause de conciliation dans un arrêt de 2012 (Soc. 5 déc. 2012, n° 11-20.004 P, Dalloz actualité, 8 janv. 2013, obs. B. Ines; Médica France (Sté), D. 2012. 2969 image ; ibid. 2013. 114, chron. F. Ducloz, P. Flores, L. Pécaut-Rivolier, P. Bailly et E. Wurtz image ; ibid. 2936, obs. T. Clay image ; Just. & cass. 2013. 178, rapp. C. Corbel image ; ibid. 186, avis P. Lalande image ; Dr. soc. 2013. 178, obs. D. Boulmier image ; ibid. 576, chron. S. Tournaux image ; RDT 2013. 124, obs. E. Serverin image ; RTD civ. 2013. 171, obs. R. Perrot image). On lisait avant même cet arrêt dans la doctrine travailliste que « l’existence d’une phase obligatoire de conciliation dans la procédure prud’homale, autant que le caractère d’ordre public de la compétence de la juridiction paritaire, privent [la règle générale dégagée par l’arrêt de chambre mixte de 2003] de pertinence pour les litiges qui relèvent de cette compétence » (J. Pélissier et a., Les grands arrêts du droit du travail, 4e éd., Dalloz, 2008, p. 114).

L’avis sous commentaire réaffirme la solution et l’étend à la clause de médiation. Cette extension intervient dans un contexte renouvelé. Entre-temps les modes amiables se sont normalisés devant la juridiction prud’homale. La loi du 6 août 2015 a notamment abrogé l’article 24 de la loi du 8 février 1995 qui prévoyait que les dispositions relatives à la médiation « ne s’appliquent à la médiation conventionnelle intervenant dans les différends qui s’élèvent à l’occasion d’un contrat de travail que lorsque ces différends sont transfrontaliers ». Plusieurs auteurs pensaient que la solution de 2012 serait abandonnée (v. par ex. T. Lahalle, La baisse du contentieux prud’homal, JCP S 2018. 1386 ; A. Bugada, État des lieux des réformes de la justice prud’homale et questions d’actualités, JCP S 2016. 1283 ; sur le développement de la médiation, v. R. Chiss, Libres et brefs propos sur la médiation, JCP S 2019. 1165).

Surtout, il nous semble que, plus encore pour la clause de médiation que pour la clause de conciliation, le raisonnement de la Cour se fonde sur deux présupposés discutables. Il s’agit, d’une part, de l’idée d’équivalence entre une procédure de conciliation devant le conseil de prud’hommes et une médiation conventionnelle et, d’autre part, de l’idée de redondance que représenterait le cumul de ces deux procédures amiables.

Équivalence ?

D’une part, pour approuver pleinement le raisonnement de la Cour, il faudrait considérer qu’il existe une équivalence entre la procédure de conciliation judiciaire devant le conseil de prud’hommes et une médiation conventionnelle. Cela se discute à deux égards : concernant la distinction entre médiation et conciliation et concernant plus spécifiquement celle de la médiation conventionnelle et de la conciliation judiciaire par le juge.

D’abord, une médiation équivaut-elle à une conciliation ?

Concédons que la médiation et la conciliation peinent à être véritablement distinguées en raison d’un flou terminologique que le droit contemporain entretient toujours. De manière générale, dans le langage courant (qui peut servir de référence pour des parties qui stipulent une clause), la conciliation est un terme vague qui n’implique pas forcément l’intervention d’un tiers (la conciliation informelle entre les parties a toujours existé). La médiation implique, quant à elle, l’intervention d’un tiers médiateur, même dans le langage courant. De ce point de vue, les clauses de conciliation et de médiation sont d’une extrême diversité : elles peuvent ou non imposer la présence d’un tiers (W. Dross, Clausier. Dictionnaire des clauses ordinaires et extraordinaires des contrats de droit privé interne, v° Médiation, p. 483 s., spéc. p. 484). De manière plus spécifique, dans le livre V du code de procédure civile auquel renvoie le code du travail (C. trav., art. R. 1471-1), tant la conciliation conventionnelle que la médiation conventionnelle impliquent l’intervention d’un tiers. Toutefois, la définition est commune aux deux modes amiables, étant appréhendés tous deux comme une déclinaison de la notion européenne de médiation telle que définie par la directive européenne 2008/52/CE du 21 mai 2008 (C. pr. civ., art. 1530 : « La médiation et la conciliation conventionnelles régies par le présent titre s’entendent, en application des articles 21 et 21-2 de la loi du 8 février 1995 susmentionnée, de tout processus structuré, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord, en dehors de toute procédure judiciaire en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers choisi par elles qui accomplit sa mission avec impartialité, compétence et diligence »). La confusion résulte aussi du fait qu’historiquement, la médiation est née devant les prétoires dans le creuset de la conciliation. La Cour de cassation a jugé en 1993 que la médiation était une modalité de la conciliation par le juge (Civ. 2e, 16 juin 1993, n° 91-15.332 P).

Il n’en reste pas moins que la distinction existe, notamment depuis la loi du 8 février 1995 et le décret du 22 juillet 1996 qui ont institutionnalisé la médiation. La médiation implique que le tiers cherche à « confronter [les] points de vue » des parties et permettre à celles-ci « de trouver une solution » (C. pr. civ., art. 131-1), méthodologie que n’implique pas nécessairement la conciliation. À ce titre, Carbonnier qualifiait la médiation de « conciliation en plus moderne mais surtout en plus dynamique » (Droit civil, t. 1, 2e éd., 2017, PUF, n° 89). Par ailleurs, le conseil de prud’hommes qui exerce son office de conciliation peut ordonner une médiation, tant devant le bureau de conciliation et d’orientation que devant le bureau de jugement (C. trav., art. R. 1471-2), ce qui suggère bien que les deux modes amiables ne sont pas identiques.

Ensuite, une médiation conventionnelle équivaut-elle à une conciliation menée directement par le juge prud’homal ? On peut en douter, à deux titres.

Premièrement, le préliminaire de conciliation devant le conseil est partie intégrante d’une procédure judiciaire déjà introduite. Il fait suite au dépôt d’une requête, acte introductif d’instance (C. trav., art. R. 1452-1) et à la convocation du défendeur (C. trav., art. R. 1452-4). Les hostilités sont, pour ainsi dire, déjà engagées. L’esprit est très différent de celui qui anime une médiation ou une conciliation hors du prétoire, avant toute instance. En outre, le décalage existe également entre la conciliation judiciaire et l’intention contractuelle qui préside à l’insertion d’une clause de médiation ou de conciliation, lesquelles sont l’expression d’une conception du contrat « relationnalisé » renforçant la confiance entre contractants par la chance donnée au règlement déjudiciarisé (H. Kassoul, L’après-contrat, thèse, Y. Strickler (dir.), 2018, spéc. nos 367 et 388). Il est vrai cependant que le droit du travail n’est pas très réceptif à ce paradigme, étant précisé de surcroît que ce qui précède le procès en la matière est souvent réglementé (comme la procédure de licenciement) et peut rendre complexe la mise en œuvre d’une phase amiable (M. Keller, note ss Cass., ch. mixte, 14 févr. 2003, n° 00-19.423 P, D. 2003. 1386, et les obs. image, note P. Ancel et M. Cottin image ; ibid. 2480, obs. T. Clay image ; Dr. soc. 2003. 890, obs. M. Keller image ; RTD civ. 2003. 294, obs. J. Mestre et B. Fages image ; ibid. 349, obs. R. Perrot image ; Dr. soc. 2003. 890).

Deuxièmement, l’office des juges conciliateurs n’est pas dédié à la conciliation : ils concilient mais peuvent aussi prendre des mesures provisoires (C. trav., art. R. 1454-14). Les parties ne sont pas forcément présentes en personne puisqu’elles peuvent être représentées (C. trav., art. R. 1453-1). Par ailleurs, pour la Cour de cassation, les conseillers doivent vérifier que les parties sont informées de leurs droits respectifs à peine d’excès de pouvoir (Soc. 24 mai 2006, n° 04-45.877 P, RDT 2006. 192, obs. E. Serverin image). Cet office n’est pas celui d’un médiateur conventionnel. La divergence est d’autant plus forte que désormais, la pratique de la conciliation par le conseil de prud’hommes ménage une certaine place à la conciliation forfaitaire, selon un barème établi (C. trav., art. L. 1235-1 et D. 1235-21) qui n’a de conciliation que le nom. On ajoutera que dans les faits, la conciliation prud’homale remplit mal sa fonction de conciliation… Un rapport sénatorial (A. Canayer et a. [commission des affaires sociales et commission des lois], « La justice prud’homale au milieu du gué », rapport d’information n° 653, 10 juill. 2019) relevait que « les conditions de la conciliation prud’homale ne sont pas réunies » avec un taux d’affaires résolues par voie de conciliation « en moyenne de 8 % en 2018, variant de 0 à 26 % d’un CPH à l’autre ». Les rapporteurs relevaient, par contraste que « la conciliation est opérée en partie en dehors du CPH » et que « les conseillers prud’hommes ne disposent pas de formation spécifique à ce mode de règlement des différends » estimant – de manière insuffisamment renseignée – à 13 % en 2018 le taux de résolution amiable hors du conseil de prud’hommes.

Toutes ces raisons incitent à ne pas tenir pour équivalente une conciliation par le juge prud’homal et la mise en œuvre d’une clause de médiation préalable à toute instance.

Redondance ?

D’autre part, le raisonnement de la Cour présuppose que la mise en œuvre de la clause de médiation ferait double emploi avec la procédure de conciliation instaurée devant le conseil de prud’hommes. Il est vrai que la succession de préliminaires de conciliation ou de médiation ne favorise pas le délai raisonnable de jugement et peut s’avérer contre-productive (v. M. Keller, note ss Cass., ch. mixte, 14 févr. 2003, n° 00-19.423 P, préc.). Cette redondance était visée par la Cour de cassation elle-même dans un commentaire de l’arrêt du 5 décembre 2012 (Mensuel du droit du travail, n° 38, déc. 2012, p. 31-32). Ce présupposé n’emporte pas la conviction sur le plan purement juridique.

D’abord, de manière générale, la loi ne rechigne pas à imposer des formalités amiables conventionnelles avant une procédure judiciaire de conciliation. Il en va ainsi devant le tribunal judiciaire : la demande de tentative préalable de conciliation peut être subordonnée à la mise en œuvre d’un mode amiable conventionnel préalable (C. pr. civ., art. 750-1 et 827). Le droit du travail n’est pas épargné par cette logique. La loi a mis fin à l’inéligibilité de la matière prud’homale à la procédure participative. Une fois le litige né, les parties assistées de leurs avocats ont donc la possibilité de conclure une convention qui les oblige à négocier de bonne foi un accord (C. civ., art. 2062) sans pouvoir recourir au juge tant que cette convention est en vigueur (C. civ., art. 2065). Lorsque la procédure échoue, il n’est prévu aucune dispense de conciliation devant le conseil de prud’hommes, et ce alors qu’une telle dispense existe dans les autres matières (C. civ., art. 2066, al. 3). C’est dire que le législateur n’est pas opposé à une succession de phases conciliatoires dans le contentieux du travail. Le cumul étant toléré par le législateur, on aurait pu penser qu’il devait l’être a fortiori lorsque les parties sont convenues de s’imposer ce préalable supplémentaire.

Ensuite, de manière plus particulière, toute affaire soumise au conseil de prud’hommes n’implique pas la saisine du bureau de conciliation et d’orientation. Spécialement, lorsque l’affaire a trait à la requalification en contrat de travail à durée indéterminée d’un contrat de travail à durée déterminée (C. trav., art. L. 1245-41) ou d’une mission d’intérim (C. trav., art. 1251-41) ou à la requalification d’une prise d’acte de la rupture (C. trav., art. L. 1451-1), c’est directement le bureau de jugement qui est saisi. Faudrait-il en conclure que la clause devrait être exécutée lorsque de telles demandes sont formulées ? Le doute est permis, car en théorie, même les bureaux de jugement ont mission de concilier : le texte cité à l’appui de l’avis est relatif à la mission de conciliation du conseil de prud’hommes lui-même (qui dérive de l’office général de conciliation du juge, v. C. pr. civ., art. 21). Il n’en demeure pas moins que cette conciliation est laissée à la discrétion du bureau de jugement. Il ne s’agit pas, dans cette hypothèse, d’une « procédure de conciliation préliminaire et obligatoire » telle que visée dans l’avis pour justifier la solution (v. déjà A. Bugada, « Inopposabilité de la clause de conciliation préalable insérée au contrat de travail », Procédures 2013, n° 106).

En cet état, il est difficile de souscrire à l’analyse qui voudrait que la clause de médiation préalable soit satisfaite par la saisine du juge.

Le résultat énoncé par l’avis : une clause n’empêchant pas la saisine directe du juge

L’avis énonce qu’« une clause du contrat de travail qui institue une procédure de médiation préalable en cas de litige survenant à l’occasion de ce contrat n’empêche pas les parties de saisir directement le juge prud’homal de leur différend ». La justification invoquée, suivant laquelle une telle clause est réputée satisfaite avec l’introduction de l’instance prud’homale n’emportant pas l’adhésion, il convient de considérer plutôt que la solution neutralise la sanction procédurale de la clause de médiation dans un contexte où elle aurait pu avoir vocation à jouer. Cette orientation est d’autant plus fondée que le contentieux du contrat de travail relève en grande majorité du conseil de prud’hommes. Quelles raisons justifient une telle neutralisation ? La thèse de l’illicéité de la clause doit être écartée : la Cour ne répute pas non écrite la clause. Celle-ci étant simplement privée de sa sanction procédurale, elle apparaît plus vraisemblablement comme frappée d’inopposabilité dans le contrat de travail.

Licéité

Le droit au juge revêt une importance singulière dans la relation de travail. S’il en va ainsi, ce n’est pas tant parce que le contrat de travail intéresse l’ordre public (ce qui n’a jamais été un obstacle à la mise en place d’un mode amiable, v. v. not. X. Lagarde, « Esquisse d’un régime juridique des clauses de conciliation », RDC 2003, n° RDCO2003-1-051, p. 189) mais plutôt parce qu’il est un contrat d’adhésion (même si la définition légale du contrat d’adhésion rebat les cartes, v. G. Loiseau et A. Martinon, Le contrat de travail est-il (encore) un contrat d’adhésion ?, Cah. soc. janv. 2018, n° 122f0, p. 3). Cette configuration contractuelle fait présumer l’équivoque dans la renonciation temporaire au droit au juge (not. J. Icard, Le juge et les modes conventionnels de règlement des litiges du travail, Dr. soc. 2017. 33 image, spéc. I A 1 ; D. Boulmier, Contentieux individuels de travail et conciliation/médiation : état des lieux (dégradé !), Dr. soc. 2012. 121 image ; Clause contractuelle de conciliation préalable à la saisine du juge, Dr. soc. 2013. 178 image).

Dans certains contrats d’adhésion, la clause de médiation ou de conciliation préalable est frappée d’illicéité. Ainsi en va-t-il dans les contrats de consommation. Depuis la transposition de la directive n° 2013/11/UE du 21 mai 2013 par l’ordonnance n° 2015-1033 du 20 août 2015 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation, « est interdite toute clause ou convention obligeant le consommateur, en cas de litige, à recourir obligatoirement à une médiation préalablement à la saisine du juge » (C. consom., art. L. 612-4). Quant aux clauses rédigées antérieurement à l’entrée en vigueur de ce texte, elles sont présumées abusives en ce qu’elles sont susceptibles de « supprimer ou entraver l’exercice d’actions en justice ou des voies de recours par le consommateur » (C. consom., art. R. 212-2, 10°). La Cour de cassation le juge de manière constante (Civ. 1re, 16 mai 2018, n° 17-16.197, D. 2019. 607, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud image; Civ. 3e, 19 janv. 2022, n° 21-11.095, Dalloz actualité, 15 fév. 2022, obs. F. Garcia ; D. 2022. 928 image, note J.-D. Pellier image ; ibid. 625, obs. N. Fricero image ; AJDI 2022. 321, point de vue F. de La Vaissière image ; Rev. prat. rec. 2022. 25, chron. B. Gorchs-Gelzer image) même si l’on peut regretter l’« empilement normatif qui obscurcit le régime applicable à ce type de clauses » (H. Kassoul, Clause de conciliation préalable et droit de la consommation : espérons une clarification, LEDC mars 2022, n° DCO200r8 ; adde J.-D. Pellier, Retour sur la clause de conciliation préalable dans les rapports de consommation, D. 2022. 928 image) dans la mesure où l’ancien régime tolère la preuve contraire tandis que le régime nouveau interdit purement la clause. Il n’en reste pas moins que l’objectif est clairement celui de la neutralisation des clauses de médiation et de conciliation préalable dans le contrat de consommation en tant qu’elles créent une contrainte sur le consommateur. Une clause s’imposant au professionnel ne serait pas éradiquée.

Le contrat de travail se rapproche du contrat de consommation. Comme le consommateur, le salarié est une partie faible. Le dispositif de lutte contre les clauses abusives prévu à l’article 1171 du code civil peine à se développer en droit du travail (encore qu’il ne soit pas exclu, v. E. Dockès, G. Auzero et D. Baugard, Droit du travail, 35e éd., 2021, Dalloz, coll. « Précis », n° 680, p. 883 ; sur l’idée de soumettre les clauses de conciliation à ce dispositif, v. A. Bugada, « Sept incitations à la médiation en droit du travail », in A. Leborgne [dir.], La médiation civile : alternative ou étape du procès, PUAM, 2018, p. 193 s., spéc. p. 200). Le code du travail comporte d’ailleurs une disposition précisant que « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché » (C. trav., art. L. 1121-1). La « liberté fondamentale d’agir en justice » est bien évidemment protégée à ce titre, comme en atteste la jurisprudence relative à la nullité des mesures de licenciement intervenues en rétorsion à l’exercice d’une action en justice par le salarié (v. Soc. 21 sept. 2016, n° 15-10.263 ; 9 oct. 2019, n°17-24.773 P, D. 2019. 1998 image ; RDT 2019. 801, obs. F. Guiomard image ; 4 nov. 2020, n° 19-12.367 P, Dalloz actualité, déc. 2020, obs. C. Couëdel ; D. 2020. 2175 image ; ibid. 2021. 1152, obs. S. Vernac et Y. Ferkane image ; Dr. soc. 2020. 1046, obs. J. Mouly image) de même que les textes qui défendent la compétence d’ordre public du conseil de prud’hommes (interdiction de la clause attributive de compétence [C. trav., art. L. 1411-4 et L. 1221-5]). Cette disposition pourrait donc fonder un principe d’interdiction de la clause de médiation ou de conciliation préalable en ce qu’elle complexifie l’accès à la justice pour le salarié, dans le même esprit que la législation consumériste.

Ce n’est pourtant pas dans cette voie que s’engage l’avis commenté. Plusieurs arrêts pouvaient pourtant être interprétés comme une forme de neutralisation sans nuance de la clause de conciliation lorsque celle-ci était insérée dans une convention collective. La Cour de cassation a jugé que « la tentative de conciliation prévue par la convention collective ne saurait faire échec aux règles de droit commun ni constituer un préliminaire de conciliation » (Soc. 8 déc. 1965 P, D. 1966. Somm. 48) puis que « les juges du fond ont estimé à juste titre que l’obligation faite aux parties par l’article 105 de la convention collective du notariat de saisir l’organisme paritaire de conciliation créé par celle-ci ne pouvait priver X… du droit de porter de façon immédiate devant la juridiction prud’homale le litige l’opposant à son employeur à l’occasion du contrat de travail, conformément à l’article 81 du décret n° 58-1292 du 22 décembre 1958 » (Soc. 18 juin 1970, n° 69-40.331 P). Cette jurisprudence s’est maintenue (Soc. 26 janv. 1994, n° 91-40.464 P : « la création d’organismes conventionnels chargés de régler les différends nés à l’occasion du contrat de travail, ou même de procéder à la conciliation des parties, ne saurait faire obstacle à la saisine directe de la juridiction prud’homale par les intéressés » ; Soc. 6 févr. 2001, n° 98-42.679).

La doctrine rattache encore parfois ces solutions à la compétence d’ordre public et exclusive du conseil de prud’hommes (v. not. E. Dockès, G. Auzero et D. Baugard, op. cit., n° 113). Il s’agit d’éviter toute concurrence entre la justice prud’homale et des systèmes de justice privée qui peuvent se développer en prenant appui sur le terreau de la médiation préalable (T. Grumbach et E. Séverin, Dans l’air du temps de la marchandisation de la justice : la mise en concurrence du juge prud’homal avec les services de justice privée, in Faut-il renforcer les modes alternatifs de résolution des litiges entre employeurs et salariés ?, RDT 2010. 205 image). Pourtant, dans la pureté des principes, si les règles de compétence permettent de déterminer devant quelle juridiction l’action doit être exercée, elles n’ont pas vocation à faire obstacle à la conclusion d’actes juridiques relatifs à l’action (sauf à interdire tout accord et donc toute transaction en droit du travail). On comprend ainsi pourquoi l’argumentation de la chambre sociale a évolué et n’est pas identique selon qu’elle neutralise la clause compromissoire (qui pose un problème de répartition des compétences entre le juge étatique et l’arbitre) ou la clause de conciliation ou de médiation (v. ainsi, RDC 2013. 1010, obs. C. Pelletier). Cela présuppose la validité de la clause (Gaz. Pal. 9 mars 2013, n° 121w3, obs. S. Amrani-Mekki).

L’avis commenté révèle que la chambre sociale n’a toujours pas entendu rompre avec le principe de licéité de la clause de médiation ou de conciliation en droit du travail. Il faut l’en approuver : ce qui pose un problème est moins la clause en elle-même que la sanction – potentiellement violente – qui lui est attachée en cas de violation.

Inopposabilité

Dès lors que l’on admet que la clause n’est pas satisfaite par la saisine directe du juge prud’homal et qu’elle n’est pas non plus tenue pour illicite, on est conduit à considérer que le résultat pragmatique de l’avis est de priver de sanction procédurale la clause de médiation. Il s’agit d’une forme de neutralisation entendue comme la « privation d’effets qui fait qu’un acte non annulé est cependant inopposable » (G. Cornu [dir.], Vocabulaire juridique, v° Neutralisation, 14e éd., PUF, coll. « Quadrige », 2022). On peut donc suggérer l’idée d’inopposabilité de la clause de médiation (v. déjà, en ce sens, A. Bugada, Inopposabilité de la clause de conciliation préalable insérée au contrat de travail, Procédures 2013, n° 106 ; RDC 2013, n° RDCO2013-3-036, p. 1010, obs. C. Pelletier). L’inopposabilité est classiquement une sanction par laquelle un tiers se retrouve fondé à ignorer un acte, mais dans un sens large, l’inopposabilité peut aussi concerner les parties. L’adjectif inopposable « se dit relativement à une personne, d’un acte ou d’un droit dont cette personne est fondée à ignorer ou à faire écarter les effets » (G. Cornu [dir.], Vocabulaire juridique, v° Inopposable). C’est par exemple en ce sens que l’article 2061 du code civil précise à propos de la clause compromissoire que « lorsque l’une des parties n’a pas contracté dans le cadre de son activité professionnelle, la clause ne peut lui être opposée ». La sanction traduit en réalité l’inefficacité d’une clause qui n’est pas nulle (G. François, L’inefficacité des clauses de conciliation précontentieuse insérées dans le contrat de travail, JCP E 2013. 1127 ; T. Clay, L’arbitrage des conflits du travail, BJT févr. 2019, n° 111d6, p. 35).

D’abord, l’inopposabilité de la clause apparaît être une solution opportune. Elle l’est au regard du contexte contractuel, qui fait douter de la réalité de la volonté non équivoque du salarié de consentir à suspendre son droit d’action en cas de litige. Elle l’est au regard du contexte processuel. En droit du travail, une fin de non-recevoir peut avoir des effets dévastateurs tant les délais de prescription sont réduits et les délais de jugement longs. La sanction est donc ici menaçante pour le droit au juge. Surtout, l’inopposabilité est une sanction équilibrée du point de vue de la politique des modes amiables : elle ne dissuade pas les parties d’insérer la clause ni d’envisager volontairement la médiation avant tout procès. Il ne s’agit pas d’un frein porté au développement des modes amiables en la matière mais d’une limite apportée à leur développement à marche forcée. Comme l’avait écrit Perrot, il y a là un « solide bon sens » (R. Perrot, Clause de conciliation préalable : sa portée en matière prud’homale, RTD civ. 2013. 171 image).

Ensuite, l’inopposabilité ouvre des perspectives. La formulation de la chambre sociale laisse penser que tant le salarié que l’employeur ont la possibilité de saisir le juge en dépit de la clause. Mais l’inopposabilité tolère une application distributive. Or, en opportunité, on peut se demander si la clause ne devrait pas être déclarée opposable à l’employeur qui est supposé la partie forte au contrat. De fait, à l’analyse, la jurisprudence se révèle moins récalcitrante à donner effet à des clauses de préalable amiable lorsque celles-ci ont vocation à bénéficier au salarié. Il en va ainsi de la charte du football professionnel, ayant valeur de convention collective, qui prévoit que lorsque l’employeur envisage la rupture du contrat de travail d’un éducateur professionnel en raison d’un manquement de ce dernier à ses obligations, le litige doit être porté devant la commission juridique qui convoque immédiatement les parties et tente de les concilier. Le non-respect de cette clause par l’employeur n’est pas neutre puisque la Cour de cassation y voit une « garantie de fond » pour le salarié qui rend irrégulière la rupture du contrat de travail (Soc. 26 sept. 2012, n° 11-18.783P, Dalloz actualité, 16 oct. 2012, obs. C. Fleuriot ; D. 2013. 527, obs. Centre de droit et d’économie du sport image ; RDT 2012. 694, obs. F. Mandin image ; v. aussi, sur le domaine d’application, 29 janv. 2020, n° 17-20.163 P, Dalloz actualité, 25 fév. 2020, obs. L. de Montvalon ; D. 2020. 287 image ; ibid. 2021. 388, obs. Centre de droit et d’économie du sport (OMIJ-CDES) image ; Dr. soc. 2020. 278, obs. J. Mouly image).

  1338 lectures

La neutralisation des clauses de médiation préalable dans le contrat de travail

En raison de l’existence en matière prud’homale d’une procédure de conciliation préliminaire et obligatoire, une clause du contrat de travail qui institue une procédure de médiation préalable en cas de litige survenant à l’occasion de ce contrat n’empêche pas les parties de saisir directement le juge prud’homal de leur différend.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  989 lectures

Nouveau statut de l’entrepreneur individuel : au tour de la fiscalité

Un décret du 27 juin 2022 précise les conditions dans lesquelles les entrepreneurs individuels soumis au nouveau statut institué par la loi du 14 février 2022 peuvent formuler l’option pour l’impôt sur les sociétés, qui leur est ouverte par la loi de finances pour 2022. Il prévoit en outre les modalités de renonciation à cette option.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1146 lectures

Marché, contrat de concession et juge du référé contractuel

Dans un arrêt en date du 22 juin 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation est venue préciser que le candidat évincé d’un appel d’offres pour un contrat de concession ne peut pas saisir le juge du référé contractuel, mais est libre d’utiliser les voies de droit commun.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1020 lectures

Marché, contrat de concession et juge du référé contractuel

Dans un arrêt en date du 22 juin 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation est venue préciser que le candidat évincé d’un appel d’offres pour un contrat de concession ne peut pas saisir le juge du référé contractuel, mais est libre d’utiliser les voies de droit commun.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1348 lectures

Pas d’exclusion du statut de réfugié en cas de crime commis dans un but politique

Précisant le b) du F de l’article 1er de la convention de Genève, le Conseil d’État juge qu’un demandeur d’asile ne peut être exclu du statut de réfugié lorsqu’un crime grave a été commis dans un but principalement politique.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  960 lectures

La nullité d’un acte de procédure et son appréciation

Dans un arrêt rendu le 9 juin 2022, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation précise les modalités d’appréciation de la nullité des actes de procédure. Dans les faits, la société Victor Heinrich a commandé à la société Dam, l’étude et la réalisation d’un moule permettant la fabrication en série de lampadaires avec réflecteurs aluminisés. La société Dam a alors fait appel à trois sous-traitants. Finalement, la production de pièces conformes à la commande n’a pas été possible et la société Victor Heinrich n’a pas été en mesure d’honorer ses commandes. Des expertises judiciaires ont été ordonnées, et une seconde société, la société Heinrich Éclairage est intervenue volontairement à l’instance. C’est alors que la société Dam, deux de ses sous-traitants et leurs assureurs respectifs ont été assignés en responsabilité par… la société Victor Heinrich Éclairage. Les défendeurs soulèvent une exception de nullité entachant les assignations délivrées au nom d’une société qui n’est ni la société Victor Heinrich, ni la société Heinrich Éclairage. Le juge de la mise en état rejette cette exception de procédure. Appel est interjeté et la cour d’appel déclare toutes les assignations délivrées par la société Victor Heinrich Éclairage nulles pour irrégularité de fond en raison de l’inexistence légale de la société Victor Heinrich Éclairage. La société Heinrich Éclairage forme un pourvoi en cassation. Elle prétend que la régularité des assignations devait être appréciée au jour de leur délivrance, sans pouvoir s’appuyer sur des écritures ultérieures. En outre, elle reproche à la cour d’appel de s’être fondée sur les moyens soulevés en première instance, violant le principe selon lequel, la cour d’appel statue exclusivement au vu des prétentions et des moyens énoncés dans les dernières conclusions d’appel des parties. La deuxième chambre civile devait alors se prononcer sur les modalités d’appréciation de la nullité des actes de procédure. Elle affirme que « Si la nullité d’un acte de procédure doit être appréciée à la date de ce dernier, cette appréciation peut se fonder sur des éléments de preuve extérieurs à cet acte » (§ 10). La formule d’apparence limpide ne se comprend pleinement qu’à la lumière du régime des nullités.

L’incident rappel de la dichotomie des nullités des actes de procédure
Quand aucune personne morale n’existe sous une raison sociale, c’est qu’il s’agit soit d’une erreur de dénomination, soit d’un problème d’existence de ladite personne. En l’espèce, la première hypothèse semblait acquise, mais c’est pourtant l’irrégularité de fond que les juges ont retenu.

La mise à l’écart de l’apparente erreur de dénomination

Cette espèce impliquant deux sociétés ayant des noms commerciaux proches (Victor Heinrich et Heinrich Éclairage), il semblait évident que l’assignation délivrée par la société Victor Heinrich Éclairage résultait d’une erreur de dénomination. Or, la Cour de cassation a déjà eu l’occasion de préciser que l’erreur de dénomination « ne constitue qu’un vice de forme, lequel ne peut entrainer la nullité́ de l’acte que sur justification d’un grief » (Civ. 2e, 4 févr. 2021, n° 20-10.685, Dalloz actualité, 22 févr. 2021, obs. Maugain ; D. 2021. 543, obs. N. Fricero image ; Rev. prat. rec. 2021. 7, chron. D. Cholet, O. Cousin, E. Jullien et R. Laher image, de l’erreur relative à la dénomination d’une partie dans un acte de procédure). C’est sans doute faute de grief que le juge de la mise en état a rejeté l’exception de nullité. Quant à la cour d’appel qui infirme la décision de première instance, elle ne nie pas l’existence d’une dénomination erronée. Seulement, l’arrêt retient que « cette assignation n’est pas seulement affectée d’un seul vice de forme ».

La retenue de l’inexistence de la personne morale distincte

Ce n’est pas la même chose d’être mal dénommé et de ne pas être. Une personne juridique qui n’existe pas, ou plus, n’a pas la capacité d’agir en justice. C’est une irrégularité de fond qui affecte la validité de ses actes (C. pr. civ., art. 117). En l’espèce, la cour d’appel a pu constater qu’au-delà de la maladresse rédactionnelle affectant l’assignation, la société Victor Heinrich et la société Heinrich Éclairage avaient adopté, dans leurs conclusions de première instance, des positions procédurales qui ne laissaient aucun doute quant au fait que ni l’une ni l’autre n’était la société à l’origine des assignations. La première d’entre elles y est présentée comme demanderesse principale, comme si elle était venue aux droits de la société Victor Heinrich Éclairage. La seconde, intervenue volontairement, y allègue explicitement agir distinctement de la société Victor Heinrich Éclairage. Il est alors évident que « l’assignation, selon la propre présentation des intéressées, a été délivrée au nom d’une société distincte ». Mais cette dernière n’existe pas. Les assignations sont donc frappées de nullité pour irrégularité de fond. Cette nullité qui ne nécessite pas la démonstration d’un grief et sanctionne plus sûrement des parties qui ont fait preuve de négligence.

Qu’à cela ne tienne. La société Heinrich Éclairage, demanderesse au pourvoi, va alors s’appuyer sur le droit de la preuve pour tenter de faire échec à la nullité des assignations.

La précision des modalités d’appréciation de la nullité d’un acte de procédure
Devant l’évidence de l’irrégularité de fond, la société Heinrich Éclairage – qui ne soulève le vice de forme qu’à titre subsidiaire – s’appuie sur un principe jurisprudentiel bien établi pour lier le moment où doit être appréciée la nullité d’un acte de procédure et la date des éléments de preuve qui peuvent être utilisés. La Cour de cassation balaie l’amalgame dans une réponse qui doit être précisée.

La distinction entre moment et fondements de l’appréciation de la nullité d’un acte de procédure

L’article 121 du code de procédure civile prévoit que la nullité pour irrégularité de fond « ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue », à condition que la nullité soit susceptible d’être couverte. Or la Cour de cassation énonce depuis longtemps que le défaut de capacité dû au défaut d’existence ne peut être régularisé. Ainsi n’est pas régularisable l’assignation délivrée par une société en participation (Civ. 2e, 26 mars 1997, n° 94-15.528), par une société en formation (Com. 30 nov. 1999, n° 97-14.595, Progressif (Sté) c/ Ugo (Sté), D. 2000. 627 image, note E. Lamazerolles image ; ibid. 37, obs. M. B. image ; Rev. sociétés 2000. 512, note M. Beaubrun image ; RTD com. 2000. 368, obs. C. Champaud et D. Danet image ; et Civ. 2e, 4 mars 2021, n° 19-22.829, Dalloz actualité, 17 mars 2021, obs. G. Maugain ; Rev. sociétés 2022. 180, note V. Thomas image) ou encore par une société ayant disparu dans une fusion-absorption (Civ. 2e, 27 sept. 2012, n° 11-22.278, Rev. sociétés 2013. 30, obs. S. Prévost image0). Partant de là, la demanderesse au pourvoi affirme que les conditions de validité de fond d’une assignation non susceptible de régularisation doivent être appréciée au jour de sa délivrance et non au vu des écritures ultérieures. Mais ce raccourci n’a pas trompé la Cour de cassation. Si la nullité d’un acte de procédure insusceptible de régularisation doit être appréciée à la date de ce dernier, la date des éléments de preuve sur lesquels fonder cette appréciation n’a en revanche aucune importance. Ce qui importe c’est que ces éléments prouvent la nullité ou non existant à la date de l’appréciation de la validité de l’acte. En l’espèce, les conclusions de première instance, reprises en partie par les dernières conclusions d’appel de la société Heinrich Éclairage – le principe énoncé à l’article 954 était sauf – prouvaient qu’au moment de l’assignation, la société Victor Heinrich Éclairage était une société distincte, dépourvue d’existence. La non reprise par la Cour de cassation de l’adjectif « ultérieurs » montre sa volonté de se départir d’une appréciation temporelle des éléments de preuve. En lui préférant l’adjectif « extérieurs », elle insiste sur la distinction entre moment et fondements de l’appréciation de la nullité de l’acte de procédure.

De la distinction à la dissociation

Cette distinction est-elle suffisante ? Une lecture un peu rapide du paragraphe 10 pourrait laisser penser qu’il existe toutefois une corrélation entre les deux. Le caractère automatique de l’appréciation de la nullité d’un acte de procédure à la date de ce dernier entraine la faculté de se fonder sur des éléments de preuve extérieurs à ce acte. Il n’en est rien. Tout d’abord, la nullité d’un acte de procédure ne s’apprécie pas toujours à la date de ce dernier. L’article 121 du code de procédure civile énonce que « la nullité [tenant à une irrégularité de fond] ne sera pas prononcée que si sa cause a disparu au moment où le juge statue ». Ainsi, pour toutes les nullités fondées sur des irrégularité de fond autre que l’inexistence, c’est au moment où le juge statue qu’il faut se placer. Pour l nullités pour vice de forme, elle doit être appréciée soit à la date de la forclusion, soit à la date où le juge statue (C. pr. civ., art. 115). Dans tous les cas, l’appréciation de la nullité de l’acte de procédure peut se fonder sur des éléments de preuve extérieurs à cet acte. Par exemple, un jugement peut permettre d’apprécier la validité d’un acte de procédure du point de vue du pouvoir ad agendum du représentant de la partie. Moment et fondements de l’appréciation de la nullité de l’acte de procédure doivent être dissociés. La réponse de la Cour de cassation doit être comprise de la manière suivante : même dans l’hypothèse où la nullité d’un acte de procédure doit être appréciée à la date de ce dernier, cela n’empêche pas que cette appréciation puisse se fonder sur des éléments de preuve extérieurs à cet acte.

  1288 lectures

Valeur probante de la légalisation d’un acte d’état civil étranger

La force probante d’un acte d’état civil étranger légalisé peut être contestée. À l’inverse, un acte non légalisé peut être pris en compte par l’administration et le juge s’il présente des garanties suffisantes d’authenticité.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  992 lectures

Plans communaux de sauvegarde : le dépoussiérage continue

Si les ravages provoqués en 2010 par la tempête Xynthia sur la petite commune de La Faute-sur-Mer avaient suscité l’émotion générale et déclenché toute une épopée contentieuse, il aura fallu attendre le décret n° 2022-907 du 20 juin 2022, pris en application de la loi Matras, pour que les plans communaux de sauvegarde (PCS), destinés à prévenir ce type de catastrophe, trouvent une nouvelle vigueur à travers le cadre posé par les articles L. 731-3 et L. 731-4 du code de la sécurité intérieure (CSI).

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1068 lectures

Encadrement des loyers : c’est au tour de Bordeaux !

Un arrêté préfectoral du 20 juin 2022 complète le dispositif d’encadrement préfectoral des loyers d’habitation sur le territoire de la commune de Bordeaux.

Sur la boutique Dalloz

en lire plus

  1058 lectures

Préjudice financier et compétence dans l’Union européenne

La Cour de cassation se penche sur la détermination du juge compétent en cas de virement d’une somme sur un compte bancaire étranger, suite à une manœuvre d’un tiers.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1155 lectures

Préjudice financier et compétence dans l’Union européenne

Le règlement Bruxelles I bis, n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, énonce que les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont en principe attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre (art. 4, § 1).

Toutefois, en matière délictuelle, une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite dans un autre État membre devant la juridiction du lieu où le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire (art. 7, § 2).

Ce principe donne lieu à une jurisprudence abondante. La Cour de justice a, notamment, été appelée à se prononcer en cas de préjudice financier. Elle a alors jugé que les juridictions du domicile du demandeur sont compétentes, au titre de la matérialisation du dommage, pour connaître d’une telle action, notamment lorsque ce dommage se réalise directement sur un compte bancaire de ce demandeur auprès d’une banque établie dans le ressort de ces juridictions. Toutefois, ce critère ne saurait être, à lui seul, qualifié de « point de rattachement pertinent » (CJUE 28 janv. 2015, aff. C-375/13, Dalloz actualité, 19 févr. 2015, obs. F. Mélin  Kolassa c/ Barclays Bank plc (Sté), D. 2015. 770 image, note L. d’Avout image ; ibid. 1056, obs. H. Gaudemet-Tallon et F. Jault-Seseke image ; ibid. 2031, obs. L. d’Avout et S. Bollée image ; Rev. crit. DIP 2015. 921, note O. Boskovic image ; RTD eur. 2015. 374, obs. E. Guinchard image). C’est uniquement dans la situation où les autres circonstances particulières de l’affaire concourent également à attribuer la compétence à la juridiction du lieu de matérialisation d’un préjudice purement financier qu’un tel préjudice pourrait, d’une manière justifiée, permettre au demandeur d’introduire l’action devant cette juridiction (CJUE 16 juin 2016, aff. C-12/15, Dalloz actualité, 6 juil. 2016, obs. F. Mélin ; D. 2016....

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :

image

  1085 lectures

Pas d’héritiers pour les gamètes conservés

L’affaire est connue. Un jeune homme décède le 13 janvier 2017, à l’âge de 23 ans, des suites d’un cancer. Il avait procédé au dépôt de ses gamètes auprès du centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS) de l’hôpital, établissement relevant de l’Assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP). Sa mère avait alors saisi la juridiction administrative pour obtenir l’exportation des gamètes vers un établissement de santé situé en Israël. Cette requête, fondée sur une atteinte au droit au respect de la vie privée, a été rejetée tant par le juge des référés du tribunal administratif de Paris par ordonnance du 2 novembre 2018 que, suite à un recours contre cette décision, par une ordonnance du juge des référés du Conseil d’État rendu le 4 décembre 2018.

La requérante avait alors porté le litige devant la Cour européenne des droits de l’homme, arguant d’une violation de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Par décision du 12 novembre 2019 (n° 23038/19, §§ 16 et 20, Petithory Lanzmann (Mme) c/ France, AJDA 2020. 1096 image ; AJ fam. 2020. 9, obs. A. Dionisi-Peyrusse image ; RTD civ. 2020. 332, obs. J.-P. Marguénaud image), la Cour a déclaré la requête irrecevable aux motifs d’une part que « le sort des gamètes déposés par un individu et la question du respect de sa volonté qu’elles soient mises en œuvre après sa mort concernent le droit d’un individu de décider de quelle manière et à quel moment il souhaite devenir parent qui relève de la catégorie des droits non transférables, d’autre part, que le champ d’application de l’article 8 de la Convention ne comprend pas le droit de fonder une famille et ne saurait englober, en l’état de sa jurisprudence, le droit à une descendance pour des grands-parents.

La mère s’est alors tournée devant les juridictions judiciaires devant lesquelles elle a de nouveau assigné l’AP-HP le 22 janvier 2020 afin de se voir restituer les gamètes de son fils. L’AP-HP, quant à elle, a soulevé une exception d’incompétence au profit de la juridiction administrative.

La cour d’appel de Paris, par un arrêt du 6 avril 2021, a rejeté sa demande aux motifs, en substance, que les conditions de conservation des gamètes sont régies par l’article R. 2141-18 du code de la santé publique qui prévoit leur destruction par l’administration en cas de décès de la personne, la possibilité d’un don étant réservé à la décision du déposant exprimée dans les formes requises par ce même texte, le litige relevait de la compétence des juridictions administratives. La mère s’est alors pourvue en cassation. Au soutien de son pourvoi, elle présentait un moyen unique composé de trois branches dont l’argumentaire peut être résumé comme suit : les gamètes constituant un bien au sens de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne, l’AP-HP a commis une voie de fait en refusant de remettre à l’héritière du déposant décédé les gamètes conservés afin qu’ils puissent être utilisés conformément à la volonté exprimée de son vivant par le déposant. Cette voie de fait résultant donc d’une décision prise par l’administration et portant atteinte à la liberté individuelle, le juge judiciaire est compétent.

La première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 15 juin 2022, rejette le pourvoi rappelant que « dès lors que des gamètes humains ne constituent pas des biens au sens de l’article 1er du protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, eu égard à la portée économique et patrimoniale attachée à ce texte (CEDH, gr. ch., 27 août 2015, n° 46470/11, 6215, Dalloz actualité, 22 sept. 2015, obs. Nicolas Nalepa ; ibid. 9 juill. 2014, obs. N. Nalepa ; D. 2015. 1700, et les obs. image ; ibid. 2016. 752, obs. J.-C. Galloux et H. Gaumont-Prat image ; ibid. 1779, obs. L. Neyret et N. Reboul-Maupin image ; AJ fam. 2015. 433, obs. A. Dionisi-Peyrusse image ; RTD civ. 2015. 830, obs. J.-P. Marguénaud image ; ibid. 2016. 76, obs. J. Hauser image), que seule la personne peut en disposer et que la liberté de procréer n’entre pas dans le champ de la liberté individuelle au sens de l’article 66 de la Constitution, c’est à bon droit et sans être tenue de procéder à une recherche inopérante que la cour d’appel, faisant application de l’article R. 2141-18 du code de la santé publique, a retenu que le refus opposé par l’AP-HP à la restitution des gamètes se rattachait à ses prérogatives, écarté l’existence d’une voie de fait et déduit que la juridiction judiciaire était incompétente pour connaître du litige ».

La motivation de la Cour de cassation qui exclut les gamètes de la catégorie des biens, ne surprend pas eu égard aux principes assurant en droit français la protection du corps humain et, en particulier, au principe d’extra-patrimonialité. La Cour résiste ainsi à une argumentation qui a su convaincre d’autres juridictions, à l’étranger.

Les gamètes exclues de la catégorie des biens

Entre être et avoir, le corps est au cœur d’importantes questions juridiques dont l’actualité ne s’éteint pas, entretenue par la valeur économique croissante du corps humain, de ses éléments et de ses produits. Le corps, s’il est le substrat de la personne physique, ne peut à lui seul entrer dans la catégorie des personnes juridiques. C’est ainsi qu’après le décès, le corps devient une chose, tout comme un élément détaché du corps vivant. Une chose auquel le droit reconnaît un statut particulier et pour laquelle il organise une protection particulière. Au titre de ces protections, se trouve le principe d’extra patrimonialité du corps humain énoncé à l’article 16-1 du code civil « Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un droit patrimonial ». Le corps humain, ses éléments et ses produits n’intègrent donc pas le patrimoine de la personne, qui n’est pas pour autant privée d’un droit de disposition sur son corps. Ainsi, la personne peut céder son corps (après sa mort) ou des éléments de celui-ci dans le cadre d’un don (et non d’une donation), mais pas les vendre (à quelques exceptions près comme les cheveux par exemple). Application logique de ces principes en matière d’autoconservation, l’article R. 2141-18 du code de la santé publique prévoyait avant la réforme de la loi de bioéthique de 2022 (et prévoit toujours, mais par renvoi) que la personne dépositaire est la seule à pouvoir disposer de ses gamètes conformément aux possibilités qui lui sont ouvertes par le droit (utilisation pour elle-même, don à la recherche ou à un tiers dans le cadre d’une AMP, destruction) et que, une fois le dépositaire décédé, aucune personne ne pouvant disposer des gamètes à sa place, l’administration doit les détruire. Autrement dit, les gamètes ne faisant pas partie du patrimoine du dépositaire, les droits relatifs à ces gamètes ne sont pas transmis aux héritiers du dépositaire à cause de mort.

Cette exclusion des gamètes du champ des biens est contestée par le pourvoi au nom de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme, article qui, on le sait, protège de manière large le droit de propriété. Mais il est vrai, et la cour de cassation le relève, que la Cour européenne avait été saisie d’une question proche tenant à la qualité de bien d’un embryon. Dans l’arrêt Parrillo c/ Italie, cité par la première chambre civile, la Cour européenne avait en effet affirmé que « eu égard à la portée économique et patrimoniale qui s’attache à cet article, les embryons humains ne sauraient être réduits à des « biens » au sens de cette disposition ». La Cour de cassation procède par analogie pour retenir l’inapplicabilité de l’article aux gamètes.

Eu égard à la persévérance de la demanderesse, il n’est pas exclu qu’elle introduise un nouveau recours devant la Cour de Strasbourg pour violation de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention. Or, si du point de vue français, l’interprétation de la Cour de cassation paraît des plus logiques et conforme à la jurisprudence européenne, il faut néanmoins garder à l’esprit que la patrimonialité des gamètes a pu être reconnue ailleurs et que l’extra-patrimonialité ne va donc pas nécessairement de soi.

La tentation de la patrimonialité

En dehors de l’hexagone, l’extra-patrimonialité des gamètes n’est pas une règle absolue et nombre des pays membres de l’Union européenne autorisent la rémunération des donneurs. La question de permettre une telle rémunération est d’ailleurs systématiquement abordée lors des révisions successives des lois de bioéthique, sans avoir jusqu’ici jamais abouti. On se souvient qu’aux États-Unis, la vente d’ovocyte avait même fait l’objet d’une class action sur le terrain du droit de la concurrence pour dénoncer la fixation d’un prix excessivement bas (F. Bellivier et C. Noiville, Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà ? Les contrats américains de ventre d’ovocytes à l’épreuve du droit de la concurrence, RDC 2012/1, p.225).

De manière plus directe, l’existence d’un droit de propriété a pu être reconnu par diverses juridictions étrangères, notamment au Royaume-Uni au profit des dépositaires (v. par ex., F. Bellivier et C. Noiville, Sur quel fondement juridique indemniser la destruction des éléments et produits du corps humain ?, RDC 2010/3, p. 1007) et plus récemment en Israël au profit cette fois des parents du dépositaire et contre l’avis de la veuve (M. Lamarche, Procréation – Le sperme des morts… Qui hérite des forces procréatrices du défunt ?, Dr. fam., janv. 2017. Alerte 1). En effet, si les gamètes entrent dans le patrimoine du dépositaire, leur propriété est transmise aux héritiers à son décès à hauteur de leur part respective dans la succession. Cela ne va pas sans rappeler les difficultés qui avaient été rencontrées en droit français concernant le traitement des cendres funéraires (v. par ex., B. Grosjean, Corps épars. De plus en plus de familles s’entredéchirent pour la dépouille du défunt, Libération, 1er nov. 1999) et l’intervention corrélative du législateur pour imposer que le corps humain soit traité avec respect et dignité, y compris après le décès (C. civ., art. 16-1-1).

Espérons donc que la Cour européenne, si elle est saisie, saura résister à la tentation de considérer les gamètes comme des biens au sens de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention et appliquer aux gamètes la solution qu’elle avait retenue pour l’embryon.

  1222 lectures

Stationnement des vélos : sécurisation renforcée

Un décret du 25 juin 2022 détermine les modalités de sécurisation des infrastructures de stationnement des vélos dans les bâtiments.

Sur la boutique Dalloz

en lire plus

  1085 lectures

La détermination de la date à laquelle le jugement passe en force de chose jugée en cas d’appel portant sur les seules conséquences du divorce

À quelle date le juge doit-il se placer pour apprécier une demande de prestation compensatoire ?

La question est classique, mais continue de créer quelques difficultés.

Sauf, bien évidemment, en cas de divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par un avocat, c’est au jour où la décision qui prononce le divorce passe en force de chose jugée que le divorce est dissous (C. civ., art. 260) ; à cette même date, le devoir de secours prend fin et doivent être appréciées la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie des époux et la nécessité d’ordonner le versement d’une prestation compensatoire (C. civ., art. 270). Ces principes, simples en apparence, sont parfois difficiles à mettre en œuvre. Car il peut arriver que seuls les chefs de dispositif relatifs au règlement des conséquences de la rupture fassent l’objet d’un appel et, en ce cas, celui prononçant le divorce peut, sans qu’on y prête attention, passer en force de chose jugée ; la cour d’appel, doit alors apprécier le principe ou le montant de la prestation compensatoire non pas au jour où elle statue, mais à une date antérieure.

Il faut le rappeler : un jugement passe en force de chose jugée lorsqu’il n’est susceptible d’aucun recours suspensif d’exécution (C. pr. civ., art. 500). En somme, fixer le jour auquel le jugement prononçant le divorce passe en force de chose jugée revient à déterminer le moment où il n’est plus susceptible d’appel ou d’une autre voie de recours suspensive d’exécution. Du coup, la date du prononcé du jugement de divorce ne peut pas être celle où la décision passe en force de chose jugée. Pourtant, un temps, la Cour de cassation a enjoint aux juges d’apprécier l’existence et le montant de la prestation compensatoire « à la date du prononcé du divorce » dès lors que l’appel ne portait pas sur le principe du divorce (Civ. 1re, 2 mars 2004, n° 03-10.388, inédit ; Civ. 2e, 27 févr. 2003, n° 01-10.066, inédit ; 10 oct. 2002, n° 01-01.432 P ; 28 mars 2002, n° 00-13.936, inédit ; 25 mars 1985, n° 82-15.317 P). Manifestement, il y avait là une erreur car, en raison du caractère suspensif de l’appel, le jugement rendu par le juge aux affaires familiales ne peut passer en force de chose jugée dès son prononcé. Cette erreur était peut-être davantage à mettre au rang des approximations, parfois pratiquement inévitables en la matière ; même s’il paraît relever du bon sens que, en cas d’appel portant tant sur le prononcé du divorce que sur ses conséquences, la cour d’appel doive apprécier l’existence et le montant de la prestation compensatoire au jour où elle statue (Civ. 1re, 2 sept. 2020, n° 19-16.315, RTD civ. 2020. 860, obs. A.-M. Leroyer image; inédit ; 19 sept. 2018, n° 17-23.711, AJ fam. 2018. 546, obs. V. Avena-Robardet image, inédit ; 4 mars 2015, n° 13-28.469, inédit ; 20 nov. 2013, n° 12-27.726, inédit), le caractère suspensif du pourvoi en cassation fait pourtant obstacle à ce que l’arrêt passe en force de chose jugée au moment où la juridiction du second degré statue (C. pr. civ., art. 1086). Toutefois, à la différence de ce dernier cas de figure, aucune raison pratique n’empêche la juridiction du second degré, saisie d’un appel portant sur les seules conséquences du divorce, d’apprécier le principe et le montant de la prestation compensatoire au jour où la décision du premier juge est passée en force de chose jugée. Il suffit de déterminer le jour où le jugement prononçant le divorce n’est plus susceptible d’appel.

On sait que l’appelant principal est soumis à une règle stricte : sa déclaration d’appel (éventuellement complétée) fixe les chefs du jugement critiqués, sans que des conclusions ultérieures puissent étendre l’effet dévolutif de son appel (Civ. 1re, 22 juin 1999, n° 97-15.225 P, Koski c/ Société EMI France, D. 1999. 189 image ; Rappr. égal., Civ. 2e, 19 mai 2022, n° 21-10.685 P, Dalloz actualité, 15 juin 2022, obs. R. Laffly ; D. 2022. 1046 image ; 25 mars 2021, n° 20-12.037 P, Rev. prat. rec. 2021. 6, chron. O. Cousin, A.-I. Gregori, E. Jullien, F. Kieffer, A. Provansal et C. Simon image ; 2 juill. 2020, n° 19-16.954 P, Dalloz actualité, 18 sept. 2020, obs. R. Laffly ; D. 2021. 543, obs. N. Fricero image) ; ce n’est donc qu’au jour où l’intimé ne peut plus lui-même former un appel incident, pour critiquer le principe du divorce, que le jugement le prononçant passe en force de chose jugée ; d’où cette formule de la première chambre civile jugeant à raison que « le prononcé du divorce n’est passé en force de chose jugée qu’à la date du dépôt des conclusions de l’intimée » (Civ. 1re, 30 avr. 2014, n° 13-16.140, inédit ; 6 nov. 2013, n° 12-28.605, inédit ; 6 juin 2012, n° 11-11.260, RTD civ. 2012. 517, obs. J. Hauser image, inédit ; 11 mai 2012, 11-11.588, RTD civ. 2012. 517, obs. J. Hauser image, inédit ; 15 déc. 2010, n° 09-15.235 P, D. 2011. 161 image ; ibid. 1107, obs. M. Douchy-Oudot image ; AJ fam. 2011. 103, obs. S. David image ; RTD civ. 2011. 112, obs. J. Hauser image). Mais, peut-être par inadvertance, la première chambre civile a même été jusqu’à préciser que c’était à la date du dépôt des « dernières conclusions de l’intimé » que le juge devait se placer (Civ. 1re, 18 nov. 2020, n° 19-19.361, inédit ; 15 nov. 2017, n° 16-26.523, inédit ; 25 juin 2014, n° 13-18.751, inédit).

Dans l’arrêt commenté, la cour d’appel avait choisi de se détourner de cette dernière précision et, alors que l’appel principal était limité aux conséquences du divorce, avait estimé que le jugement était passé en force de chose jugée à la date du dépôt des premières conclusions de l’intimé dès lors que celles-ci ne contenaient aucun appel incident relatif au prononcé du divorce. Un pourvoi a été formé et son auteur avait beau jeu de soutenir que c’était à la date du dépôt des dernières conclusions de l’intimé que la cour d’appel aurait dû se placer pour fixer le principe et apprécier le montant de la prestation compensatoire. Le pourvoi est rejeté par la Cour de cassation, qui amende ainsi sa jurisprudence antérieure. 

Certes, un appel incident peut en principe être formé en tout état de cause (C. pr. civ., art. 550). Mais c’est sous réserve des règles relatives à la procédure d’appel ordinaire avec représentation obligatoire énoncées par les articles 909, 910 et 905-2 du code de procédure civile (C. pr. civ., art. 550). L’article 909, qui prévoit que « l’intimé dispose […] d’un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant […] pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué », oblige l’intimé à former son appel incident dans le délai de trois mois dont il dispose pour conclure ; il n’y a donc pas lieu d’attendre, pour déterminer si la décision prononçant le divorce passe en force de chose jugée, le dépôt de son dernier jeu d’écritures. La Cour de cassation a logiquement rejeté le pourvoi. Elle a même ajouté que le jugement prononçant le divorce était passé en force de chose jugée au jour du dépôt des premières conclusions de l’intimé. C’est à ce moment là que devait être appréciée la nécessité d’ordonner le versement d’une prestation compensatoire.

Cette solution fait ainsi du délai de trois mois prévu par l’article 909 du code de procédure civile un délai maximum pour déposer les conclusions au greffe (et les notifier à l’appelant) : l’intimé ne devrait pas pouvoir, même dans le délai de trois mois prévu par le texte, déposer un second jeu de conclusions pour former un appel incident ; une fois les conclusions déposées, il perd le bénéfice du délai de trois mois. A suivre ce raisonnement, l’appelant, qui peut toujours déposer une nouvelle déclaration d’appel afin de compléter ou régulariser une déclaration d’appel dans le délai dont il dispose pour conclure (Civ. 2e, 19 nov. 2020, n° 19-13.642 P, Dalloz actualité, 9 déc. 2020, obs. H. Ciray ; D. 2020. 2349 image ; ibid. 2021. 543, obs. N. Fricero image ; 30 janv. 2020, n° 18-22.528 P, Dalloz actualité, 17 févr. 2020, obs. R. Laffly ; D. 2020. 288 image ; ibid. 576, obs. N. Fricero image ; ibid. 1065, chron. N. Touati, C. Bohnert, S. Lemoine, E. de Leiris et N. Palle image ; ibid. 2021. 543, obs. N. Fricero image ; D. avocats 2020. 252, étude M. Bencimon image ; RTD civ. 2020. 448, obs. P. Théry image ; ibid. 458, obs. N. Cayrol image), ne devrait plus pouvoir y procéder une fois qu’il a déposé son premier jeu de conclusions, ce qui avait déjà été souligné par un auteur (S. Amrani-Mekki, note ss. Civ. 2e, 30 janv. 2020, n°18-22.528 P, préc., Gaz. Pal. 28 avr. 2020, p. 45)…

Mais, désormais, même en matière de divorce, l’intérêt à interjeter appel doit, à la suite de l’entrée en vigueur du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, être apprécié pour chaque chef de dispositif (Civ. 1re, avis, 20 avr. 2022, n° 22-70.001 P, Dalloz actualité, 13 mai 2022, obs. C. Lhermitte ; D. 2022. 792 image ; AJ fam. 2022. 281, obs. J. Casey image). Cela pourrait conduire à une difficulté lorsque le divorce est prononcé conformément aux prétentions élevées en première instance par celui qui est devenu intimé. Car, en ce cas, il pourrait être avancé que l’intimé n’a pas la possibilité d’interjeter appel du chef dispositif du jugement ayant prononcé le divorce et qu’il est pratiquement inutile d’attendre le dépôt de ses conclusions pour déterminer si le jugement prononçant le divorce est ou non passé en force de chose jugée. Cette analyse, simple et efficace, peut toutefois être contestée. Le défaut d’intérêt à interjeter appel d’un chef de dispositif ne peut résulter que d’une décision du juge – qui n’a d’ailleurs pas à relever d’office le défaut d’intérêt à exercer cette voie de recours (Civ. 2e, 6 juin 2019, n° 18-15.301 P) ; en conséquence, tant qu’aucune décision d’irrecevabilité de l’appel n’est prononcée, il n’y a pas lieu de prendre en considération une autre date que celle du dépôt des conclusions de l’intimé. Même si l’appel incident est déclaré irrecevable, la même solution pourrait continuer à s’appliquer ; c’est au jour où il est formé qu’est en principe apprécié l’intérêt de l’appelant à exercer la voie de recours (Com. 29 janv. 2020, n° 18-22.137 P, Dalloz actualité, 24 févr. 2020, obs. C-S. Pinat ; D. 2020. 278 image ; Civ. 2e, 25 juin 2015, n° 14-16.824, inédit ; Com. 26 janv. 2010, n° 08-21.637, inédit ; 6 avr. 2006, n° 04-12.803, inédit ; 8 avr. 1999, n° 97-12.190, inédit ; 6 mai 1998, n° 96-19.014 P;  4 mars 1981, n° 79-17.130 P) ; la décision d’irrecevabilité n’indique pas que, avant d’être interjeté, l’appel incident aurait été irrecevable (même si pratiquement il est rare que l’intérêt disparaisse). On pourrait donc considérer que, en cas d’appel principal portant sur les seules conséquences de la rupture, le jugement prononçant le divorce passe toujours en force de chose jugée au jour où l’intimé dépose son premier jeu de conclusions dès lors qu’elles ne contiennent aucun appel incident portant sur le principe du divorce…

  1264 lectures

Force de chose jugée: détermination de la date en cas d’appel portant sur les seules conséquences du divorce

Le juge doit se placer au jour où la décision prononçant le divorce est passée en force de chose jugée pour fixer le principe d’une prestation compensatoire et, s’il y a lieu, en évaluer le montant. Dès lors qu’un appel principal, limité aux conséquences du divorce, a été formé, c’est donc au jour où l’intimé ne peut plus former d’appel incident portant sur le prononcé même du divorce que le jugement passe en force de chose jugée. L’intimé dispose d’un délai de trois mois pour former un appel incident à compter de la notification des conclusions de l’appelant (C. pr. civ., art. 909) ; en conséquence, lorsque le premier jeu de conclusions qu’il dépose ne contient pas d’appel incident, c’est au jour de ce dépôt que le jugement prononçant le divorce passe en force de chose jugée.

en lire plus

Copyright

© Editions Dalloz

  1463 lectures

  

 SYMBOLE GRIS