Du contrôle de la transaction homologuée

Dans un arrêt rendu par la première chambre civile le 14 septembre 2022, la Cour de cassation rappelle qu’une transaction homologuée peut être contestée du point de vue de sa validité devant les juges du fond.

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Concentration des moyens et [I]exequatur[/I]

La Cour de cassation se prononce pour la première fois sur la portée du principe de concentration des moyens en présence de deux actions successives destinées à rendre un jugement étranger exécutoire en France, l’une fondée sur le règlement Bruxelles I, l’autre sur le droit commun de l’exequatur.

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Précisions sur la prescription du dommage corporel résultant d’une agression sexuelle

Le préjudice résultant d’une agression sexuelle est un dommage corporel dont l’action en réparation se prescrit dans un délai de dix ans à compter de la date de sa consolidation et de vingt ans lorsque la victime est mineure au moment des faits.

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Indemnité pour frais de réinstallation : absence d’abattement pour vétusté

Il n’y a pas lieu d’appliquer un abattement tenant compte de la vétusté des aménagements des locaux expropriés à l’indemnité pour frais de réinstallation allouée à une société afin de lui permettre de poursuivre son activité dans de nouveaux locaux.

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Indemnité pour frais de réinstallation : absence d’abattement pour vétusté

Il n’y a pas lieu d’appliquer un abattement tenant compte de la vétusté des aménagements des locaux expropriés à l’indemnité pour frais de réinstallation allouée à une société afin de lui permettre de poursuivre son activité dans de nouveaux locaux.

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L’impact indemnitaire du placement en activité partielle du salarié déjà en arrêt maladie

Basée sur la rémunération qu’il aurait perçue s’il avait travaillé, l’indemnisation complémentaire du salarié en arrêt maladie est impactée par son placement en activité partielle.

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Délimitation de l’action civile en matière de banqueroute

Dans une décision du 22 juin 2022, la Cour de cassation vient rappeler que les créanciers et actionnaires d’une société débitrice ne peuvent pas se constituer partie civile en matière de banqueroute, sauf à invoquer un préjudice distinct du montant de la créance déclarée dans le cadre de la procédure collective.

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La fiscalité, c’est ROCK ! - Épisode 6 : Sandrine Groult

Vous pensez que la fiscalité c’est ennuyeux ? Attendez d’écouter ceux qui l’ont mise au cœur de leur vie professionnelle et qui l’exercent avec passion ! Pour ce sixième épisode de notre série consacrée aux parcours parfois surprenants de fiscalistes, Stéphane Baller, avocat of counsel chez De Gaulle Fleurance & Associés reçoit Sandrine Groult, Directrice Fiscale et Douanes du groupe Tereos.

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Visite domiciliaire de l’administration fiscale : précisions sur le rôle de l’officier de police judiciaire

Le premier président de cour d’appel, qui constate que l’officier de police judiciaire chargé d’assister aux opérations de visite et de saisies, qui s’est absenté du local où elles se déroulaient, est demeuré à proximité de ce local et est à tout moment joignable, qu’aucun incident n’a été soulevé à ce propos et que le procès-verbal a été signé sans que des observations soient formulées, en déduit à bon droit qu’il n’y pas lieu d’annuler les opérations de visite et de saisies dès lors que n’est invoquée aucune atteinte aux intérêts que l’officier de police judiciaire a pour mission de protéger, rendue possible par ses absences.

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  1113 lectures

Que signifie faire partie du ménage d’un citoyen de l’Union ?

Pour qu’un ressortissant d’un État tiers soit considéré comme appartenant au ménage d’un citoyen de l’Union, il doit exister entre eux une relation de dépendance, fondée sur des liens personnels étroits et stables.

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Marché du logement en 2022 : le calme avant la tempête ?

En dépit d’une conjoncture compliquée, le marché du logement résiste bien. Mais, jusqu’à quand ?

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Le refus du test covid est une obstruction à une mesure d’éloignement

Le refus d’un étranger, frappé d’une mesure d’éloignement, de se soumettre à un test PCR exigé par la compagnie aérienne, constitue une obstruction à l’éloignement, permettant la prolongation de la rétention, sauf s’il est justifié par des raisons médicales.

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De l’importance de la détermination de l’objet du litige dans le contentieux contractuel

Dans un arrêt rendu le 7 septembre 2022, la troisième chambre civile de la Cour de cassation rappelle que c’est aux parties de dessiner l’objet du litige par leurs prétentions respectives.

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Quand l’urgence climatique bouscule le droit de préemption

Un décret du 10 septembre 2022 fixe les modalités selon lesquelles l’autorité administrative peut instituer un droit de préemption des surfaces agricoles, dans les aires d’alimentation de captages utilisées pour l’alimentation en eau destinée à la consommation humaine, au bénéfice des personnes publiques disposant de la compétence « eau potable ».

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Quand l’urgence climatique bouscule le droit de préemption

Un décret du 10 septembre 2022 fixe les modalités selon lesquelles l’autorité administrative peut instituer un droit de préemption des surfaces agricoles, dans les aires d’alimentation de captages utilisées pour l’alimentation en eau destinée à la consommation humaine, au bénéfice des personnes publiques disposant de la compétence « eau potable ».

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La stricte interdiction de la prise en compte des tests génétiques prédictifs par l’assureur

Viole les articles L. 113-2, L. 113-8 et L. 133-1 du code des assurances ainsi que l’article L. 1141-1 du code de la santé publique la cour d’appel qui retient la nullité des contrats proposant des garanties des risques d’invalidité et risque décès pour réticence intentionnelle de l’assuré pour ne pas avoir mentionné, lors de la déclaration du risque, les tests génétiques et leurs résultats dont elle faisait l’objet.

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Le chef dépendant est aussi celui qui résulte d’un chef de débouté

Le litige oppose un bailleur à son locataire, auquel celui-là demande le paiement au titre de travaux de réfection.

La contestation quant à ces travaux de réfection est portée devant le tribunal par le locataire.

À titre reconventionnel, le bailleur demande la résiliation du bail et l’expulsion du locataire, outre une indemnité d’occupation.

Le tribunal déboute le locataire de ses demandes et prononce en conséquence sa condamnation au paiement des travaux de réfection. En outre, faisant droit à la demande reconventionnelle du bailleur, il ordonne la résiliation avec expulsion, et condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation.

Sur la déclaration d’appel, le locataire appelant mentionne le débouté de ses demandes, la résiliation du bail et la condamnation au titre de l’indemnité d’occupation. N’est pas expressément mentionnée la condamnation au titre des travaux de réfection.

Néanmoins, l’appelant conclut de ce chef, pour lequel il demande l’infirmation.

La cour d’appel relève d’office l’absence de dévolution, du chef de la condamnation pour les travaux de réfection, au motif que ce chef de condamnation n’est pas expressément mentionné dans la déclaration d’appel.

Mais devant la Cour de cassation, ça ne passe pas, et l’arrêt est cassé en ce qu’il a dit que ce chef non mentionné n’était pas dévolu.

Le chef, cette mention qui se précise

Si le « chef » est un terme largement usité en procédure, depuis 2017, il reste difficile d’en donner une définition.

Nous savons ce qu’il n’est pas – ce n’est ni les prétentions formées par la partie (Civ. 2e, 2 juill. 2020, n° 19-16.954 P, Dalloz actualité, 18 sept. 2020, obs. R. Laffly ; D. 2021. 543, obs. N. Fricero image) ni les motifs du jugement (Soc. 14 oct. 2020, n° 18-15.229, Dalloz actualité, 3 nov. 2020, obs. C. Lhermitte ; D. 2020. 2071 image ; ibid. 2021. 543, obs. N. Fricero image) – mais il est plus difficile de dire ce qu’il est.

Car de définition, il n’y en a pas véritablement, si ce n’est dans la circulaire du 2 août 2017 qui nous précise que « la notion de chefs de jugement correspond aux points tranchés dans le dispositif du jugement » (circ. 4 août 2017 de présentation des dispositions du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 relatif aux exceptions d’incompétence et à l’appel en matière civile, modifié par le décret n° 2017-1227 du 2 août 2017, NOR : JUSC1721995C).

Cet arrêt ne nous donnera pas une définition, mais il donne d’intéressantes précisions sur la notion de « chef dépendant », qui est venue depuis peu sur le devant de la scène (Civ. 2e, 9 juin 2022, n° 20-16.239, Dalloz actualité, 8 juill. 2022, obs. C. Lhermitte ; D. 2022. 1160 image).

Il apparaît que la Cour de cassation prend de la distance avec cette pratique, qui est malheureusement devenue comme une évidence, consistant à faire une copie servile du dispositif du jugement pour la coller dans la rubrique « chefs critiqués ». Et cette pratique a pris tant d’ampleur que certains juges d’appel peuvent ne pas réussir à s’en défaire, pour considérer que toute autre manière de faire est à proscrire et n’opère pas dévolution.

Ici, le jugement avait expressément condamné le locataire au paiement des travaux de réfection. Et il est acquis que l’appelant, curieusement – mais le processualiste l’en remerciera –, n’avait pas mentionné ce chef.

Mais il avait procédé différemment, en mentionnant dans son acte d’appel qu’il portait sur le débouté de sa demande tendant à ce qu’il soit jugé qu’il n’était pas tenu au paiement des frais de réfection de la toiture.

S’il fallait traduire, le locataire développait des moyens, en première instance, démontrant qu’il n’avait pas à supporter le coût des travaux, et que le bailleur devait en conséquence être débouté. Cette demande de débouté n’a pas prospéré...

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Notion d’accident de la circulation : limitation du champ d’application de la loi Badinter

Ne constitue pas un accident de la circulation, la chute d’une victime sur un véhicule en stationnement dans un garage privé lorsqu’aucun des éléments liés à sa fonction de déplacement n’est à l’origine de l’accident.

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Le chef dépendant est aussi celui qui résulte d’un chef de débouté

Sont dévolus à la cour d’appel les chefs expressément critiqués, mentionnés dans la déclaration d’appel, et ceux qui en dépendent, qui sont la conséquence d’un chef de jugement expressément critiqué. Si l’appelant n’a pas expressément mentionné le chef de la condamnation, ce chef est néanmoins dévolu lorsque l’appelant mentionne que l’appel porte sur le jugement en ce qu’il a jugé que la partie était tenue au paiement des sommes demandées.

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Notion d’accident de la circulation : limitation du champ d’application de la loi Badinter

La loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 visant « à l’amélioration de la situation des victimes d’accident de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation », dite « loi Badinter », a mis en place un système de réparation du dommage particulièrement favorable pour les victimes. Les causes d’exonération du responsable sont retenues de manière restrictive (art. 2), particulièrement concernant les dommages corporels subis par des victimes non conductrices (art. 3). Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité sont, en outre, assouplies par rapport au droit commun de la responsabilité civile. Tout recours au concept de causalité a effet été abandonné pour retenir celui d’implication (art. 1), issu de l’article 4 de la Convention de La Haye sur la loi applicable en matière d’accident de la circulation routière. Encore faut-il, toutefois, pour bénéficier de ce régime, avoir été victime d’un accident de la circulation. Il convient, dès lors, de parvenir à circonscrire les limites de cette notion (sur laquelle, v. A. Cayol, « Responsabilité du fait des accidents de la circulation », in R. Bigot et F. Gasnier [dir.],Lexbase, Encyclopédie. Droit de la responsabilité civile, 9 mai 2022 ; R. Bigot et A. Cayol, Le droit de la responsabilité civile en tableaux, Ellipses, 2022, p. 314). Bien qu’elle soit traditionnellement comprise de manière extensive, cette dernière ne saurait englober les hypothèses où un véhicule terrestre à moteur est présent lors d’un accident sans lien direct avec la circulation. Une doctrine autorisée s’interrogeait ainsi : « Ne serait-il pas audacieux de rattacher à la circulation routière l’hypothèse, parfois prise comme exemple, d’une victime défenestrée dont le corps viendrait s’écraser sur un véhicule en stationnement ? » (G. Viney, P. Jourdain et S. Carval, Les régimes spéciaux de l’assurance de responsabilité, 4e éd., LGDJ, 2017, n° 100, p. 132). Ce cas d’école vient d’être soumis à l’appréciation de la Cour de cassation le 7 juillet 2022.

En l’espèce, une personne, effectuant des travaux sur le toit de son garage, tombe au travers de la lucarne du garage de son voisin, heurtant dans sa chute le véhicule de ce dernier qui y était stationné. La victime assigne l’assureur dudit véhicule en indemnisation de ses préjudices. La cour d’appel fait droit à sa demande en retenant l’existence d’un accident de la circulation, au sens de l’article 1er de la loi du 5 juillet 1985. Selon elle, « le stationnement d’un véhicule terrestre à moteur constitue en tant que tel un fait de circulation » (pt 5). Sa décision est cassée par la deuxième chambre civile, au visa de l’article 1er de la loi Badinter, aux motifs que « ne constitue pas un accident de la...

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L’application du principe de subsidiarité de l’intervention de l’AGS en redressement et en liquidation judiciaires

En présence d’un relevé de créances présenté à l’AGS sous la seule responsabilité du mandataire, sa garantie ne peut être exclue au motif qu’à la suite de l’adoption de la décision de cession des actifs, les créances pourraient être payées sur les fonds disponibles issus du prix de cession. La sanction de l’absence de respect par le liquidateur de la subsidiarité ne peut être obtenue qu’a posteriori, par le droit au remboursement de ces avances assorties du superprivilège dont l’AGS bénéficie, ainsi que par la mise en jeu de la responsabilité des mandataires pour avoir présenté un relevé de créances afin d’obtenir des avances en violation de l’article L. 3253-20 du code du travail.

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Brevets : compétence dans l’Union européenne

Par un arrêt du 8 septembre 2022, la Cour de justice se prononce sur la détermination du champ d’application de l’article 24, point 4, du règlement Bruxelles I bis, en présence de demandes de brevets déposées dans des États tiers à l’Union et de brevets obtenus dans l’un d’eux.

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Brevets : compétence dans l’Union européenne

Un litige oppose, devant une juridictions suédoise, deux sociétés suédoises à propos de droits contestés sur des inventions protégées par des brevets américains ou qui ont donné lieu au dépôt de demandes de brevets aux États-Unis et en Chine.

Le juge saisi se déclare alors incompétent en ce qui concerne la détermination de l’inventeur mais sa décision d’incompétence est contestée.

La Cour de justice est saisie, ce qui la conduit à se pencher sur la portée de l’article 24, point 4, du règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale : « Sont seules compétentes les juridictions ci-après d’un État membre, sans considération de domicile des parties : (…) en matière d’inscription ou de validité des brevets, marques, dessins et modèles, et autres droits analogues donnant lieu à dépôt ou à un enregistrement, que la question soit soulevée par voie d’action ou d’exception, les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel le dépôt ou l’enregistrement a été demandé, a été effectué ou est réputé avoir été effectué aux termes d’un instrument de l’Union ou d’une convention internationale. (…) ».

Il s’agit de déterminer si cet article 24 doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à un litige tendant à déterminer, dans le cadre d’un recours fondé sur la qualité alléguée d’inventeur ou de co-inventeur, si une personne est titulaire du droit sur des inventions visées par des demandes de brevet déposées et par des brevets délivrés dans des pays tiers.

Pour répondre à cette question, il convient de déterminer si le litige considéré relève bien du champ d’application du règlement alors que les seuls éléments d’extranéité concernent des États tiers à l’Union, à savoir les brevets demandés ou délivrés aux États-Unis et en Chine, le reste du litige étant relatif à deux sociétés ayant leur siège dans le même État membre. Cette problématique n’est pas nouvelle :...

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La preuve de dépôt d’une déclaration d’ICPE est une décision qui fait grief

Dans un avis contentieux, le Conseil d’État précise que la délivrance par voie électronique de la preuve de dépôt de la déclaration d’une installation classée est une décision susceptible de recours.

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Quand un courriel du président ne sauve pas le jugement de la nullité pour violation de l’imparité

Pour être un acte éminent, le jugement n’en est pas moins un acte juridique. Comme tel, il est exposé à des causes de nullité qui sanctionnent les irrégularités affectant son élaboration. Toutefois, en tant qu’il est l’œuvre d’un juge et se voit doter d’une autorité de chose jugée, l’annulation du jugement pour de telles irrégularités obéit à un régime spécial, non seulement par rapport aux actes juridiques privés, mais aussi par rapport aux autres actes de procédure. Ce n’est que sous certaines réserves et conditions que les parties peuvent obtenir le prononcé de la nullité du jugement, ce dont témoigne l’arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 23 juin 2022.

En l’espèce, une cour d’appel a rendu un arrêt qui mentionne que quatre juges ont constitué la juridiction lors des débats et du délibéré. Cette situation n’est pas conforme à la règle qui veut que les juridictions soient composées de juges en nombre impair. Comme la nullité d’un jugement ne peut être demandée que par les voies de recours (C. pr. civ., art. 460), un pourvoi en cassation est formé par la partie perdante. La Cour de cassation prononce l’annulation de l’arrêt (et non une cassation) précisant que « la copie du courriel adressé par le président de chambre signataire de l’arrêt à l’avocat du défendeur au pourvoi n’est pas de nature à établir que les prescriptions légales ont été, en fait, observées ».

L’arrêt donne l’occasion de revenir sur la cause de nullité, la violation de la règle d’imparité, et sur les conditions de prononcé de la nullité, la Cour ne se contentant pas du courriel du président pour sauver le jugement.

La cause de nullité : l’imparité violée

Les causes de nullité des jugements (le terme est pris dans son sens notionnel et inclut les arrêts) sont définies strictement.

L’article 430 du code de procédure civile prévoit au stade des débats que « la juridiction est composée, à peine de nullité, conformément aux règles relatives à l’organisation judiciaire ». Par ailleurs, une liste, non limitative (C. Chainais, F. Ferrand, L. Mayer et S. Guinchard, Procédure civile, 35e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2020, n° 1161), de causes de nullité figure à l’article 458 concernant l’élaboration du jugement. Cet article renvoie notamment à l’article 447 qui prévoit qu’« il appartient aux juges devant lesquels l’affaire a été débattue d’en délibérer. Ils doivent être en nombre au moins égal à celui que prescrivent les règles relatives à l’organisation judiciaire ».

L’article L. 121-2 du code de l’organisation judiciaire prévoit l’imparité comme règle commune aux juridictions judiciaires. La règle fut formulée par la loi du...

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Précision sur le champ d’application des contrats conclus hors établissement

Dans un arrêt rendu par la première chambre civile le 31 août 2022, la Cour de cassation rappelle utilement comment un professionnel peut bénéficier des règles applicables aux contrats conclus hors établissement par le jeu de l’article L. 221-3 du code de la consommation.

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La nullité du rapport d’expertise est soumise aux conditions de la nullité des actes de procédure

Les rapports d’expertise jouent bien souvent un rôle décisif sur l’issue d’un litige et, pour cette raison, il n’est pas rare que l’une des parties prenne l’initiative d’en solliciter la nullité. Mais que les conditions nécessaires au prononcé de la nullité soient réunies s’avère finalement peu fréquent. L’arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 8 septembre 2022 le rappelle à nouveau.

Alors qu’un bail commercial avait été conclu, le preneur, invoquant de multiples désordres et notamment des infiltrations provenant de la toiture, avait saisi un juge des référés afin qu’il ordonne une expertise et désigne un expert. Sitôt le rapport d’expertise déposé, le locataire avait assigné son bailleur en réalisation du bail et en paiement de dommages-intérêts, ce à quoi ce dernier avait répliqué en sollicitant la nullité du rapport d’expertise. Il faut bien dire que le bailleur avait de quoi critiquer le déroulement des opérations d’expertise : les conditions météorologiques avaient en effet dissuadé l’expert de se rendre sur le toit du local loué et il avait préféré conclure à l’existence d’infiltrations en se fondant sur des photographies issues d’un rapport amiable réalisé à la demande du locataire. Le bailleur avait beau jeu de soutenir qu’en procédant ainsi, l’expert n’avait pas personnellement rempli la mission qui lui avait été confiée. Le tribunal de grande instance d’Agen a effectivement prononcé la nullité du rapport ; mais, saisie d’un recours, la cour d’appel a réformé le jugement de ce chef. L’expert avait en effet respecté le principe du contradictoire lors de l’examen des photographies et avait répondu au dire du bailleur qui s’était borné à soutenir que les désordres pouvaient avoir une autre origine que celle retenue par le technicien : pour la juridiction du second degré, cela suffisait amplement. Le bailleur eut beau former un pourvoi en cassation pour invoquer la violation de l’article 233 du code de procédure civile, celui-ci fut rejeté dès lors que la cour d’appel avait ainsi fait ressortir que le bailleur n’avait subi aucun grief.

Le raisonnement suivi par la Cour de cassation est imparable.

Il faut en effet se souvenir qu’en vertu de l’article 175 du code de procédure civile, « la...

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La nullité du rapport d’expertise est soumise aux conditions de la nullité des actes de procédure

Même lorsqu’un rapport d’expertise est irrégulier parce que l’expert n’a pas lui-même accompli les termes de sa mission, la nullité du rapport demeure soumise aux conditions de la nullité des actes de procédure par application de l’article 175 du code de procédure civile.

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Imprévision et conditions de modification des contrats publics

Dans un avis de dix pages, le Conseil d’État donne le mode d’emploi de la modification des contrats de la commande publique pour faire face à la hausse des prix.

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Toute perte de chance est réparable, [I]bis repetita[/I]

La perte de chance fait partie des figures connues en droit de la responsabilité pour son ambivalence et pour sa technicité. Elle illustre, en effet, le croisement entre les préjudices futurs et les préjudices éventuels (F. Terré, P. Simler, Y. Lequette et F. Chénedé, Droit civil – Les obligations, 13e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2022, p. 1049, n° 925). Mais ce n’est pas tout : on rencontre surtout la perte de chance dans toute une série de contentieux très différents lui donnant une certaine pluralité d’aspects. Par exemple, nous l’avons croisé récemment dans plusieurs matières : droit des assurances (Civ. 2e, 24 sept. 2020, n° 18-12.593, Dalloz actualité, 12 oct. 2020, obs. C. Hélaine ; D. 2020. 2323 image, note P.-G. Marly image ; AJ contrat 2020. 492, obs. P. Guillot image ; ibid. 558, obs. L. Perdrix image), droit des clauses abusives (Civ. 2e, 14 oct. 2021, n° 19-11.758, Dalloz actualité, 20 oct. 2021, obs. C. Hélaine ; D. 2021. 1920 image ; ibid. 2022. 310, obs. R. Boffa et M. Mekki image ; ibid. 574, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud image), ou encore droit du crédit (Com. 9 févr. 2022, n° 20-17.551 F-B, Dalloz actualité, 16 févr. 2022, obs. C. Hélaine ; RTD civ. 2022. 401, obs. P. Jourdain image). C’est d’ailleurs au sujet de cette dernière thématique que nous la retrouvons aujourd’hui dans cet arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 14 septembre 2022 et promis aux honneurs d’une publication au Bulletin. La solution donnée vient, par ailleurs, confirmer un arrêt de 2020 de la même formation (Civ. 2e, 20 mai 2020, n° 18-25.440, Dalloz actualité, 19 juin 2020, obs. A. Hacene-Kebir ; D. 2020. 1100 image ; ibid. 2021. 46, obs. P. Brun, O. Gout et C. Quézel-Ambrunaz image ; ibid. 310, obs. R. Boffa et M. Mekki image ; RDI 2020. 524, obs. H. Heugas-Darraspen image ; AJ contrat 2020. 385, obs. C. François image ; RTD civ. 2020. 629, obs. H. Barbier image ). Notons qu’il s’agit de responsabilité contractuelle, l’arrêt étant rendu au double visa de l’article 1147 ancien, devenu 1217 du Code civil après l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, d’une part et, celui du « principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime », d’autre part. Voici déjà de quoi annoncer la teneur de l’arrêt analysé, peu de décisions pouvant se targuer d’un tel double visa.

Positionnons le problème en évoquant les faits ayant donné lieu au pourvoi. Un établissement bancaire consent deux prêts immobiliers à une personne physique par acte du 16 novembre 2006. Afin de garantir le remboursement des prêts dans le cas de plusieurs sinistres possibles (décès, perte d’autonomie, incapacité de travail), l’emprunteur adhère à une assurance de groupe souscrite par la banque. Il déclare, au moment de son adhésion, le traitement médical qu’il suivait depuis quinze ans en raison d’une maladie de longue durée. Le 31 août 2015, l’emprunteur est placé en arrêt de travail en raison de l’évolution défavorable de sa maladie décrite précédemment. Il sollicite de l’assurance la garantie incapacité de travail dans le même temps. Après avoir fait réaliser une expertise médicale, l’assureur informe son assuré le 8 juin 2016 de son...

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[I]Trademark Troll[/I] : monopolisation d’un signe par le jeu des dépôts successifs

Doit être déclarée nulle pour dépôt de mauvaise foi sur le fondement de l’article 59, § 1, b) du règlement (UE) 2017/1001, la marque déposée dans le seul but d’obtenir, pour son titulaire, une position de blocage sur le marché. Se rend coupable d’abus de droit le déposant qui détourne le droit de priorité à son profit afin de prolonger artificiellement la période de six mois.

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Toute perte de chance est réparable, [I]bis repetita[/I]

Dans un arrêt rendu le 14 septembre 2022, la deuxième chambre civile rappelle que toute perte de chance est réparable. L’emprunteur n’a pas, dans le contexte de l’adhésion à une assurance de groupe, à démontrer qu’il aurait de manière certaine souscrit une assurance couvrant le risque réalisé.

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Une conception large de la notion d’« accident » au sens de la Convention de Montréal du 28 mai 1999

Une situation dans laquelle, pour une raison indéterminée, un passager fait une chute dans un escalier mobile mis en place pour le débarquement des passagers d’un aéronef et se blesse relève de la notion d’« accident », au sens de l’article 17, § 1er, de la Convention de Montréal du 28 mai 1999 relative au transport aérien international, y compris lorsque le transporteur aérien concerné n’a pas manqué à ses obligations de diligence et de sécurité à cet égard.

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Reconnaissance d’un jugement dans l’Union et arbitrage

La Cour de justice de l’Union européenne se penche sur le régime juridique, en application du règlement Bruxelles I, d’une décision anglaise reprenant les termes d’une sentence arbitrale.

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Reconnaissance d’un jugement dans l’Union et arbitrage

La Cour de justice de l’Union européenne se penche sur le régime juridique, en application du règlement Bruxelles I, d’une décision anglaise reprenant les termes d’une sentence arbitrale.

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Reconnaissance d’un jugement dans l’Union et arbitrage

Faits et procédures arbitrales et nationales

Une importante pollution s’est produite, en Espagne et en France, en novembre 2002, à la suite du naufrage du pétrolier Prestige, au large des côtes espagnoles. Des poursuites pénales ont alors été engagées en Espagne à la fin de l’année 2002, de même que des actions civiles à l’encontre du capitaine du navire, de son propriétaire et de son assureur, qui n’a toutefois pas comparu.

S’appuyant sur la clause compromissoire stipulée dans le contrat d’assurance, l’assureur a quant à lui engagé à Londres une procédure d’arbitrage, en soutenant que l’Espagne devait faire valoir ses prétentions, déjà formulées dans la procédure engagée en Espagne, devant les arbitres et que sa responsabilité ne pouvait pas, en tout état de cause, être engagée à l’égard de l’Espagne, compte tenu des stipulations du contrat d’assurance. L’Espagne a toutefois refusé de participer à la procédure d’arbitrage.

Par une sentence du 13 février 2013, le tribunal arbitral a notamment retenu que l’Espagne aurait dû formuler ses demandes indemnitaires dans le cadre de l’arbitrage et que la responsabilité de l’assureur ne pouvait pas être engagée à son égard.

Par une ordonnance du 22 octobre 2013, la Haute Cour de justice d’Angleterre et du Pays de Galles a autorisé l’assureur à faire exécuter la sentence arbitrale. Elle a également prononcé le 22 octobre 2013 un arrêt, qui reprend les termes de la sentence, en application de l’article 66 de l’Arbitration Act 1996 (loi de 1996 sur l’arbitrage), intitulé « Exécution de la sentence », qui dispose que : « 1) Une sentence prononcée par le tribunal [arbitral] en vertu d’une convention d’arbitrage peut, sur autorisation de la cour, être exécutée de la même manière qu’un arrêt ou une ordonnance de la cour aux mêmes fins. 2) Lorsque cette autorisation est accordée, un arrêt reprenant les termes de la sentence peut être rendu ».

Les procédures judiciaires engagées en Espagne ont quant à elles conduit, notamment, à la condamnation de l’assureur à indemniser l’Espagne, par une ordonnance de la cour provinciale de la Corogne du 1er mars 2019.

Cette ordonnance espagnole a été reconnue, à la demande de l’Espagne, par une ordonnance de la Haute Cour de justice d’Angleterre et du Pays de Galles du 28 mai 2019, sur le fondement de l’article 33 du règlement Bruxelles I (CE n° 44/2001) du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale.

Toutefois, l’assureur a formé un appel contre cette ordonnance du 28 mai 2019.

C’est au regard de ces éléments que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a été saisie et a rendu un arrêt le 20 juin 2022.

Problématique juridique

Le débat partait du constat que l’arrêt de la Haute Cour de justice d’Angleterre et du Pays de Galles du 22 octobre 2013 a repris les termes de la sentence arbitrale et était inconciliable avec l’ordonnance de la cour provinciale de la Corogne du 1er mars 2019. Dans ce cadre, il s’agissait de déterminer si, compte de la spécificité de son contenu, l’arrêt du 22 octobre 2013 pouvait être qualifié de « décision » au sens du règlement Bruxelles I et faire obstacle à la reconnaissance en Grande-Bretagne de l’ordonnance espagnole du 1er mars 2019.

Pour bien comprendre la position de la Cour de justice de l’Union européenne, il est utile de rappeler quelques dispositions du règlement Bruxelles I, étant souligné que le Brexit a été sans conséquence dans cette affaire, compte tenu des dates des décisions concernées :

• Art. 1 : « Le présent règlement s’applique en matière civile et commerciale et quelle que soit la nature de la juridiction. Il ne recouvre notamment pas les matières fiscales, douanières ou administratives. 2. Sont exclus de son application : […] ; d) l’arbitrage » ;

• Art. 32 : « On entend par décision, au sens du présent règlement, toute décision rendue par une juridiction d’un État membre quelle que soit la dénomination qui lui est donnée, telle qu’arrêt, jugement, ordonnance ou mandat d’exécution, ainsi que la fixation par le greffier du montant des frais du procès » ;

• Art. 33, point 1 : « Les décisions rendues dans un État membre sont reconnues dans les autres États membres, sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure » ;

• Art. 34, point 3 : « Une décision n’est pas reconnue si : […] ; 3) elle est inconciliable avec une décision rendue entre les mêmes parties dans l’État membre requis ; […] » ;

• Art. 27 (litispendance) : « 1. Lorsque des demandes ayant le même objet et la même cause sont formées entre les mêmes parties devant des juridictions d’États membres différents, la juridiction saisie en second lieu sursoit d’office à statuer jusqu’à ce que la compétence du tribunal premier saisi soit établie. 2. Lorsque la compétence du...

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L’article premier de la Charte de l’environnement devient une liberté fondamentale

Le référé-liberté peut être invoqué au regard du droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé. Le Conseil d’État reconnaît une nouvelle liberté fondamentale en l’assortissant de conditions qui limiteront l’usage d’un tel recours.

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Être ou ne pas être une demande nouvelle en cause d’appel

Étendard de l’appel voie de réformation, l’interdiction de la demande nouvelle en cause d’appel fait toujours parler tant le principe et ses exceptions semblent délicats à aborder. C’est cette fois la voix de la première chambre civile qui se fait entendre. Une SCI assigne sa banque en nullité de la stipulation du taux d’intérêt et en substitution du taux d’intérêt légal au taux conventionnel. En appel, elle sollicite la déchéance du droit aux intérêts. Reprochant à la cour d’appel de Dijon d’avoir jugé cette demande recevable comme non nouvelle en cause d’appel, la banque forma pourvoi incident sur cette question. La première chambre civile répond :

« 4. Selon l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait. Aux termes de l’article 565 du même code, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.

5. La demande en annulation d’une stipulation d’intérêts avec substitution du taux légal tend aux mêmes fins que celle en déchéance du droit aux intérêts dès lors qu’elles visent à priver le prêteur de son droit à des intérêts conventionnels.

6. Le moyen, qui postule le contraire, n’est donc pas fondé. »

Être ou ne pas être nouvelle

Voilà un nouvel arrêt publié qui permet de (re)définir ce qu’est une demande nouvelle. Ou ce qu’elle n’est pas. Bien que l’arrêt débouche in fine sur une cassation totale à la suite du pourvoi principal de l’emprunteur sur l’articulation entre le coût de l’assurance invalidité-décès et le taux effectif global, sa publication au Bulletin résulte non pas de la vision consumériste mais de l’approche processualiste. Mis en exergue par la première chambre elle-même – et c’est un signe – le pourvoi incident de la banque est examiné avant le pourvoi principal de l’emprunteur. Il est rejeté. Mais il est publié.

L’article 564 du code de procédure civile, cité par la Cour de cassation, pose le principe bien connu de l’irrecevabilité des demandes nouvelles en appel. Mais l’appel est une voie d’achèvement maîtrisée – ou une voie de réformation élargie selon la théorie du verre à moitié plein ou à moitié vide – et des exceptions au principe sont aussitôt apportées : les prétentions ne sont pas nouvelles si elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent, les parties pouvant ajouter aux prétentions soumises au premier juge...

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Être ou ne pas être une demande nouvelle en cause d’appel

N’est pas nouvelle en cause d’appel la demande en annulation d’une stipulation d’intérêts avec substitution du taux légal qui tend aux mêmes fins que celle en déchéance du droit aux intérêts, dès lors qu’elles visent l’une et l’autre à priver le prêteur de son droit à des intérêts conventionnels.

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Intérêt à agir contre une autorisation d’urbanisme

C’est uniquement à la date d’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire et sans qu’il y ait lieu de tenir compte des circonstances postérieures que s’apprécie l’intérêt pour agir d’un requérant contre un permis de construire.

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Intérêt à agir contre une autorisation d’urbanisme

C’est uniquement à la date d’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire et sans qu’il y ait lieu de tenir compte des circonstances postérieures que s’apprécie l’intérêt pour agir d’un requérant contre un permis de construire.

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L’obligation de réserve « ne saurait servir à réduire un magistrat au silence »

S’appuyant sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, le Conseil supérieur de la magistrature insiste sur la liberté d’expression des magistrats.

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Nouvelles précisions sur la tierce opposition du jugement constatant le bon achèvement du plan

Un arrêt du 14 septembre 2022 rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation précise le régime des voies de recours applicables au jugement qui constate le bon achèvement du plan. L’espèce est rendue sous l’empire des textes antérieurs à la loi de sauvegarde des entreprises, époque à laquelle cette décision n’était pas prévue par le législateur. Cependant, les enseignements fournis demeurent d’actualité dès lors que les nouveaux textes qui l’envisagent (C. com., art. L. 626-28 et R. 626-50) ne précisent rien sur les voies de recours qui lui sont applicables.

L’arrêt est le second rendu par la haute juridiction dans la même affaire. Tout avait commencé lors d’une procédure de redressement judiciaire ouverte en 2002. Un plan de continuation avait été adopté, en août 2004, écartant le passif demeurant litigieux. Ce jugement n’avait fait l’objet d’aucune voie de recours, pas plus qu’une décision ultérieure qui modifiait le plan. Par la suite, un jugement du 7 juin 2011 constatait le bon achèvement du plan. Des créanciers dont les créances faisaient toujours l’objet d’instances en cours en formaient alors tierce opposition. La cour d’appel de Paris avait déclaré cette tierce opposition irrecevable, qualifiant la décision de simple mesure d’administration judiciaire, insusceptible de toute voie de recours. Un pourvoi en cassation fut alors formé par lesdits créanciers, qui fut couronné de succès. Dans un arrêt du 29 septembre 2015, la Cour de cassation énonçait que le jugement constatant le bon achèvement du plan était un acte juridictionnel et non une mesure d’administration judiciaire (Com. 29 sept. 2015, n° 14-11.393, Société d’expansion du spectacle c. Odetto, Dalloz actualité, 23 sept. 2015, obs. X. Delpech ; D. 2015. 1839 image ; ibid. 2016. 1894, obs. P.-M. Le Corre et F.-X. Lucas image ; JCP E. 2015, obs. P. Pétel ; APC 2015-15, n° 262, obs. P. Cagnoli ; Gaz. Pal. 19 janv. 2016, p. 63, obs. C. Lebel), donc potentiellement susceptible de voies de recours. Pour ce faire la haute juridiction retenait que cette décision était susceptible d’affecter les droits des créanciers.

La cour d’appel de Paris, qui fut désignée juridiction de renvoi dans une formation autrement composée, reprenait sa décision initiale dans un arrêt du 10 novembre 2020. Tout en prenant acte de la qualification retenue par la Cour de cassation, elle concluait à nouveau à l’irrecevabilité de la tierce opposition des créanciers, en retenant alors leur absence d’intérêt à former cette voie de recours. Pour ce faire, elle retenait, d’une part, que le jugement arrêtant le plan, tout comme celui le modifiant était passé en force de chose jugée et ne pouvait plus être remis en cause et, d’autre part, que la mission du représentant des créanciers n’avait pas pris fin, dès lors que la procédure de vérification des créances n’était pas allée jusqu’à son terme, les créanciers pouvant dès lors faire admettre leurs créances au passif et les recouvrer, le cas échéant.

C’est cet arrêt qui était l’objet d’un nouveau pourvoi en cassation par les créanciers concernés. Pour rejeter ce pourvoi, la chambre commerciale de la Cour de cassation rappelle qu’en vertu de l’article L. 621-79 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, le plan de continuation doit prévoir le règlement de toutes les créances déclarées, même si elles sont contestées. Elle en déduit que « lorsque le plan est arrivé à son terme, les créances déclarées qui n’ont pas été inscrites au plan peuvent être recouvrées par l’exercice par le créancier de son droit de poursuite individuelle ». Enfin,...

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Nouvelles précisions sur la tierce opposition du jugement constatant le bon achèvement du plan

Est irrecevable faute d’intérêt la tierce opposition d’un jugement constatant la bonne exécution du plan, formée par un créancier exclu du plan à raison de la contestation de sa créance. Une telle créance peut néanmoins être recouvrée par l’exercice par le créancier de son droit de poursuite individuelle.

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L’office de l’huissier significateur à l’épreuve des boîtes aux lettres

En l’espèce, une assignation en paiement est délivrée à la requête d’une banque (créancière au titre d’un cautionnement) à l’un des époux codébiteurs d’un prêt. La signification s’effectue selon les modalités de l’article 656 du code de procédure civile dans les circonstances suivantes : l’huissier de justice se rend à l’adresse qui lui est communiquée par la banque, constate que le nom du destinataire figure sur la boîte aux lettres (et vraisemblablement que celui-ci est absent, personne d’autre n’acceptant, en outre, de recevoir l’acte au domicile). Dans ces conditions, il laisse un avis de passage et conserve l’acte à son étude, à charge pour le destinataire de venir le récupérer.

Hélas, les époux se sont séparés. L’épouse, destinataire de la signification, ne réside plus à l’adresse à laquelle la signification a été effectuée. Elle n’a pas connaissance de l’acte signifié et ne comparaît pas en première instance. Condamnée par jugement réputé contradictoire, elle relève appel de la décision et demande l’annulation du jugement en raison de la nullité de l’assignation introductive d’instance pour irrégularité de la signification. La cour d’appel refuse de prononcer l’annulation du jugement et condamne la débitrice à régler diverses sommes.

Un pourvoi est formé par la débitrice. La Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel en ce qui concerne le refus d’annuler l’assignation. Elle rappelle que « la seule mention, dans l’acte de l’huissier de justice, que le nom du destinataire de l’acte figure sur la boîte aux lettres, n’est pas de nature à établir, en l’absence de mention d’autres diligences, la réalité du domicile du destinataire de l’acte » et relève que la cour d’appel n’a pas constaté « que l’acte de l’huissier de justice comportait d’autres mentions que celle relative au nom figurant sur la boîte aux lettres ». Cette cassation entraîne par voie de conséquence celle des autres chefs de dispositif, ceux-ci ayant un lien de dépendance nécessaire avec celui du refus d’annulation (C. pr. civ., art. 624).

Cet arrêt rendu par la deuxième chambre civile le 8 septembre 2022 donne l’occasion d’opérer un rappel sur la rigueur de l’office de l’huissier significateur et d’apporter quelques précisions quant à la valeur de la stratégie du débiteur défendeur.

La rigueur de l’office de l’huissier significateur

Trois séries d’observations peuvent être faites quant au rappel de la rigueur de l’office de l’huissier dans le cadre de la signification à domicile.

D’abord, sur la rigueur. Le recours à la signification a pour but de maximiser les chances que le destinataire prenne connaissance de l’acte signifié par rapport à une notification par voie postale. C’est la raison pour laquelle il est attendu de l’huissier des vérifications supérieures à celles auxquelles se livrerait la Poste. En particulier, il doit prioritairement tenter de remettre l’acte à la personne du destinataire (C. pr. civ., art. 654). Lorsque cela est impossible, la signification peut être pratiquée à domicile au lieu où demeure le destinataire (C. pr. civ., art. 655, 656, 689). La réalité du domicile doit alors être scrupuleusement vérifiée. Le terme de « vérifications » figure au pluriel dans l’article 656 du code de procédure civile, de sorte que plusieurs vérifications sont requises. Ces vérifications doivent être relatées dans l’acte de signification (C. pr. civ., art. 655, 656), qui doit se suffire à lui-même (C. pr. civ., art. 663), conséquence du caractère solennel des actes dressés par l’huissier (en ce sens, C. Bléry, Conditions de formation et communication des actes de procédure, in S. Guinchard [dir.], Droit et pratique de la procédure civile, 10e éd., 2021, Dalloz Action, n° 271.31). À ce titre, la Cour de cassation avait déjà jugé que l’acte de signification ne pouvait pas se contenter de mentionner que le nom du destinataire figurait sur la boîte aux lettres (Civ. 2e, 15 janv. 2009, n° 07-20.472 P, D. 2009. 378 image ; ibid. 757, chron. J.-M. Sommer et C. Nicoletis image ; ibid. 2010. 169, obs. N. Fricero image ; 20 avr. 2017, n° 16-12.393 ; 4 mars 2021, n° 19-25.291 P, D. 2021. 530 image

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L’office de l’huissier significateur à l’épreuve des boîtes aux lettres

La seule mention, dans l’acte de signification dressé par l’huissier de justice, que le nom du destinataire de l’acte figure sur la boîte aux lettres, n’est pas de nature à établir, en l’absence de mention d’autres diligences, la réalité du domicile du destinataire de l’acte.

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Calcul de la pension de retraite : l’influence (très) limitée de la protection de l’article 1[SUP]er[/SUP] du 1[SUP]er[/SUP] protocole additionnel

Les dispositions de l’article R. 173-15 du code de la sécurité sociale prévoyant que les majorations de durée d’assurance sont accordées par priorité par le régime général lorsque l’assuré a été affilié à plusieurs régimes au cours de sa carrière se bornent à fixer une règle de coordination entre les régimes, ne portent pas une atteinte à la substance des droits des assurés et ne constituent donc pas une ingérence dans le droit à pension garanti par l’article 1er du 1er protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme.

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L’Agent judiciaire de l’État ne peut pas toujours représenter l’État !

L’Agent judiciaire de l’État a seul pouvoir pour représenter l’État lorsqu’est formée une demande tendant à faire déclarer l’État créancier ou débiteur pour des causes étrangères à l’impôt et au domaine. Il n’a donc pas qualité pour représenter l’État lorsqu’est ordonnée une mesure d’instruction préventive sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile.

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L’Agent judiciaire de l’État ne peut pas toujours représenter l’État !

L’Agent judiciaire de l’État a seul pouvoir pour représenter l’État lorsqu’est formée une demande tendant à faire déclarer l’État créancier ou débiteur pour des causes étrangères à l’impôt et au domaine. Il n’a donc pas qualité pour représenter l’État lorsqu’est ordonnée une mesure d’instruction préventive sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile.

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L’assurance dommages-ouvrage avant réception : une exception sous conditions

La mobilisation des garanties souscrites auprès de l’assureur dommages-ouvrage, en cas de survenance de dommages de nature décennale avant la réception, est, notamment, conditionnée par la mise en demeure préalable et infructueuse de l’entrepreneur de s’exécuter.

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Le plan ne met pas fin à la suspension des poursuites individuelles

Lorsqu’une action tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent est en cours à l’ouverture de la procédure, elle est reprise de plein droit après déclaration du créancier, mais elle ne peut tendre qu’uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

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Injonction de payer européenne et délais covid

La Cour de justice de l’Union européenne se prononce, pour la première fois, sur l’incidence en droit de l’Union européenne des dispositions spéciales mises en place par les législateurs nationaux au début de la pandémie de covid afin d’aménager les délais de procédure.

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Conservation des données : la Cour de justice de l’Union européenne persiste et signe

Inébranlable. La Cour de justice de l’Union européenne ne veut toujours pas, sauf cas très particulier, permettre aux États de conserver de façon généralisée les données de connexion des communications électroniques, même pour une courte durée.

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Lutte contre le blanchiment des capitaux et demande de dommages-intérêts

Dans un arrêt publié au Bulletin en date du 21 septembre 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation rappelle la portée des obligations de vigilance et de déclaration imposées aux organismes financiers et la conséquence de leur violation.

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Bouclier pour les loyers d’habitation : ça se Corse !

Un arrêté du 21 septembre 2022, d’application de la loi « pouvoir d’achat », précise les modalités d’adaptation en Corse du plafonnement de la variation de l’indice de référence des loyers (IRL).

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Un arrêté du 21 septembre 2022, d’application de la loi « pouvoir d’achat », précise les modalités d’adaptation en Corse du plafonnement de la variation de l’indice de référence des loyers (IRL).

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Caractérisation du délit de favoritisme et détermination du préjudice subi

La chambre criminelle précise dans un arrêt remarqué du 7 septembre dernier que le délit de favoritisme n’exige pas que la personne poursuivie soit intervenue, en fait ou en droit, dans la procédure d’attribution d’une commande publique.

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Concurrence déloyale, contrefaçon de marque et liberté de commerce et d’industrie

D’anciens concessionnaires ayant poursuivis l’exploitation de la marque qu’ils avaient antérieurement en licence (en la reproduisant dans le code source de leur site web et en exploitant un sigle proche à titre d’enseigne commerciale) ont été assignés par leur ex-concédant en concurrence déloyale devant le tribunal de commerce. Opposant d’abord l’incompétence du tribunal saisi, puis le caractère générique de leur sigle, ce contentieux interroge tant sur le périmètre de l’action en concurrence déloyale, que sur l’utilisation de la marque d’un tiers dans le code source d’un site web et la distinctivité des signes en litige dans le cadre d’une action en concurrence déloyale.

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Responsabilité parentale : compétence en cas de transfert de la résidence

La Cour de justice se penche sur la détermination du juge compétent en matière de responsabilité parentale, lorsque la résidence de l’enfant est transférée d’un État membre de l’Union vers un État tiers.

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Déchéance de garantie : encore faut-il qu’elle ait été acceptée par l’assuré

La déchéance de garantie est une sanction conventionnelle, qui peut être librement stipulée par les parties. Elle n’en demeure pas moins soumise à conditions : il convient notamment de démontrer que l’assuré avait eu connaissance de la clause de déchéance et l’avait acceptée.

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Recevabilité d’un moyen et action oblique

Dans un arrêt rendu le 21 septembre 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation rappelle l’importance d’utiliser la voie oblique pour critiquer le rejet d’une demande formée par une autre partie dans le lien d’instance.

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Le droit d’asile et les aléas de la procédure administrative

Le Conseil d’État a refusé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative à l’article L. 531-16 du CESEDA qui ne prévoit pas de dérogation à la possibilité ouverte à l’OFPRA de mener l’entretien individuel avec le demandeur d’asile sans la présence d’un avocat, dans le cas où l’avocat d’un demandeur incarcéré et dont l’entretien se déroule par visioconférence n’a pu se rendre au centre pénitentiaire pour un motif indépendant de la volonté du demandeur.

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Éric Dupond-Moretti face à lassitude des greffiers

Alors que le ministre présentait hier un budget historique, avec une augmentation de 1 000 € brut pour les magistrats, les greffiers attendaient eux aussi un geste salarial. Le ministre a évoqué hier une augmentation de 12 % sur trois ans. Les motifs de grogne des greffiers restent nombreux.

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La crise énergétique plombe le budget 2023

Face à la crise énergétique, le projet de loi de finances pour 2023 veut faire retomber la pression inflationniste, quitte à devoir porter des contradictions diverses.

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Loyers commerciaux au 2[SUP]e[/SUP] trimestre 2022 : l’ICC, l’ILAT et l’ILC toujours en forte hausse

Au deuxième trimestre 2022, l’ICC, l’ILAT et L’ILC continuent à crever tous les plafonds.

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Cautionnement, abus de dépendance économique et disproportion

Malgré la toute récente réforme issue de l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 qui vient de fêter sa première bougie, le droit des sûretés personnelles antérieur au 1er janvier 2022 reste, aujourd’hui encore, celui de la majorité des cautionnements en circulation en France. Par conséquent, les arrêts qui statuent sur les règles du droit ancien doivent retenir toute l’attention de la pratique tant civiliste qu’affairiste. L’arrêt rendu par la chambre commerciale le 21 septembre 2022 croise, dans cette optique, deux problématiques importantes de ce droit antérieur : celle de la disproportion du cautionnement et celle, plus rare, de la nullité pour violence et, plus précisément, pour abus de dépendance économique. Rappelons les faits pour comprendre comment la situation a pu se présenter devant la Cour de cassation. Une société ouvre, le 25 janvier 2011, un compte auprès d’un établissement bancaire. Par acte du 29 août 2013, une personne physique se rend caution des engagements de celle-ci et ce dans la limite du 360 000 €. La société débitrice principale est, peu de temps après, mise en redressement puis en liquidation judiciaires. Le créancier assigne donc la caution en paiement des sommes non réglées. Mais celle-ci lui oppose la nullité de son engagement ainsi que sa disproportion, à titre subsidiaire. À hauteur d’appel, les juges du fond rejettent l’abus de dépendance économique et donc la nullité du contrat. Ils relèvent également qu’il n’y avait pas de disproportion de l’engagement ainsi souscrit en s’appuyant sur la fiche de renseignement remplie par le garant. Voici notre caution qui se pourvoit en cassation. Elle reproche à ce raisonnement une double violation de la loi. La première concernerait l’abus de dépendance économique : pour le demandeur au pourvoi, les juges du fond ne pouvaient pas se fonder sur des circonstances postérieures à l’échange des consentements. La seconde concernait la disproportion du cautionnement et la fameuse fiche de renseignements qui était selon le demandeur au pourvoi au moins partiellement inexact.

Le pourvoi est rejeté sur les deux chefs d’argumentation que nous venons de citer. Nous allons examiner pourquoi ce rejet s’imposait dans cette affaire mêlant des thématiques plurielles.

De l’appréciation de l’abus de dépendance économique

Le premier ressort argumentatif utilisé par le demandeur au pourvoi reposait sur l’appréciation de l’abus de dépendance économique qu’il alléguait et ce depuis la première instance. Il estime, devant la Cour de cassation, que c’est au moment où le consentement est donné qu’il convient de se placer pour déterminer si l’acte juridique doit être anéanti ou non. La situation était la suivante selon la rédaction du moyen : la société débitrice principale avait bénéficié pendant plusieurs années de larges facilités de caisse. Or, il a été demandé à la personne physique qui allait devenir la caution son engagement personnel à garantir les dettes de la société « sous la menace implicite de mettre fin à ces facilités » (§ n° 2) puisque le compte courant affichait un découvert de la somme de 254 513,02 €. Il n’en fallait guère plus pour le demandeur au pourvoi pour penser que le raisonnement des juges du fond était donc maladroit. En prenant en compte la situation selon laquelle le compte bancaire était redevenu créditeur deux mois après l’engagement, la décision n’aurait donc pas suffisamment été rigoureuse dans le moment d’appréciation de la violence économique alléguée selon le pourvoi.

La chambre commerciale refuse ce raisonnement en jugeant que la cour d’appel « pouvait prendre en compte l’évolution des comptes de la société dans les semaines ayant suivi le cautionnement litigieux afin d’apprécier la réalité de sa situation de dépendance économique à la date où ce cautionnement a été donné » (nous soulignons). On comprend de cette motivation que l’intérêt d’une telle démarche était de mettre en exergue la situation de dépendance économique pour savoir si, au moment où le contrat a été conclu, cette dépendance diffuse dans le temps avait exercé une pression ayant conduit à un consentement vicié. Le choix du verbe pouvoir est probablement à dessein : l’argumentation des juges du fond aurait pu par ailleurs se fonder sur d’autres éléments.

Sur le fond, la chambre commerciale rappelle que les juges du fond ont bien retenu qu’aucune preuve d’une dépendance économique n’était établie. La solution est donc dans la plus stricte orthodoxie de la théorie générale du contrat tout en apportant une dose de souplesse aux situations juridiques envisagées : les juges du fond peuvent prendre en compte un continuum de situations autour de l’acte pour déterminer si l’état de dépendance économique existe ou non (ici, l’évolution du compte de la société passant du statut de débiteur au statut de créditeur quelques semaines le cautionnement). On comprend l’intérêt de cette solution notamment quand on se rappelle l’important arrêt rendu à propos de l’abus de dépendance économique l’année dernière à propos des honoraires d’avocat (Civ. 2e, 9 déc. 2021, n° 20-10.096 F-P+B, Dalloz actualité, 13 déc. 2021, obs. C. Hélaine ; D. 2022. 384 image, note G. Chantepie image ; ibid. 310, obs. R. Boffa et M. Mekki image ; Just. & cass. 2022. 221, rapp. F. Besson image ; ibid. 228, avis S. Grignon Dumoulin image ; AJ fam. 2022. 8, obs. F. Eudier image ; RTD civ. 2022. 121, obs. H. Barbier image). Nul doute que ce style de raisonnement essaime donc, ces temps-ci, dans les stratégies développées par les avocats. La précision sera donc utile pour les plaideurs : l’appréciation de l’abus de dépendance s’apprécie bien au jour où le cautionnement est donné mais n’empêche pas de prendre en compte certains éléments contextuels à proximité de l’acte pour apprécier la réalité de la situation de dépendance économique. De l’art de la nuance, donc.

Sur l’appréciation de la disproportion, la solution est plus classique.

De l’appréciation de la disproportion du cautionnement

Si sa demande de nullité ne pouvait être accueillie, la caution avait formé une demande subsidiaire sur la disproportion de l’acte conclu. Elle estimait que la fiche de renseignement remplie comportait des anomalies si bien que les juges du fond devaient vérifier la réalité du patrimoine sans pouvoir se fonder sur cette seule fiche de renseignements.

La chambre commerciale refuse purement et simplement ce raisonnement. Elle rappelle le travail minutieux des juges du fond ayant relevé que la caution avait certifié de l’exactitude des renseignements. Elle estime encore, qu’il n’y a lieu à aucune cassation quand la cour ne détecte aucune disproportion en se fondant sur les éléments exacts de la fiche litigieuse. On se rappelle, qu’en la matière, les juges du fond doivent veiller à ne pas se fonder sur une fiche de renseignements comportant des anomalies apparentes. Ici, tel n’était pas le cas : les éléments qui n’étaient affectés d’aucune erreur matérielle apparente permettait d’apprécier la situation patrimoniale de la caution et donc de vérifier si l’engagement était disproportionné ou non.

Précisément, le problème portait sur l’inexactitude de certains éléments précis mais qui s’ajoutaient à d’autres dont l’exactitude ne posait pas question (notamment un contrat d’assurance-vie, un portefeuille boursier et plusieurs dépôts sur des comptes bancaires pour un montant de 980 000 €). La chambre commerciale estime, à raison selon nous, que ces éléments dont il est constant qu’ils sont exacts suffisent déjà s’assurer que le cautionnement n’est pas manifestement disproportionné (§ n° 7). Voici donc là où l’on voit que l’appréciation de la disproportion du cautionnement peut être souple tant que les éléments sur lesquels se fonde le juge pour en contrôler la substance sont exempts de défauts apparents et ce même si d’autres éléments portent à discussion.

L’arrêt du 21 septembre 2022 est donc original en ce qu’il mêle une thématique rare (l’abus de dépendance économique) à une problématique plus commune (la disproportion du cautionnement). Sa publication au Bulletin permet de confirmer ces solutions déjà connues en la matière.

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Cautionnement, abus de dépendance économique et disproportion

Dans un arrêt rendu le 21 septembre 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation apporte d’utiles précisions sur l’appréciation de l’état de dépendance économique et sur l’appréciation de la disproportion du cautionnement.

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Comment instruire et juger une demande « en la forme des référés » ?

Légiférer est un art difficile ! Telle pourrait être la morale de l’avis rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 14 septembre 2022.

Il n’y a pas si longtemps les textes regorgeaient de demandes qui devaient être instruites et jugées « en la forme des référés ». La formule, maintes fois critiquée, était trompeuse et ce fût une bonne chose que l’article 38 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice autorise le gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures nécessaires pour modifier les dispositions régissant les procédures en la forme des référés devant les juridictions judiciaires aux fins de les unifier et d’harmoniser le traitement des procédures au fond à bref délai (Y. Strickler, De la forme des référés à la procédure accélérée au fond, JCP 2019. 928). L’ordonnance n° 2019-738 du 17 juillet 2019 et le décret n° 2019-1419 du 20 décembre 2019 entreprirent donc de préciser le régime et le champ d’application de cette procédure accélérée au fond : ils tentèrent d’inventorier l’ensemble des textes mentionnant qu’une demande devait être jugée et instruite en la forme des référés pour préciser si elle devrait l’être désormais selon la procédure de référé, la procédure sur requête, la procédure de droit commun ou la procédure accélérée au fond.

Ce recensement des textes qui prescrivaient d’instruire et de juger une demande en la forme des référés était fastidieux et, inévitablement, exposait au risque d’un oubli (Y. Strickler, Les procédures rapides (procédure accélérée au fond, procédures d’urgence), Procédures 2020. Étude 7, n° 5). C’est précisément ce qui est arrivé à l’article 17 de l’ordonnance n° 45-770 du 21 avril 1945 portant deuxième application de l’ordonnance du 12 novembre 1943 sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l’ennemi : ce texte indique que toutes les demandes formées en application de l’ordonnance devaient être soumises au président du tribunal civil ou du tribunal de commerce « statuant en la forme des référés ». Certes, comme l’a relevé la Cour de cassation dans l’avis commenté, l’article 28 de l’ordonnance n° 2019-738 prévoit de manière générale que le président du tribunal judiciaire devra désormais connaître selon la procédure accélérée au fond des litiges attribués par conventions internationales ; mais l’ordonnance de 1945 n’est pas une convention internationale. Il y avait bel et bien un oubli qu’il fallait combler.

La Cour de cassation aurait pu rendre un avis un brin provocateur. On sait, en effet, que le président du tribunal judiciaire n’a en principe vocation à statuer selon la procédure accélérée au fond que dans les cas prévus par la loi ou le règlement (COJ, art. L. 213-2 ; v. égal., C. pr. civ., art. 481-1). Sauf en matière d’indivision (Civ. 1re, 15 févr. 2012, n° 10-21.457 P, Dalloz actualité, 21 mars 2012, obs. S. Prigent ; D. 2012. 553 image ; 20 mai 2009, nos 07-21.679, Larrivière (Epx) c/ Foncia Chablais (Sté), D. 2009. 1536 image ; ibid. 2058, chron. P. Chauvin, N. Auroy et C. Creton image et 08-10.413), c’était d’ailleurs en suivant scrupuleusement les textes que la Cour de cassation avait pu identifier les demandes qui devaient être instruites en la forme des référés (M. Foulon et Y. Strickler, Les référés en la forme, Dalloz, 2013, n° 11.14). Parce que l’article 17 de l’ordonnance n° 45-770 du 21 avril 1945 ne prévoit pas expressément le recours à la procédure accélérée au fond, la Cour de cassation aurait pu décider qu’il convenait de lui appliquer la procédure de droit commun (comp., Civ. 1re, 15 févr. 2012, n° 10-21.457 P, Dalloz actualité, 12 mars 2012, obs. S. Prigent).

Une telle lecture aurait cependant occulté l’intention du législateur et la Cour de cassation a justement préféré recourir à une interprétation téléologique (v. déjà, Civ. 2e, avis, 8 juill. 2022, n° 15008 P, Dalloz actualité, 17 juin 2021, obs. R. Laffly ; Légipresse 2014. 396 et les obs. image ; ibid. 556, comm. X. Salvat et B. Ader image). Lorsqu’une demande fondée sur l’application de l’ordonnance n° 45-770, le président du tribunal judiciaire décide « au fond », expression un peu vague qui paraît toutefois exclure qu’il statue selon la procédure de référé ou la procédure sur requête qui ne conduisent qu’au prononcé de décisions provisoires. Il fallait alors déterminer si la demande devait être instruite selon la procédure de droit commun ou selon la procédure accélérée au fond. Pour ce faire, la Cour de cassation a, dans l’avis commenté, opéré un rapprochement. D’un côté, l’ordonnance n° 45-770 du 21 avril 1945 avait, d’après ses motifs, pour finalité de permettre « par une procédure aussi rapide et peu coûteuse que possible, aux propriétaires dépossédés de rentrer légalement en possession de leurs biens, droits ou intérêts ». De l’autre, dans le rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2019-738 du 17 juillet 2019, il était indiqué que le texte tendait à « préserver la philosophie de la procédure « en la forme des référés » dans les matières dans lesquelles il est indispensable de pouvoir disposer d’une voie procédurale permettant d’obtenir un jugement au fond dans des délais rapides ». De ce rapprochement, la Cour de cassation a en déduit que le président du tribunal judiciaire statue selon la procédure accélérée au fond prévue à l’article 481-1 du code de procédure civile lorsqu’il connaît de demandes formées en application de l’article 17 de l’ordonnance n° 45-770 du 21 avril 1945. La solution est tout à fait conforme à l’intention du législateur et l’oubli est finalement sans conséquences dommageables…

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L’associé face à l’ouverture de la procédure collective de sa société : quel(s) recours ?

Le jugement d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire d’une société ne peut pas faire l’objet d’un appel et d’un pourvoi en cassation de la part d’un associé de cette société. À cet égard, il importe peu qu’il soit intervenu volontairement en première instance pour contester la déclaration d’état de cessation des paiements effectuée par la personne morale. Cette intervention, même principale, n’a pas pour effet de lui ouvrir une voie de recours que la loi lui a fermée.

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L’associé face à l’ouverture de la procédure collective de sa société : quel(s) recours ?

Entre des délais d’action réduits et une qualité pour agir triée sur le volet, l’exercice des voies de recours dans le contexte particulier du droit des entreprises en difficulté est un art subtil (v. par ex., Com. 14 sept. 2022, n° 21-11.937 P, Dalloz actualité, 26 sept. 2022, obs. P. Cagnoli ; D. 2022. 1596 image).

La situation de l’associé face au jugement d’ouverture de la procédure collective de sa société en témoigne et c’est ce qu’illustre l’arrêt ici rapporté.

En l’espèce, une SCI a sollicité l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire. Or, l’un de ses associés est intervenu volontairement à l’instance devant le tribunal et a contesté l’état de cessation des paiements de la personne morale. Las, la société ayant été mise en liquidation judiciaire, l’associé a fait appel du jugement d’ouverture.

Les juges du second degré estimeront ce recours irrecevable et l’associé se pourvoit en cassation.

Sans surprise, la Haute juridiction déclare, à son tour, le pourvoi irrecevable au visa de l’article L. 661-1, I, 2°, du code de commerce.

Plus précisément, la Haute juridiction estime que le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire d’une société n’étant pas susceptible d’un appel et d’un pourvoi en cassation de la part d’un associé de cette société, le pourvoi de ce dernier, qui n’invoque aucun excès de pouvoir qu’aurait commis ou consacré la cour d’appel, n’est pas recevable, et ce, peu important qu’il soit intervenu volontairement en première instance pour contester l’état de cessation des paiements déclaré par la débitrice.

Plus précisément, là où l’arrêt est intéressant, c’est qu’il affirme que l’intervention, fût-elle qualifiée de principale, n’a pas pour effet d’ouvrir à l’associé une voie de recours, qui, en tout état de cause, lui est fermée par la loi.

Au demeurant, hormis cette spécificité procédurale, en refusant la voie de l’appel et du pourvoi en cassation à l’associé sur le jugement d’ouverture de la procédure collective de sa société, l’arrêt sous commentaire opère le rappel d’une règle bien établie. Cela étant, c’est ici l’occasion d’identifier les voies de recours qui sont, au contraire, ouvertes à l’associé.

Les voies de recours fermées à l’associé : l’appel et le pourvoi en cassation

L’article L. 661-1 du code de commerce n’ouvre l’appel et le pourvoi en cassation contre le jugement d’ouverture d’une procédure collective qu’aux seules personnes qui y sont visées : le débiteur, le créancier poursuivant, le comité social et économique ou les membres de sa délégation du personnel et le ministère public.

Ainsi la Cour de cassation a-t-elle déjà eu l’occasion de préciser qu’un associé, n’ayant pas la qualité de partie au jugement prononçant la liquidation judiciaire, n’est pas recevable à interjeter appel du jugement d’ouverture de la procédure (Com. 13 juin 2006, n° 05-12.748 NP).

Ce dernier arrêt est extrêmement intéressant pour l’analyse, mais il pourrait quelque peu en brouiller les pistes en ce qu’il semble conditionner l’ouverture de l’appel et du pourvoi en cassation à la qualité de partie au jugement d’ouverture de la procédure collective.

À ce propos, l’on peut s’interroger sur l’incidence, en l’espèce, de l’intervention volontaire de l’associé à l’instance. Plus précisément, la question se pose de savoir si l’intervention volontaire de l’associé n’a pas eu pour effet d’ériger ce dernier au rang de « partie » à l’instance lui ouvrant donc, théoriquement, la voie de l’appel et du pourvoi.

Dans la pureté des notions, l’article 63 du code de procédure civile qualifie l’intervention de « demande incidente » et cette dernière est définie par l’article 66 du même code comme la demande dont l’objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires.

En outre, cette intervention volontaire peut être qualifiée de principale (C. pr. civ., art. 329) ou bien d’accessoire (C. pr. civ., art. 330).

Selon le premier de ces textes, l’intervention est principale lorsqu’elle élève une prétention au profit de celui qui la forme et qu’elle n’est recevable que si son auteur a le droit d’agir relativement à cette prétention. Selon le second texte, l’intervention est accessoire lorsqu’elle appuie les prétentions d’une partie et elle n’est recevable que si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie (pour un exemple d’enjeu lié à cette qualification, Civ. 2e, 14 janv....

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Déploiement et concrétisation des bornes de recharge pour véhicules électriques

Les modalités de déploiement des infrastructures collectives par un gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité sont fixées par un décret du 21 septembre 2022, pris en application des articles L. 353-12 et L. 342-3-1 du code de l’énergie.

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Déploiement et concrétisation des bornes de recharge pour véhicules électriques

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Clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif et notion d’actif « réalisable »

Pour la Cour de cassation, si la fraction saisissable des pensions de retraite du débiteur est concernée par l’effet réel de la procédure collective, le liquidateur doit, pour l’appréhender, mettre en œuvre une procédure de saisie des rémunérations. Or, pour aboutir, cette procédure exige que son initiateur soit muni d’un titre exécutoire. Las, le liquidateur qui ne dispose pas d’un tel titre se trouve empêché d’y recourir. Par conséquent, même en présence de pensions de retraite venant agrémenter l’actif du débiteur, la procédure de liquidation judiciaire peut être clôturée pour insuffisance d’actif.

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Une statue de l’archange Saint-Michel présente un caractère religieux

La cour administrative d’appel de Nantes juge que la statue de l’archange Saint-Michel installée sur une place publique de la commune des Sables-d’Olonne est un emblème religieux et confirme l’injonction du tribunal administratif enjoignant à son maire de procéder à son enlèvement.

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Une statue de l’archange Saint-Michel présente un caractère religieux

La cour administrative d’appel de Nantes juge que la statue de l’archange Saint-Michel installée sur une place publique de la commune des Sables-d’Olonne est un emblème religieux et confirme l’injonction du tribunal administratif enjoignant à son maire de procéder à son enlèvement.

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Des dépens engagés par le consommateur dans le cadre du contrôle des clauses abusives

La Cour de justice de l’Union européenne continue son travail d’interprétation de la directive 93/13/CEE sur la réglementation des clauses abusives. Les renvois préjudiciels sont, ces temps-ci, assez nombreux et c’est dans ce contexte que la Cour de justice a pu rendre deux arrêts le même jour sur cette thématique (v. aussi CJUE 22 sept. 2022, aff. C-335/21, Vicente c/ Delia, à paraître au Dalloz actualité). Dans sa décision Zulima c/ Servicios Prescriptor y Medios de Pagos EFC SAU, la Cour vient examiner une question qui n’intéresse, de prime abord, pas directement les clauses abusives mais qui concerne tous les plaideurs engageant des actions contre des professionnels en vue de réputer non écrites ces clauses. Il s’agit d’un problème de procédure civile : celui des dépens engagés à l’occasion de l’instance. Ces derniers sont, en procédure civile française, supportés par la partie perdant le procès même si des exceptions existent (C. pr. civ., art. 696). On peut raisonnablement estimer que lorsqu’un professionnel succombe sur une thématique de clauses abusives, il est fréquemment condamné aux dépens de l’instance (sauf si chacun supporte ses propres dépens, ce qui peut arriver quand chaque plaideur succombe partiellement). Le consommateur n’a pas, dans ce contexte, alors la charge pécuniaire de la procédure visant à réputer non écrites des clauses abusives. Mais qu’en est-il quand, avant l’issue judiciaire, une voie amiable est trouvée entre le consommateur et le professionnel ? Tel est le problème posé en substance par l’arrêt du 22 septembre 2022 commenté.

Rappelons les faits pour comprendre comment la juridiction de renvoi a été saisie : ces derniers se déroulent en Espagne, dans les îles Canaries. Un consommateur conclut un contrat de crédit à la consommation renouvelable avec un professionnel du crédit par acte du 21 septembre 2016. Moins de quatre ans plus tard, l’emprunteur invoque le caractère usuraire du prêt et souhaite en obtenir la résiliation ainsi que le remboursement par le professionnel des sommes indûment perçues. Le professionnel du crédit refuse de donner satisfaction au consommateur par la voie amiable. Le requérant saisit donc une juridiction, le Juzgado de Primera Instancia n° 2 de Las Palmas de Gran Canaria (le tribunal de première instance de Grande Canarie en Espagne), pour constater la nullité du contrat de crédit en invoquant notamment son caractère usuraire. À titre subsidiaire, il invoque le caractère abusif de la clause relative aux intérêts notamment en raison d’un défaut de transparence du prêteur de deniers. Le recours est jugé recevable. Mais voici que notre professionnel souhaite obtenir la radiation de l’affaire dans le temps imparti pour conclure en faisant valoir que le consommateur aurait obtenu satisfaction par voie extrajudiciaire et qu’il avait pu notamment obtenir la résiliation du contrat de crédit concerné et le remboursement souhaité. Précisons tout de suite qu’en Espagne, si les chefs de demande sont satisfaits en dehors de la procédure, celle-ci est close sans qu’il y ait lieu de statuer sur les dépens de l’instance. Problème : le consommateur n’est pas d’accord avec la radiation de l’affaire en estimant que celle-ci n’était pas fondée au principal. Ce dernier précise qu’il n’a pas pu obtenir la nullité du contrat et qu’il souhaite obtenir à son profit la condamnation du professionnel aux dépens puisque celui-ci n’avait pas souhaité le rembourser pendant la phase amiable.

Voici la juridiction bien embarrassée : elle remarque que le demandeur à l’action a obtenu satisfaction par voie extrajudiciaire. Les chefs de demandes sont satisfaits en dehors de la procédure puisque le consommateur a pu obtenir la résiliation du contrat et le remboursement des sommes indûment versées. L’embarras vient d’une règle issue du droit espagnol empêchant les juridictions de condamner l’une ou l’autre des parties aux dépens quand celles-ci ont trouvé une issue extrajudiciaire à l’instance en cas notamment de protocole transactionnel. En outre, elle n’est pas autorisée à prendre en compte l’existence de mises en demeure antérieures à la procédure judiciaire pour apprécier si le professionnel est de mauvaise foi. C’est de ces points que le renvoi préjudiciel est né. Le Juzgado de Primera Instancia n° 2 de Las Palmas de Gran Canaria décide donc de surseoir à statuer.

La juridiction de renvoi a posé à la Cour de justice la question préjudicielle suivante :

Dans le cadre des recours de consommateurs contre des clauses abusives, fondés sur la [directive 93/13], en cas de satisfaction extrajudiciaire de ces consommateurs, l’article 22 de la [LEC] prévoit que lesdits consommateurs doivent supporter les dépens de l’instance, et ce indépendamment du comportement adopté antérieurement par le professionnel concerné, qui n’a pas donné suite aux mises en demeure préalables. Cette réglementation espagnole en matière de procédure constitue-t-elle un obstacle significatif susceptible de dissuader les mêmes consommateurs d’exercer leur droit à un contrôle juridictionnel effectif du caractère potentiellement abusif d’une clause contractuelle, obstacle qui serait contraire au principe d’effectivité ainsi qu’à l’article 6, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE ?

La Cour de justice répond à cette question délicate en essayant de préserver l’autonomie procédurale des États tout en liant, comme à l’accoutumée, la question au principe d’effectivité et au principe d’équivalence. Notons, à titre liminaire, la présence d’un problème épineux de compétence ainsi qu’un problème de recevabilité. Ce sera le plan de notre étude.

Une immixtion discutée dans la réglementation procédurale d’un État membre

Les arrêts répondant aux renvois préjudiciels posés par les juridictions nationales en matière de clauses abusives n’ont que des développements assez rapides sur la question de la compétence et de la recevabilité de la question posée. Ici, les paragraphes nos 17 à 24 (sur la compétence) et nos 25 à 31 (sur la recevabilité) sont particulièrement développés et pour cause : le gouvernement espagnol était assez fermement opposé à ce que la Cour de justice de l’Union se penche sur la question car il considérait que le renvoi était tout à la fois hors du champ de compétence de l’Union et qu’il doutait de l’interprétation faite du droit interne par la juridiction de renvoi. Nous allons examiner pourquoi cette interrogation liminaire permet de se rendre compte du niveau de protection imposé par la Cour de justice de l’Union européenne en matière de clauses abusives.

Sur la question de la compétence, bien évidemment c’est à la Cour de justice de vérifier sa propre compétence comme une jurisprudence constante l’exige. Le problème était épineux car il est tout à fait exact que la question des dépens concerne le droit judiciaire privé espagnol, domaine qui ne devrait pas pouvoir intéresser le droit de l’Union. Mais la Cour de justice sauve sa compétence en rappelant que l’enjeu procédural est directement lié à la thématique de clause abusive issue de la directive 93/13/CEE : le but est de savoir si la règle procédurale « peut constituer un obstacle substantiel susceptible de décourager les consommateurs d’exercer leurs droits, en violant des dispositions du droit de l’Union, à la lumière du principe d’effectivité » (§ n° 21 de l’arrêt). La Cour rappelle alors sa jurisprudence sur les injonctions de payer et cite toute une panoplie d’arrêts récents où elle a pu déployer cette analyse et détecter des procédures dissuasives pour les consommateurs (la Cour cite, 14 juin 2012, aff. C‑618/10, Banco Español de Crédito, pt 54, Dalloz actualité, 15 juill. 2012, obs. Caroline Fleuriot ; D. 2012. 1607 image ; ibid. 2013. 945, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud image ; RTD eur. 2012. 666, obs. C. Aubert de Vincelles image ; 18 févr. 2016, aff. C-49/14, Finanmadrid EFC, pt 52 ; 13 sept. 2018, C-176/17, Profi Credit Polska, pt 69, D. 2019. 607, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud image). La question de la compétence est donc ici réglée à la double satisfaction du principe d’équivalence et du principe d’effectivité (§ n° 23). Le renvoi préjudiciel ne vise pas à étudier la règle procédurale en elle-même mais à vérifier si elle ne fait pas obstacle à la protection contre les clauses abusives. Nuance légère mais importante, en somme.

Sur la question de la recevabilité de la question préjudicielle, le requérant et le gouvernement espagnol arguaient d’une correction jurisprudentielle des textes du LEC. Ils estiment qu’un « critère de correction » permettrait de prendre en compte la mauvaise foi du professionnel et du défendeur et de condamner celui-ci aux dépens même en cas de satisfaction extrajudiciaire empêchant normalement cette condamnation. La Cour de Justice rappelle bien qu’elle est incompétente pour interpréter le droit national (§ n° 26), motif récurrent de ses décisions. Elle précise que le rejet d’une demande de décision préjudicielle n’est possible que si l’interprétation demandée n’a pas de rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal ou quand le problème est de nature hypothétique. La Cour peut également juger la question irrecevable quand elle ne dispose pas assez d’éléments en fait et en droit pour y répondre. Le paragraphe n° 28 sonne le glas de cette argumentation en rappelant que ce n’est pas le cas ici : la question est donc recevable. Était-elle nécessaire ? La question se discute en droit espagnol.

La compétence et la recevabilité permettent de montrer que même à propos d’un objet aussi éloigné de la compétence de l’Union (le droit procédural des États membres), la Cour de justice arrive à pouvoir sauvegarder la question posée par la juridiction de renvoi. Ceci lui permet, chemin faisant, de glaner un terrain rarement devant elle et périphérique aux clauses abusives, celui de la procédure qui est le cadre juridictionnel du contrôle de la protection du consommateur contre celles-ci.

Le fond présente un degré d’intérêt tout aussi important pour les spécialistes de droit de la consommation.

Un contrôle nuancé de la réglementation procédurale sur les dépens

La question permet de déterminer si des législations nationales peuvent ne pas permettre la condamnation aux dépens du professionnel quand le consommateur a pu trouver une issue favorable à ces demandes dans le cadre extrajudiciaire. La difficulté est, en droit espagnol, de l’impossibilité, au moins selon la juridiction de renvoi, de prendre en compte le comportement du professionnel qui n’avait pas répondu aux mises en demeure adressées avant la saisine de la juridiction pour le condamner aux dépens de l’instance qui se solde par voie amiable.

Les paragraphes nos 34 à 38 permettent de justifier – une dernière fois si nécessaire – la compétence de la Cour dans le contrôle opéré pour répondre à la juridiction de renvoi. La question des dépens, en ce qu’elle dépend (sans mauvais jeu de mot) de la procédure nationale de chaque État membre, ne devrait pas pouvoir être dans le champ de son contrôle. Mais ici, les principes d’effectivité et d’équivalence lui permettent de s’y intéresser pour savoir si le contrôle des clauses abusives peut être correctement réalisé eu égard à cette question. La Cour de justice cite donc son arrêt Caixabank et Banco Bilbao Vizcaya Argentaria (CJUE 16 juill. 2020, aff. C-224/19 et C-259/19, pt 98, D. 2020. 1516 image ; ibid. 2021. 594, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud image) pour rappeler avec force que la répartition des dépens peut être un des obstacles procédural susceptible de décourager les consommateurs de pouvoir bénéficier de la protection contre les clauses abusives.

Or, le point faisant difficulté est un peu différent dans la question posée dans l’arrêt du 22 septembre 2022. Dans le droit espagnol, le consommateur engageant une action visant à annuler une clause abusive (en France, à la réputer non écrite) doit supporter ses propres dépens quand une issue extrajudiciaire est trouvée. La Cour de justice, sans le dire tout à fait explicitement, condamne cette pratique au paragraphe n° 41 en y voyant un de ces obstacles substantiels de nature à empêcher le consommateur de profiter de la réglementation issue du droit de l’Union. Or, comme le rappelle le gouvernement espagnol, un « principe de correction » prétorien est dégagé par les juridictions en la matière permettant de condamner le professionnel aux dépens en pareille situation quand il est démontré que ce dernier est de mauvaise foi. Dans notre affaire, la question se discute mais il est constant que le professionnel n’a pas répondu aux sollicitations amiables avant la saisine du juge. Ce n’est que sous la pression de cette saisine qu’il a pu proposer une issue amiable. Sa mauvaise foi pourrait donc permettre aux juridictions de renvoi de le condamner aux dépens et donc de permettre au consommateur de ne pas supporter toute une série de dépenses… même si en l’état aucune annulation n’a été prononcée. C’est l’effet comminatoire de la protection contre les clauses abusives qui est à l’œuvre. Mais il n’en reste pas moins que même à ce stade précoce, certains frais ont été engagés.

La réponse est donc teintée de nuances. Une réglementation nationale peut laisser le consommateur supporter ses propres dépens quand une issue extrajudiciaire au litige sur une clause abusive est trouvée. Mais elle doit impérativement permettre au juge de tenir compte de l’éventuelle mauvaise foi du professionnel et, le cas échéant, lui laisser la possibilité de condamner ce dernier aux entiers dépens. Voici une précision fort utile ! En droit français, la question posera certainement moins de difficultés (v. sur ceci , Rép. civ., v° Désistement, par Y. Strickler, 2021, n° 149).

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Des dépens engagés par le consommateur dans le cadre du contrôle des clauses abusives

Dans un arrêt du 22 septembre 2022, la Cour de justice de l’Union européenne vient préciser que le consommateur peut supporter ses propres dépens quand il obtient satisfaction par voie extrajudiciaire à condition que le juge puisse tenir compte de la mauvaise foi du professionnel.

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Congé délivré par LRAR : l’irrégularité ne fait pas un pli !

N’est pas régulièrement donné le congé d’un bail d’habitation délivré par lettre recommandée avec demande d’avis de réception revenue à son expéditeur avec la mention « pli avisé et non réclamé ».

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Congé délivré par LRAR : l’irrégularité ne fait pas un pli !

« Baux d’habitation : bannissez la lettre recommandée ! » Cette supplique adressée par la doctrine à la fin du siècle dernier aux contractants et à leurs conseils n’a pas pris une ride (J.-P. Blatter, AJDI 1997. 192 image).

Remise de la lettre à son destinataire

La raison de cette défiance envers ce mode de remise est à rechercher à l’alinéa 3 de l’article 669 du code de procédure civile, qui dispose que « la date de réception d’une notification faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception est celle qui est apposée par l’administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire » (pour des décisions rendues au visa de cet article en matière de bail d’habitation, v. Civ. 3e, 14 déc. 1994, n° 93-12.481, AJDI 1997. 209 image ; ibid. 192, obs. J.-P. Blatter image ; 10 janv. 1996, n° 93-17.725, D. 1996. 369 image, obs. CRDP Nancy II image ; AJDI 1997. 209 image ; ibid. 192, obs. J.-P. Blatter image ; refusant de prendre en considération la date d’arrivée de la lettre au bureau de poste, v. aussi, Civ. 3e, 10 janv. 1996, n° 93-21.097, AJDI 1997. 209 image ; ibid. 192, obs. J.-P. Blatter image ; v. encore not., Civ. 3e, 7 janv. 1998, n° 96-10.326, D. 1998. 35 image ; AJDI 1998. 272 image, obs. J.-P. Blatter image ; RDI 1998. 305, obs. F. Collart-Dutilleul image ; 2 févr. 2005, n° 04-10.219, AJDI 2005. 463 image, obs. Y. Rouquet image ; 24 sept. 2020, n° 19-16.838, D. 2021. 1048, obs. N. Damas image).

Partant, le destinataire de l’envoi à qui la lettre n’est pas « remise » (parce que, absent lors du passage du préposé, il ne va pas retirer le pli à La Poste ou parce qu’il refuse de signer l’avis de réception) est réputé ne pas l’avoir reçue. Et le délai que le courrier est censé faire courir reste … lettre morte.

Stratégies de contournement

Devant cette fragilité consubstantielle de la lettre recommandée avec demande d’avis de réception, les législations spéciales ont adopté diverses stratégies de contournement.

Ainsi, la loi du 6 juillet 1989 permet-elle, en son article 15, que les notifications prennent la forme, certes d’une « LRAR », mais aussi d’une remise en main propre contre récépissé ou émargement, voire d’un acte d’huissier (forme qui, soit dit en passant, aux termes de l’art. 651 du c. pr. civ. est envisageable alors même qu’elle n’est pas expressément prévue ; concernant la sécurité juridique que confère le recours à un huissier, V. Fradin, Dr. et patr. 1/2010. 66). Le texte précise par ailleurs que le délai court « à compter du jour de la réception de la lettre recommandée, de la signification de l’acte d’huissier ou de la remise en main propre » (assimilant la notion de « réception » à celle de « remise effective au locataire », v. Civ. 3e, 13 juill. 2011, n° 10-20.478, Dalloz actualité, 31 août 2011, obs. Y. Rouquet ; D. 2011. 2037, obs. Y. Rouquet image ; ibid. 2012. 1086, obs. N. Damas image ; AJDI 2012. 121 image, obs. N. Damas image).

Plus radicale est l’approche adoptée par les textes en matière de copropriété et de délai de rétractation dans le cadre d’une vente immobilière, puisque tant l’article 64 du décret du 17 mars 1967 (en copropriété) que l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation (relatif à la vente) considèrent que le destinataire a reçu la lettre recommandée avec demande d’avis de réception le lendemain du jour de sa première présentation.

Pli avisé et non réclamé

Au cas particulier, le locataire signataire d’un bail d’habitation estimait être délié de tout engagement à l’égard de son cocontractant à l’issue du congé qu’il avait adressé au bailleur via une LRAR, alors même que la lettre lui était revenue avec la mention « pli avisé et non réclamé ».

En appel, il a obtenu gain de cause, le juge ayant estimé que le congé avait été régulièrement donné pour la date mentionnée dans l’acte.

Si, au regard de ce qui vient d’être exposé, on ne saurait être surpris de la censure opérée par le juge du droit (au visa de l’art. 15 de la loi de 1989), en revanche, on a du mal à s’expliquer comment un tel contentieux a, une fois encore, pu encombrer les prétoires.

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Rapport judiciaire se fondant sur un rapport officieux : nullité… si grief

Dans le cadre d’un litige opposant un locataire à son bailleur, et relatif à la résiliation du bail aux torts de ce dernier, une expertise est ordonnée en référé.

Ne pouvant, pour des raisons météorologiques, accéder au toit de l’immeuble pour constater les désordres, l’expert avait examiné, avec les parties, les documents photographiques annexés à un précédent rapport d’expertise, officieux et non-contradictoire.

Le bailleur s’était prévalu de la nullité de ce rapport d’expertise judiciaire, au motif que l’expert n’avait pas rempli personnellement sa mission, en violation de l’article 233 du code de procédure civile.

La cour d’appel d’Agen ne l’avait pas suivi, et le bailleur n’obtiendra pas une meilleure écoute devant la Cour de cassation qui rejette le pourvoi.

Le rapport d’expertise judiciaire à l’épreuve de la nullité pour vice de forme

La Cour de cassation nous dit que « les irrégularités affectant le déroulement des opérations d’expertise (…) sont sanctionnées selon les dispositions de l’article 175 du code de procédure civile qui renvoient aux règles régissant la nullité des actes de procédure, et notamment aux irrégularités de forme de l’article 114 du code de procédure civile ».

Cela mérite quelques explications, car c’est une nullité soumise à un régime un peu différent des nullités des actes de procédure.

L’irrégularité des opérations d’expertise relève du régime des exceptions de procédure, mais sans pour autant être une exception de procédure, comme nous l’a précisé la Cour de cassation (Civ. 2e, 31 janv. 2013, n° 10-16.910 P, D. 2013. 372 image ; ibid. 2802, obs. P. Delebecque, J.-D. Bretzner et I. Darret-Courgeon image ; ibid. 2014. 795, obs. N. Fricero image ; JCP 2013. 263, note X. Vuitton ; Gaz. Pal. 24-25 mai 2013, p. 27, note Amrani Mekki ; Procédures 2013. Chron. 2, obs. Raschel ; ibid. n° 98, note Perrot ; Dr. et pr. 2013. 55, note Fricero).

En conséquence, et ce rappel ne paraît pas inutile, il n’y a pas lieu de saisir le magistrat de la mise en état en application de l’article 789 du code de procédure civile pour qu’il se prononce sur cette nullité, lequel magistrat de la mise en en état étant déjà bien occupé par ailleurs pour trancher les fins de non-recevoir dont il a hérité.

Et cette nullité présente aussi une particularité, en ce que la sanction pourra être atténuée. En effet, la nullité peut ne pas être intégrale, et ne pas affecter l’ensemble du rapport d’expertise (Civ. 2e, 12 juin 2003, n° 01-13.502 P, D. 2003. 2284 image ; Gaz. Pal. 9-10 juill. 2004, p. 13, obs. du Rusquec).

Pour autant, c’est bien le régime des nullités qui régit l’irrégularité.

Et si l’arrêt précité du 31 janvier 2013 pouvait éventuellement laisser entendre le contraire, l’irrégularité, et donc la nullité, devra être soulevée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir (Civ. 1re, 30 avr. 2014, n° 12-21.484 P, D. 2014. 1040 image ; ibid. 2015. 287, obs. N. Fricero image ; ibid. 649, obs. M. Douchy-Oudot image ; ibid. 1231, obs. M. Bacache, D. Noguéro, L. Grynbaum et P. Pierre image ; AJ fam. 2014. 382, obs. P. Hilt image ; RTD civ. 2014. 936, obs. B. Vareille image ; Gaz. Pal. 10-12 août 2014, p. 33, obs. Leducq ; ibid. 9 sept. 2014, p. 11, note Amrani Mekki ; ibid. 14-16 sept. 2014, p. 35, obs. Casey ; LPA 31 mars 2015, p. 10, note Blaringhem-Lévêque; ibid. 8 mai 2015, p. 14, note YildIrim ; 14 nov. 2018, n° 17-28.529 P, Dalloz actualtié, 11 déc. 2018, obs. A. Hacene et M. Kebir). Hors de question, donc, d’invoquer la nullité « en tout état de cause », et la partie devra donc veiller à ne pas couvrir l’irrégularité en présenter des moyens de défense.

Outre cette antériorité, la nullité, en ce qu’elle relève des nullités pour vice de forme – et nous ne voyons pas comment une nullité de rapport d’expertise pourrait être de fond –, obligera la partie à justifier d’un grief.

Il ne suffit pas à la partie de se prévaloir d’une irrégularité, encore faut-il qu’il existe un grief.

Et c’est là certainement la principale difficulté pour espérer obtenir une nullité.

Pas de grief, pas de nullité

L’expert judiciaire n’avait pas pu accéder au toit pour constater de lui-même les désordres allégués.

Pour pallier à cette impossibilité, temporaire puisqu’elle résultait de la météo au moment des opérations d’expertise, l’expert a examiné les documents photographiques annexés à un rapport d’expertise qui non seulement était amiable, mais surtout n’était pas contradictoire.

Tout de suite, nous pensons à ces rapports d’expertise amiables, ou officieux, dont nous connaissons le peu de poids lorsqu’il s’agit d’administrer la preuve.

Si un tel rapport peut effectivement constituer un élément de preuve, encore faut-il qu’il ait été soumis à la discussion (cette fois contradictoire) des parties. Mais surtout, le juge ne peut fonder exclusivement sa décision sur un tel rapport, même si les parties ont pu en discuter (Cass., ch. mixte, 28 sept. 2012, n° 11-18.710 P, D. 2012. 2317, et les obs. image ; ibid. 2013. 269, obs. N. Fricero image ; ibid. 2802, obs. P. Delebecque, J.-D. Bretzner et I. Darret-Courgeon image ; RTD civ. 2012. 769, obs. R. Perrot image ; RJ com. 2013. 59, obs. V. Vigneau ; Civ. 2e, 7 nov. 2013, n° 12-25.334 P).

C’est au vu d’un tel rapport que le technicien commis a pu établir ses conclusions, et rédiger un rapport d’expertise judiciaire.

En d’autres termes, les documents photographiques, qui jusqu’alors avaient une valeur assez relative, se sont vus accorder le poids accordé à une expertise judiciaire dont on sait que même si elle ne lie pas le juge (C. pr. civ., art. 246), ce dernier a parfois un peu de mal à s’en défaire. Et quiconque part avec un rapport d’expertise défavorable éprouvera le plus grand mal à remonter la pente et à espérer un jugement en sa faveur. Et précisément, la nullité du rapport d’expertise peut permettre cette remontée de pente, d’où l’intérêt de tout mettre en œuvre pour pouvoir utilement invoquer cette nullité.

Il apparaît que l’expert, quant à lui, s’était fondé exclusivement sur cette seule expertise amiable, non contradictoire, pour constater la réalité des désordres. Ce que le juge ne pouvait faire, l’expert le pouvait. Ce procédé revient tout de même à donner une force particulière à un rapport officieux qui jusqu’alors ne valait pas grand-chose devant une juridiction.

Mais voilà, il se trouve que ces documents avaient été examinées avec les parties. Il a donc été soumis à la libre discussion des parties… tout comme l’est le rapport officieux communiqué dans le cadre d’un litige, et qui pourtant ne lui confère pas une autorité permettant au juge de se l’approprier de manière exclusive.

Mais surtout, et c’est certainement là l’essentiel, la partie n’avait pas contesté cette manière de faire de l’expert.

Dans son dire, la partie n’avait pas contesté la réalité des désordres constatés par l’expert avec ces documents photographiques.

En conséquence, en l’absence de contestation de la part de la partie, celle-ci ne peut arguer d’un grief.

Au regard de cet arrêt, il en ressort que la partie aurait dû anticiper cette nullité, et contester le procédé lors des opérations d’expertise. La partie aurait dû refuser que l’expert se fonde sur des éléments d’un rapport officieux.

Ne l’ayant pas fait, et n’ayant pas exigé par exemple de l’expert qu’il revienne aux beaux jours pour accéder au toit, la partie s’était privée de la possibilité de se prévaloir ultérieurement d’une nullité au motif que l’expert n’avait pas accompli personnellement sa mission.

Et pourtant, il n’était pas abusif de soutenir que l’expert n’avait pas satisfait aux dispositions de l’article 233 du code de procédure civile.

Au demeurant, la Cour de cassation ne dit pas l’inverse. Elle ne dit pas que l’expert peut, de cette manière, transformer tout ou partie d’un rapport officieux en un rapport d’expertise judiciaire.

Mais si personne ne le conteste en temps utile, la partie devra se taire à jamais, sans pouvoir arguer d’une quelconque nullité qui autrement avait probablement des chances de prospérer, dès l’instant où il n’est pas discutable que l’expert n’a pas constaté de lui-même la réalité des désordres, faut d’être monté sur le toit (v. pour la nullité d’un rapport alors que l’expert a renvoyé les parties à un rapport concernant la cause des désordres, Civ. 2e, 11 janv. 1995, n° 93-14.697 P).

Il appartient donc aux parties d’être vigilante, lorsque l’expert entend se fonder sur des éléments provenant d’une expertise officieuse, surtout lorsque les conclusions de ce rapport sont contestées.

La nullité du rapport se prépare dès le déroulement des opérations d’expertise.

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De l’importance de l’objet du litige en droit de la consommation

On sait que le droit de la consommation peut souvent apparaître comme un droit d’exception et notamment sur le terrain de la procédure civile. Par exemple, on se rappelle en ce sens de l’inflexion de la règle de l’article 910-4 du code de procédure civile édictant le principe de concentration temporelle des prétentions au sujet des clauses abusives (Civ. 1re, 2 févr. 2022, n° 19-20.640 FS-B, Dalloz actualité, 8 févr. 2022, obs. C. Hélaine ; D. 2022. 277 image ; AJDI 2022. 290 image) ou encore du relevé d’office systématiquement imposé des règles protectrices de la matière (CJUE 11 mars 2020, aff. C-511/17, Dalloz actualité, 30 mars 2020, obs. J.-D. Pellier ; D. 2020. 1394 image, note G. Poissonnier image ; AJ contrat 2020. 292, obs. V. Legrand image ; Rev. prat. rec. 2020. 35, chron. K. De La Asuncion Planes image). L’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 7 septembre 2022 peut s’inscrire dans une logique différente en ce qu’il se rattache directement aux principes essentiels de la procédure civile en invoquant la notion d’objet du litige. Rappelons les faits ayant donné lieu au pourvoi pour comprendre où se situait la difficulté. À l’occasion d’un démarchage, un auto-entrepreneur exerçant une activité de nettoyage automobile signe un bon de commande établi par une société spécialisée dans la communication. Ce bon de commande concerne la parution d’une publicité dans un annuaire. Voici que notre auto-entrepreneur ne règle pas la somme visée dans le bon de commande. La société l’assigne donc en paiement de la somme de 1 264,03 €. Le tribunal judiciaire d’Agens prononce d’office la nullité du contrat sur le fondement de l’article L. 242-1 du code de la consommation puisque le bon de commande ne comportait pas de référence à l’article L. 221-5 du même code et n’était pas accompagné d’un formulaire de rétractation. Ce moyen avait été relevé d’office mais l’entrepreneur avait proposé, le jour de l’audience, de régler progressivement la dette à la société de publicité. Cette dernière se pourvoit en cassation ; taux de ressort oblige. La société ayant établi le bon de commande reproche au jugement d’avoir annulé le contrat alors que l’auto-entrepreneur ne souhaitait pas obtenir la nullité mais régler sa dette de manière progressive.

La première chambre civile casse et annule le jugement attaqué en ces termes : « en statuant ainsi, après avoir relevé que M. [W], qui proposait à l’audience un paiement échelonné de sa dette, ne contestait pas celle-ci dans son principe, le tribunal, qui a modifié l’objet du litige, a violé le texte susvisé...

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De l’importance de l’objet du litige en droit de la consommation

Dans un arrêt en date du 7 septembre 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation rappelle toute l’importance de la détermination de l’objet du litige par les parties et ce même en droit de la consommation dans le contentieux des contrats conclus hors établissement.

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Retour sur l’obligation précontractuelle d’information du distributeur d’assurance

Deux arrêts récents permettent de revenir sur le régime complexe de l’obligation précontractuelle d’information pesant sur les distributeurs d’assurance.

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Retour sur l’obligation précontractuelle d’information du distributeur d’assurance

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Retour sur l’obligation précontractuelle d’information du distributeur d’assurance

Si la transposition récente d’une directive de 2016 (dir. [UE] n° 2016/97 du 20 janv. 2016) par l’ordonnance n° 2018-361 du 16 mai 2018 a conduit au remplacement de la notion d’intermédiaire en assurance (hérité d’une première directive, dir. [CE] n° 2002/92 du 9 déc. 2002, sur l’intermédiation en assurance) par celle de distributeur d’assurance, la fonction de distribution revêt toujours, dans le secteur de l’assurance, une coloration particulière, qui la rapproche plus d’une fonction d’intermédiation. C’est qu’« en raison de la position particulière de l’intermédiaire qui reste tiers au contrat d’assurance, il ne peut être que l’inspirateur des décisions opportunes que prendra l’assuré pour la satisfaction de son besoin d’assurance, connu de l’intermédiaire » (J. Bigot et al., La distribution d’assurance, 3e éd., LGDJ, 2020, p. 835, n° 1158). C’est donc essentiellement au travers de l’exécution d’un devoir d’information et de conseil que le distributeur d’assurance exerce sa fonction. C’est pourquoi, de longue date, la jurisprudence a imposé à ce dernier une obligation précontractuelle d’information fondée sur le droit commun de la responsabilité civile contractuelle (Civ. 1re, 10 nov. 1964, JCP 1965. II. 13981, note P. P.), laquelle a été relayée récemment par une législation spéciale adoptée sous l’influence du droit européen (C. assur., art. L. 520-1, II, 2° issu de la directive de 2002 précité qui a été déplacé et densifié par l’effet de l’ord. du 16 mai 2018 à l’art. L. 521-4 c. assur.). Il en ressort un paysage complexe où cohabitent encore deux corps de règles, jurisprudentielles et légales, et sur lequel plane l’influence européenne. Deux arrêts récents, rendus le 15 septembre 2022 et destinés tous deux aux honneurs de la publication, permettent de revenir sur cette complexité.

Dans la première affaire (n° 21-15.528), un contrat d’assurance est conclu par l’intermédiaire d’un courtier afin de garantir les risques liés à un spectacle de cascade et de rodéo automobiles organisé par une société et son gérant le 15 juillet 2007. Ces derniers reprochent au courtier un manquement à son obligation de conseil dès lors qu’il ne leur aurait pas indiqué que la couverture de l’assurance se limitait aux seuls risques automobiles (ce qui excluait la couverture du sinistre lié à l’électrocution de quatre bénévoles lors de l’installation des équipements).

Dans la seconde affaire (n° 21-13.670, Dalloz actualité, 23 sept. 2022, obs. C. Hélaine ; D. 2022. 1660 image), le contrat d’assurance est conclu, cette fois, par l’intermédiaire d’un établissement de crédit, à l’occasion d’une opération de prêt conclue en 2006. L’emprunteur adhère ainsi à une assurance de groupe destinée à garantir le remboursement de ce prêt en cas de décès ou d’incapacité de travail. Il est cette fois reproché à la banque de ne pas avoir informé l’assuré de l’existence d’une clause excluant la garantie dès lors que le dommage était causé par « les suites médicales ou conséquences d’antécédents de santé mentionnés sur le bulletin d’adhésion ».

Dans les deux affaires, les requérants sont déboutés en appel mais l’arrêt est finalement cassé par le juge du droit. Le rapprochement de ces deux solutions permet de revenir tant sur la question du régime de responsabilité applicable que sur la caractérisation du manquement à l’obligation précontractuelle d’information et sur le préjudice réparable.

Le fondement de la responsabilité

Les deux arrêts commentés permettent, d’abord, d’illustrer deux évolutions caractéristiques qui ont trait au régime de la responsabilité applicable en cas de manquement par le distributeur à son obligation précontractuelle d’information.

On constate, d’une part, un processus de fusion progressive entre le droit commun et le droit spécial, parfaitement illustré par le premier arrêt commenté. Son visa mêle ainsi le droit commun (C. civ., art. 1147 anc. devenu art. 1231-1) et le droit spécial (C. assur., art. L. 520-1, II, 2° anc.) afin d’évoquer la responsabilité du courtier. Il ressort surtout, et d’autre part, du principe exposé par la Cour que la mise en...

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Contrôle de légalité de la réforme de la procédure civile de 2019 : retour vers le futur au Conseil d’État (Première partie : le champ de la confirmation)

La décision du Conseil d’État en date du 22 septembre 2022 relative à la légalité du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile donne le tournis, sinon le vertige (sur ce décret, v. outre les nombreuses références qui suivront, M.-C. Lasserre, Panorama des principales réformes de la procédure civile à la suite de la publication du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile, Gaz. Pal. 7 janv. 2020, p. 13 ; v. égal. le dossier de la Gazette du Palais spécialisée en procédure civile du 28 janv. 2020).

Des vertiges plus exactement. Un premier vertige procède de l’annulation de certaines dispositions du code de procédure civile issues du décret attaqué, entrées en application en 2020 et qui avaient survécu à la frénésie réglementaire contemporaine (C. pr. civ., art. 750-1 en particulier). Un deuxième vertige provient de l’annulation de certaines dispositions transitoires dudit décret qui en avaient fixé l’entrée en vigueur au 1er janvier 2020 (soit moins de 20 jours après la publication). Le mal de crâne guette lorsqu’on s’essaie à la pondération des conséquences associées à pareille annulation. Il s’installe définitivement lorsque le troisième vertige arrive : si l’annulation de certaines dispositions est classiquement rétroactive (par ex., les art. 901 et 933 c. pr. civ. en ce qu’ils imposaient l’indication des pièces dans l’acte d’appel par renvoi à l’art. 57), d’autres annulations sont modulées dans le temps – c’est-à-dire d’effet différé. Plutôt qu’une aspirine – ou plus exactement : en plus d’une aspirine –, le soussigné se propose de dissiper le malaise au moyen des lignes qui suivent, en espérant qu’elles ne viendront pas l’aggraver.

Le contexte

Un court rappel du décret attaqué et du contexte permettront tout d’abord de resituer les choses. Nous sommes à la fin de l’année 2019. Le froid est là ; les fêtes approchent ; le coronavirus n’est encore qu’une lointaine inquiétude. L’inquiétude est même ailleurs dans le microcosme juridique : une réforme d’ampleur de procédure civile pointe son nez, préfigurée par les chantiers de la Justice (sur lesquels, v. l’inoubliable et si juste, C. Brenner, La réforme de la procédure civile : un chantier de démolition ?, D. 2018. 361 image), le fameux rapport Agostini-Molfessis et, bien sûr, la loi de programmation de la Justice 2019-2022 du 23 mars 2019 (toute ressemblance avec des évènements contemporains est fortuite ; sur la loi n° 2019-222 de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice, v. not., Procédures 2019. Étude 12, obs. H. Croze). Le 12 décembre 2019 paraît enfin au Journal officiel le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile – qui constitue la pièce maîtresse de la réforme de la procédure civile de 2019. C’est le décret attaqué devant le Conseil d’État, au cœur de la décision commentée. Cette réforme sera complétée par au moins un autre texte pris dans la précipitation, à savoir le décret n° 2019-1419 du 20 décembre 2019 relatif à la procédure accélérée au fond devant les juridictions judiciaires – corrigeant déjà certaines scories du décret attaqué (sur ce décret, v. not., M. Kebir, Procédure accélérée au fond devant les juridictions judiciaires, Dalloz actualité, 13 janv. 2020).

Chez les praticiens, la panique est palpable. Le décret entre en vigueur au 1er janvier 2020, suivant son article 55, I. Surtout il est, suivant la même disposition, applicable par principe aux instances en cours à cette date. Le II du même article diffère certes l’entrée en application de certaines dispositions aux instances introduites postérieurement à cette date ; mais le principe demeure celui d’une application immédiate aux instances en cours au 1er janvier 2020. Pour ne prendre ici qu’un exemple, certaines dispositions du décret attaqué venues étendre la représentation obligatoire devant le tribunal judiciaire s’appliqueront au 1er janvier 2020 aux instances en cours. Des praticiens se précipiteront donc pour se constituer dans les affaires concernées lorsqu’ils le peuvent, pour recourir à un postulant sinon. Bref, plutôt que de préparer les fêtes de fin d’année, avocats et magistrats sont à la tâche pour digérer de façon ultra-rapide la réforme de la procédure civile. Les échanges vont d’ailleurs bon train, chacun y allant de sa propre interprétation.

Un maigre espoir est bien là : en catastrophe, le Conseil d’État a été saisi en référé en vue de faire suspendre l’exécution du décret attaqué. Hélas, l’espoir est douché par l’ordonnance de la Saint-Roger, veille de Saint-Sylvestre, par décision du 30 décembre 2020, le Conseil d’État rejette la requête en suspension (CE, réf., 30 déc. 2019, n° 436941, sur laquelle, v. T. Coustet, Réforme de la procédure civile : l’application du décret n’est pas suspendu, Dalloz actualité, 8 janv. 2020 ; D. avocats 2020. 48, étude E. Raskin et Roy Spitz image). L’ordonnance a néanmoins deux mérites : d’une part, elle précise l’interprétation de l’article 54 du code de procédure civile sur un point précis (les saisines par voie électronique ; CE, réf., 30 déc. 2019, n° 436941, consid. 5) ; d’autre part, le Conseil d’État adresse obiter dictum un reproche bien senti à l’exécutif : « En différant ainsi l’entrée en vigueur de la plupart des dispositions du décret contesté au 1er janvier 2020, l’auteur du décret du 11 décembre 2019 a retenu un report de l’entrée en vigueur de cette réglementation nouvelle qui s’avère bref eu égard à l’ampleur des modifications apportées à la procédure civile. Il reste, toutefois, que nombre de ces dispositions, définissant les règles de procédure civile applicables devant le tribunal judiciaire, devaient entrer en vigueur pour le 1er janvier 2020, date fixée par le législateur, selon le XXIII de l’article 109 de la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, pour la création de cette nouvelle juridiction de première instance. Dans ces conditions, si l’on peut regretter qu’une adoption plus précoce du décret n’ait pas été possible, il n’apparaît pas, en l’état de l’instruction et au vu de l’ensemble des intérêts en cause, qu’en retenant la date du 1er janvier 2020 pour l’entrée en vigueur de la plupart des dispositions du décret contesté, l’auteur de ce décret ait fixé un délai trop bref au regard de l’exigence tenant à l’édiction, pour des motifs de sécurité juridique, des mesures transitoires qu’implique, s’il y a lieu, une réglementation nouvelle. » (CE, réf., 30 déc. 2019, n° 436941, consid. 10).

Ce n’est néanmoins qu’un lot de consolation car le résultat est là : la suspension du décret attaqué est refusée. Il entre donc en vigueur au 1er janvier 2020. Sur quoi, un chapelet de textes viendra se greffer progressivement.

Leur énumération non-exhaustive redonne le tournis :

décret n° 2020-950 du 30 juillet 2020 relatif aux conditions de l’élection des bâtonniers du conseil de l’ordre des avocats et au report de la réforme de la saisie conservatoire des comptes bancaires, de l’extension de l’assignation à date et de la réforme de la procédure applicable aux divorces contentieux (v. not., S. Amrani-Mekki, Prise de date, prise de tête ?, Gaz. Pal. 26 janv. 2021, p. 49). décret n° 2020-1452 du 27 novembre 2020 portant diverses dispositions relatives notamment à la procédure civile et à la procédure d’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (v. S. Amrani-Mekki, Décret n° 2020-1452 réformant (encore !) la procédure civile, JCP 2020. 1404 ; H. Croze, Code de procédure civile : la mise à jour n° 2020-1452 est disponible, Procédures n° 2, févr. 2021, repère 2 ; L. Lauvergnat, Décret n° 2020-1452 du 27 novembre 2020 et procédures civiles d’exécution : l’heure est aux retouches ponctuelles, Gaz. Pal. 26 janv. 2021, p. 59 ; E. Jullien, Décret n° 2020-1452 du 27 novembre 2020 : encore un petit effort, Mesdames et Messieurs les rédacteurs, Gaz. Pal. 15 déc. 2020, p. 11 ; F.-X. Berger, Réforme de la procédure civile : pas de répit pour les praticiens, Dalloz actualité, 1er déc. 2020 ; M. Barba, Nouvelles retouches de l’appel civil ou le syndrome de la réforme permanente, D. 2021. 39 image). décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021 relatif à la procédure d’injonction de payer, aux décisions en matière de contestation des honoraires d’avocat et modifiant diverses dispositions de procédure civile (V. not. S. Amrani-Mekki, Le marronnier procédural 2021, JCP 2021. 1139 ; F.-X. Berger, Nouveau décret de procédure civile : du mieux, du moins bon et de l’incertain, Dalloz actualité, 15 oct. 2021). décret n° 2022-245 du 25 février 2022 favorisant le recours à la médiation, portant application de la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire et modifiant diverses dispositions (v. not. F.-X. Berger, Décret d’application de la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire : répercussions sur la procédure civile, Dalloz actualité, 3 mars 2022 ; L. Mayer, Les aspects du décret n° 2022-245 du 25 février 2022 relatifs aux modes amiables de résolution des différends, Gaz. Pal. 26 avr. 2022, p. 60).

La décision

Un champ d’application circonscrit

Cela pour dire que les dispositions issues du décret attaqué par requête du 20 décembre 2019 ont, à la date où le Conseil d’État est appelé à se prononcer, déjà été de nombreuses fois retouchées, modifiées, parfois même abrogées. Avant de descendre dans le détail de la décision, quelques observations générales s’imposent à l’adresse de ceux qui n’auraient pas le courage (ou l’envie) de s’y plonger.

Tout d’abord, la décision du Conseil d’État est assurément de portée pratique réduite. C’est le point fondamental : le champ de la confirmation excède de loin celui de l’annulation. L’annulation porte sur :

l’article 750-1 du code de procédure civile (i.e. le préalable amiable à la saisine du tribunal judiciaire en certains cas) ; les articles 901 et 933 du code de procédure civile (i.e. le formalisme de la déclaration d’appel en procédure avec et sans représentation obligatoire) mais uniquement en tant qu’ils renvoyaient dans leur version issue du décret attaqué à l’article 57 incluant l’indication des pièces ; les dispositions transitoires du décret attaqué, figurant à l’article 55, I et II.

Le champ de l’annulation est donc très circonscrit.

Des effets différés dans le temps

De plus, les effets de l’annulation de l’article 750-1 et des I et II de l’article 55 du décret attaqué sont différés dans le temps. Ce qui rend la décision pour l’essentiel platonique. Concrètement, pour la pratique actuelle et future de la procédure civile, c’est seulement l’annulation de l’article 750-1 qui porte vraiment à conséquence… et pour peu de temps sans doute puisque l’exécutif prendra rapidement un décret pour le ressusciter dans une version mieux configurée. La décision est donc de portée pratique très réduite.

La raison principale en est là, déjà déflorée : par l’empilement des textes et l’enchaînement continu des réformes, l’exécutif rend le contrôle du juge administratif soit inutile soit obsolète au regard des délais de traitement (environ 3 ans ici). Redisons-le. La plupart des articles issus de la réforme de 2019 dont la légalité est critiquée ont déjà été modifiés, remplacés ou abrogés. Et pour ceux qui demeurent – en leur forme originelle ou légèrement retouchée –, ils ont pour la plupart déjà produit leurs effets. Ces textes ont même tellement produit effet que le Conseil d’État n’ose les annuler rétroactivement, de peur du chaos qui en résulterait. Il diffère alors les effets de l’annulation pour des raisons tenant à la sécurité juridique. En un sens, le juge administratif n’a guère le choix et, de deux maux, choisit le moindre. L’exécutif a ainsi trouvé le moyen, sinon de contourner le contrôle de légalité, au moins d’en neutraliser les effets néfastes à ses yeux, à l’image du législateur et de ses lois à autodestruction programmée qui échappent à un contrôle de constitutionnalité efficient.

Le principe de rétroactivité jurisprudentielle bousculé

Ce qui conduit à une dernière observation générale avant le détail technique des questions procédurales : en deux jours, les cours faîtières ont montré qu’était fortement bousculé le principe de rétroactivité jurisprudentielle, selon lequel une jurisprudence nouvelle fait corps avec le texte interprété et rétroagit en conséquence à la date de son entrée en vigueur. Avec cette décision du Conseil d’État, les effets des principales annulations sont différés – peu ou prou – au jour de la décision. Le même jour, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution l’article 60 du code des douanes dans sa rédaction issue du décret du 8 décembre 1948, mais a reporté l’abrogation des dispositions considérées au 1er septembre 2023, dérogeant au principe d’abrogation immédiate (Cons. const. 22 sept. 2022, n° 2022-1010 QPC, D. 2022. 1663 image). La veille, la Cour de cassation a – dans une volée d’arrêts qui feront date – modulé une jurisprudence nouvelle hors contexte de revirement sur le fondement essentiel des principes de sécurité juridique et de confiance légitime devant bénéficier aux justiciables de bonne foi (v. not. Civ. 1re, 21 sept. 2022, n° 21-50.042). Le principe de rétroactivité de la jurisprudence nouvelle est-il devenu théorique ? La question de sa force contemporaine peut en tout cas être posée (v. réc., M. Barba, Appel du refus de désigner un expert en vue de l’évaluation des droits sociaux – Histoire d’un revirement, avenir du revirement, D. 2022. 1291 image ; J. Jourdan-Marques, La computation des délais en matière de déféré : petits détails pratiques et grands enjeux théoriques, D. 2022. 1687 image).

Ces observations générales faites, revenons dans le détail de la présente décision du Conseil d’État, en distinguant le champ de la confirmation (v. ci-dessous) de celui de l’annulation (v. Dalloz actualité, à paraître).

Champ de confirmation

La plupart des dispositions critiquées résistent à l’examen de leur légalité. Revenons sur les plus importantes, qui concernent l’introduction de l’instance, le règlement des incidents de compétence au sein du tribunal judiciaire, l’exécution provisoire et la représentation obligatoire.

Introduction de l’instance

L’article 54 du code de procédure civile

L’article 54 du code de procédure civile constitue le siège normatif du formalisme attenant à la demande initiale en justice civile. Y sont précisées les mentions rendues obligatoires à peine de nullité. Le décret attaqué en a modifié la teneur. Il y était alors disposé que « Lorsqu’elle est formée par voie électronique, la demande comporte également, à peine de nullité, les adresse électronique et numéro de téléphone mobile du demandeur lorsqu’il consent à la dématérialisation ou de son avocat. Elle peut comporter l’adresse électronique et le numéro de téléphone du défendeur ». L’idée était à l’époque d’anticiper sur l’installation des futures procédures en ligne dématérialisées d’un bout à l’autre. La traduction de cette idée était néanmoins surprenante et imprécise ; si imprécise qu’il avait d’ailleurs déjà fallu l’intervention du Conseil d’État pour la préciser (c’est la fameuse ordonnance précitée de la Saint-Roger). L’exigence – assez surnaturelle – avait en tout cas fait grincer des dents l’avocature.

Le Conseil d’État rend un non-lieu à statuer de ce chef. La raison, double, en est simple : d’une part, le décret du 27 novembre 2020 a procédé à l’abrogation de cette disposition à effet au 1er janvier 2021 ; d’autre part, la disposition en question – formellement en vigueur entre le 1er janvier 2020 et le 1er janvier 2021 – n’a reçu aucune application dans cet intervalle, « dès lors que les premières saisines par voie électronique, dans le cadre du programme Portalis, n’ont été matériellement possibles que courant 2021 » (consid. 3). Nous avions tantôt parlé, à l’égard de cette disposition de l’article 54 du code de procédure civile , d’un « mort-né réglementaire » (M. Barba, Nouvelles retouches de l’appel civil ou le syndrome de la réforme permanente, préc., p. 41, n° 4), abrogé avant même de recevoir application. Le Conseil d’État en prend acte et rend un non-lieu à statuer.

Le Conseil d’État rendra également un non-lieu à statuer sur d’autres mort-nés réglementaires, à l’instar :

de l’article 754 du code de procédure civile en tant qu’il imposait la remise de l’assignation dans le délai de deux mois à compter de la communication de la date d’audience par voie électronique (abrogé par le décret du 11 octobre 2021 relatif à la procédure d’injonction de payer, aux décisions en matière de contestation des honoraires d’avocat et modifiant certaines dispositions de procédure civile) ; de l’article 761 du code de procédure civile en tant qu’il visait, par la disgrâce d’une erreur de plume, le juge de l’exécution en lieu et place du juge des contentieux de la protection (erreur corrigée par le décret du 20 décembre 2019, c’est-à-dire avant même l’entrée en vigueur du décret attaqué).

Il semble de bonne logique juridique de rendre un non-lieu à statuer sur ces éléments. Le Conseil d’État n’est pas là pour fournir des consultations abstraites sur des points de droit. Ce passage de la décision a néanmoins pour mérite premier de mettre en lumière la versatilité normative de l’exécutif, en même temps que l’impréparation évidente de certains textes, dont on se dit sans doute, en haut lieu, qu’il sera toujours temps de les modifier ou de les supprimer avant leur entrée en vigueur ou en application. Sans considération véritable pour les praticiens d’en bas. Ce passage de la décision administrative a pour mérite second de montrer la véritable avalanche de textes de procédure civile, se succédant les uns aux autres, le dernier en date ayant vocation à corriger le précédent à la façon d’une mise à jour informatique selon une boucle d’apparence infinie. Il y a là, c’est un euphémisme, matière à amélioration. L’exemple de l’article 57 du code de procédure civile atteste également que les textes de procédure civile sont particulièrement perfectibles.

L’article 57 du code de procédure civile

Dans sa version issue du décret attaqué et encore en vigueur aujourd’hui, l’article 57 du code de procédure civile relatif au formalisme de la requête intime d’y faire figurer les mentions énoncées à l’article 54 du même code à peine de nullité. Or le 6° de l’article 54 oblige le demandeur à indiquer les modalités de comparution devant la juridiction saisie et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire. Il y a là un illogisme patent : par définition, la procédure sur requête est introduite hors la présence de l’adversaire en matière contentieuse. C’est pourquoi le décret de 2019, auquel on doit ce déconcertant renvoi, fut attaqué de ce chef. Lui était reproché une certaine contrariété au principe de clarté et d’intelligibilité de la norme dont découlerait une méconnaissance du droit d’accès au juge.

Le Conseil d’État diverge sur la prémisse du raisonnement. Selon le juge administratif, les dispositions des articles 57 et 54 « ne sauraient être interprétées comme conduisant à imposer que la requête saisissant la juridiction comporte l’indication, prévue à l’attention du défendeur, des modalités de comparution devant celle-ci dans les hypothèses (…) qui ont expressément pour objet de permettre l’intervention d’une décision non contradictoire » (consid. 10).

La motivation est décevante. Il est constant que l’article 57 renvoie à l’article 54 dans son intégralité ; le renvoi n’est pas chirurgical mais bien général. Ce que le Conseil d’État veut sans doute dire est qu’une interprétation raisonnable – rationnelle – exclut mécaniquement qu’il faille indiquer, dans les requêtes unilatérales, les modalités de comparution à un défendeur qui n’est par définition pas appelé dans un premier temps procédural. Parce qu’une telle interprétation littérale n’aurait aucun sens… Ce qui était, précisément, le reproche adressé à l’article 57 dans sa version issue du décret attaqué. Le Conseil d’État corrige donc là, en vérité, le tir raté par l’exécutif en fournissant une sorte de réserve d’interprétation.

Le règlement des incidents de compétence internes au tribunal judiciaire

Une autre disposition célèbre issue du décret attaqué est l’article 82-1 du code de procédure civile, qui concerne le règlement des questions de « compétence » au sein du tribunal judiciaire (stricto sensu, il est douteux qu’il s’agisse véritablement de questions de compétence ; v. C. Bléry, Réforme de la procédure civile : simplification des exceptions d’incompétence, Dalloz actualité, 20 déc. 2019 ; J. Jourdan-Marques, La simplification des exceptions d’incompétence : une bombe à retardement ?, D. 2020. 495 image). Pour mémoire, cet article a pour objectif de simplifier (sic) le règlement des questions de compétence au sein du tribunal judiciaire par un procédé terriblement complexe, qui peut voir se succéder la bagatelle de 4 juges sur la seule question de la compétence matérielle. Ainsi, le juge premier saisi peut, par mention au dossier, régler une telle question avant la première audience et transmettre le dossier au juge désigné ; juge dont les parties peuvent ensuite discuter la compétence, s’il ne le fait lui-même. Si la compétence du deuxième juge est « remise en cause » (sic), il renvoie d’office ou à la demande d’une partie au président du tribunal judiciaire. Après être « remontée », l’affaire « redescend » sur le bureau du juge finalement désigné par détermination présidentielle insusceptible de recours – à la façon d’une mesure d’administration judiciaire. Le manège juridictionnel ne s’arrête virtuellement pas là : la compétence du troisième juge peut encore être contestée par les parties et la décision qui en résultera pourra encore être frappée d’appel dans les conditions du droit commun.

La légalité de l’article 82-1 a été discutée devant le Conseil d’État. La critique procède de ce qu’une telle disposition serait de nature à favoriser, sinon encourager, des manœuvres dilatoires de la part des parties, ce qui entraverait la réalisation de l’objectif de bonne administration de la justice. L’installation de cette disposition constituerait de surcroît une erreur manifeste d’appréciation de la part des auteurs du décret.

Le Conseil d’État ne se laisse pas ébranler par ces moyens assez faibles en droit. La circonstance selon laquelle « ces dispositions sont susceptibles de conduire à l’intervention successive de différents magistrats » est jugée insuffisante à caractériser une méconnaissance de l’objectif à valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice ou une erreur manifeste d’appréciation (consid. 13).

Il est vrai que le dispositif de l’article 82-1 paraît, en opportunité, malheureux. L’inopportunité du fond du texte ne suffit cependant pas à emporter son annulation pour illégalité. C’est en un sens heureux car, à défaut, un nombre considérable de textes issus des récentes réformes de procédure civile seraient exposés à l’annulation, à l’estime du soussigné.

L’exécution provisoire

Rappel des dispositions critiquées

Chacun sait que la réforme de 2019 de la procédure civile a révolutionné, pour le meilleur ou pour le pire (rayer la mention inutile), la question de l’exécution provisoire (sur quoi, v. not., J.-Cl. Procédures Formulaires, v° Exécution provisoire, par M. Barba et R. Laffly, à jour du 26 oct. 2020 ; v. égal., M. Boccon-Gibod et M. Boëlle, Le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, réformant la procédure civile, consacre l’exécution provisoire de droit, Procédures n° 3, mars 2020. Étude 11 ; « Premier bilan de la nouvelle jurisprudence en matière d’arrêt et d’aménagement de l’exécution provisoire », JCP 2021. 101 ; U. Schreiber, Réforme de la procédure civile : exécution provisoire de droit des décisions de justice, Dalloz actualité, 17 déc. 2019). L’idée, encore récemment reprise dans le rapport Sauvé des États généraux de la justice (sur lequel, v. notre récent propos, un brin amer : L’appel civil et les États généraux de la justice, JCP 2022. 1662), était de revaloriser la première instance par la généralisation de l’exécution provisoire de droit – tout en maintenant concurremment et de façon apparemment paradoxale le principe même du caractère suspensif des délais et voies de recours ordinaires, au premier chef desquels l’appel. La réforme de 2019 a donc fait de l’exécution provisoire de droit le principe, cependant que l’exécution provisoire octroyée devenait d’exception, ne pouvant être décidée que dans les hypothèses interstitielles où l’exécution provisoire de droit est écartée sans que l’exécution provisoire soit interdite. Cette généralisation de l’exécution provisoire de droit n’a néanmoins pas atteint tous les compartiments du droit puisque, en matière sociale notamment, l’exécution provisoire de droit demeure d’exception par la grâce de dispositions dérogatoires du code du travail.

La généralisation de l’exécution provisoire de droit s’est accompagnée d’une petite révolution technique. A par exemple été consacrée la possibilité pour le premier juge d’écarter cette exécution provisoire de droit à raison de la nature de l’affaire, sauf dans certaines hypothèses limitativement énumérées, où l’exécution provisoire de droit est absolue, comme irréductible (par ex., en référé, C. pr. civ., art. 514-1, al. 3). Lorsque l’exécution provisoire de droit est écartée, il est possible en cas d’appel d’en demander le rétablissement devant le premier président ou le conseiller de la mise en état, dès sa saisine (C. pr. civ., art. 514-4). Lorsque l’exécution provisoire de droit est maintenue ou impossible à évincer, il est aussi possible en cas d’appel de demander son arrêt devant le premier président de la cour d’appel, sur démonstration de conséquences manifestement excessives (condition classique) et rapport d’au moins un moyen sérieux d’annulation ou de réformation du jugement concerné (condition nouvelle en droit commun, C. pr. civ., art. 514-3). Étant ici rappelé que la partie restée taiseuse en première instance sur l’exécution provisoire de droit n’est recevable à demander son arrêt au premier président qu’à la condition d’évoquer des conséquences manifestement excessives révélées postérieurement à la décision de première instance (C. pr. civ., art. 514-3). C’est une façon détournée d’obliger les parties à discuter de l’exécution provisoire de droit devant le premier juge, à la façon d’un principe de concentration. Cette disposition de l’article 514-3 pose, en droit positif, de redoutables difficultés notamment à l’endroit du référé ; difficultés que la décision du Conseil d’État ne règle pas sans qu’on puisse le lui reprocher.

Les requérants ont critiqué ces innovations du décret attaqué tant sur le principe même de la généralisation de l’exécution provisoire de droit que sur les modalités techniques qui l’ont accompagnée.

Le nouveau principe de l’exécution provisoire de droit

Sur le principe, la critique est frontale. Selon les requérants, il y aurait d’abord une contradiction à affirmer simultanément que toutes les décisions de première instance bénéficient par principe de l’exécution provisoire de droit et que les voies et délais de recours ordinaire sont suspensifs d’exécution. En première approche, on peine effectivement à comprendre de quelle façon ces deux principes antagonistes peuvent coexister. Tenace est le sentiment que l’opération de l’un (principe d’exécution provisoire de droit) vient neutraliser celle de l’autre (principe d’effet suspensif). Le Conseil d’État réalise cependant une conciliation technique indiscutable : le principe d’effet suspensif attaché aux délais et voies de recours ordinaires trouve à s’appliquer dans les hypothèses où l’exécution provisoire de droit est écartée par le premier juge. De même qu’il trouve à s’appliquer dans l’hypothèse où l’exécution provisoire de droit est écartée par la loi sans que le juge ait décidé de l’octroyer. À quoi le juge administratif ajoute que le principe d’effet suspensif trouve encore à s’appliquer dans les matières où l’exécution provisoire est interdite. Techniquement, il est vrai que dans ces trois séries d’hypothèses, le principe d’effet suspensif a vocation à se déployer. Chacun perçoit cependant que le Conseil d’État fait l’aveu, pour ainsi dire, que le principe d’effet suspensif des délais et voies de recours ordinaires n’a plus qu’une vocation résiduelle, en tant qu’il ne s’applique plus qu’à des hypothèses exceptionnelles – ce qui peut surprendre s’agissant d’un principe. Cela ne suffit en tout cas pas à emporter l’annulation de l’article 514 du code de procédure civile.

Pas davantage que l’autre critique consistant à arguer que la généralisation réglementaire de l’exécution provisoire de droit heurterait une norme de niveau supra-décrétal imposant le principe de l’effet suspensif de l’appel (consid. 16). Pour cause, une telle norme n’existe pas en droit positif. Le Conseil d’État souligne par ailleurs, pour mieux montrer la proportionnalité sinon l’opportunité des nouvelles dispositions en matière d’exécution provisoire, que le principe nouveau n’est pas absolu mais assorti de dérogations, d’exceptions et autres garde-fous destinés à en contenir les dérives. Le juge administratif valide ainsi la généralisation de principe de l’exécution provisoire de droit, admettant dans le même temps que cette généralisation pouvait valablement ne pas s’étendre à la matière prud’homale, la différence de situation justifiant une différence de traitement (consid. 17). Le Conseil d’État relève ici à raison les spécificités de la juridiction prud’homale « tant dans ses principes d’organisation qu’au regard de la nature des litiges traités » (idem). À quoi on ajoutera, pour notre part, le taux de réformation considérable des décisions de première instance prud’homale. En passant, signalons qu’il y a là une étrangeté stratégique dans l’argumentaire des requérants consistant à critiquer le principe même de la généralisation de l’exécution provisoire de droit tout en regrettant de ne la voir étendue à la matière prud’homale. Ce type de contradiction n’aura pas aidé le recours à prospérer.

Les modalités nouvelles de l’exécution provisoire de droit

La critique portée par les requérants déborde le principe de la généralisation de l’exécution provisoire de droit pour s’étendre aux modalités techniques l’ayant accompagnée. Ce sont tout d’abord les dispositions des articles 514-1 et 514-3 du code de procédure civile qui sont critiquées, lesquelles intéressent respectivement la mise à l’écart de l’exécution provisoire de droit par le premier juge et son arrêt par le premier président. L’article 514-6 du code de procédure civile est aussi critiqué, lequel indique que les décisions du premier président sur l’exécution provisoire sont insusceptibles de recours. Est aussi et enfin critiqué le célèbre article 524 du code de procédure civile, reprise à droit constant de l’ancien article 526 du code de procédure civile relatif à la radiation pour défaut d’exécution – qui constitue une part importante du problème de la généralisation de l’exécution provisoire de droit en ce qu’il entrave le droit d’appel.

Les articles 514-1 et 514-3 du code de procédure civile. Les requérants critiquent la légalité des articles 514-1 et 514-3 de trois façons différentes.

Tout d’abord, c’est l’imprécision des termes employés par le premier qui est pointée du doigt – en vain (consid. 19).

Ensuite, est discutée la condition tenant à l’exigence de démonstration du sérieux de l’appel devant le premier président, en matière d’arrêt de l’exécution provisoire. Selon les requérants, cela conduit à exiger du premier président une forme de préjugement de l’appel lui-même, préjugement qui risque de peser sur l’issue de l’appel. Le premier président interférerait ainsi avec l’office des juridictions d’appel. Le Conseil d’État ne se laisse pas convaincre, au motif indiscutable que le premier président lui-même (ou son délégué) n’est pas appelé à siéger dans la formation connaissant finalement de l’appel. Cette motivation est en première approche satisfaisante. On persiste cependant à penser que le Conseil d’État évite – ou fait mine d’ignorer – la difficulté réelle, à savoir que le préjugement réalisé par le premier président pèsera dans l’appréciation même de l’appel par les conseillers. Lorsque le premier président dit l’appel dépourvu de sérieux, la cour d’appel peut être plus facilement amenée à le rejeter. Réciproquement, lorsque le premier dit l’appel sérieux, la cour d’appel aura une tendance naturelle à examiner soigneusement l’appel. Les praticiens ont d’ailleurs bien intégré dans leur pratique cette condition de préjugement du sérieux de l’appel par le premier président, qui peut fragiliser certains dossiers à hauteur d’appel. C’est pourquoi la demande d’arrêt de l’exécution provisoire n’est aujourd’hui plus systématique. On peut donc regretter que le Conseil d’État ne se soit pas penché davantage sur cet aspect (Le praticien ne peut d’ailleurs plus former cette demande sans avoir préalablement pensé la question des moyens d’annulation ou de réformation du jugement frappé d’appel ; alors qu’en droit antérieur, il lui était loisible de le faire dans la mesure où seule la condition tenant aux conséquences manifestement excessives était posée. Une nouvelle gymnastique procédurale s’est installée). Toujours est-il que le dispositif de l’article 514-3 est avalisé par le Conseil d’État sur ce point.

Enfin, il est avalisé sur un autre point fondamental, à savoir la variable relative à l’attitude de la partie concernée en première instance : si cette partie, qui requiert à présent l’arrêt de l’exécution provisoire de droit, a discuté la question en première instance, il lui « suffit » de faire valoir, outre le sérieux de son appel, des conséquences manifestement excessives ; en revanche, si cette partie est demeurée silencieuse, elle ne sera recevable en sa demande d’arrêt qu’à la condition d’alléguer des conséquences manifestement excessives survenues postérieurement à la décision de première instance ; ce qui complexifie la procédure d’arrêt mais également, compte tenu de la possibilité de radiation de l’appel pour défaut d’exécution, le droit d’appel lui-même.

Pour être parfaitement comprise, cette critique adressée à l’article 514-3 doit être rapprochée d’une autre : les conditions qui permettent d’obtenir la mise à l’écart de l’exécution provisoire devant le premier juge et son arrêt devant le premier président ne sont pas alignées. C’est une chose étrange de prime abord : les juridictions saisies paraissent juger de la même question de l’exécution provisoire de droit mais selon des conditions distinctes. Surtout, la logique de l’article 514-3 , qui sanctionne de la manière décrite le fait de demeurer silencieux sur l’exécution provisoire de droit en première instance, ne se comprend rationnellement pas puisque l’article 514-1 est pour sa part indifférent à la question des conséquences manifestement excessives, pour s’articuler entièrement autour de la compatibilité de l’exécution provisoire de droit au regard de la nature de l’affaire. La réalité est que les textes ont été imparfaitement rédigés, les moutures successives s’étant mélangées, laissant apparaître un nuancier involontaire de conditions, différentes en fonction de la demande (de mise à l’écart, d’arrêt et de rétablissement…).

Le Conseil d’État n’y trouve cependant rien à redire. À son estime, la contrainte issue de l’article 514-3 imposant indirectement aux parties de discuter l’exécution provisoire de droit en première instance « n’apparaît pas excessive au regard des objectifs poursuivis par la réforme » (consid. 20). Quant au désalignement général des conditions pour la mise à l’écart et l’arrêt, il s’expliquerait tout simplement par le fait que « le contrôle (est) opéré à des stades distincts de la procédure » et « peut (donc) se fonder le cas échéant sur des éléments distincts » (idem). On peine cependant à être parfaitement convaincu que la nature de l’affaire, décisive en première instance, ne soit plus d’aucune pertinence dans la procédure d’arrêt et que la condition tenant aux conséquences manifestement excessives varie d’un stade à l’autre dans son intensité… alors que la condition n’est d’aucune pertinence en première instance. Il y a là un illogisme persistant.

Le Conseil d’État fait superbe abstraction, en passant, de l’hypothèse actuellement critique du référé (sur quoi, v. not., M. Boccon-Gibod et M. Boëlle, Premier bilan de la nouvelle jurisprudence en matière d’arrêt et d’aménagement de l’exécution provisoire, préc.). Aucun praticien n’ignore que la jurisprudence des premiers présidents est actuellement fracturée. Certaines décisions retiennent que l’exigence posée par l’article 514-3 est générale : à défaut de faire valoir des observations sur l’exécution provisoire de droit en première instance de référé, une partie ne serait recevable à demander l’arrêt qu’à la condition d’alléguer des conditions manifestement excessives survenues postérieurement au jugement de première instance. À quoi d’autres décisions « répondent », fort justement à notre estime, qu’en matière de référé, les parties ne peuvent utilement faire d’observations sur l’exécution provisoire puisque, par la grâce de l’article 514-1, alinéa 3, le premier juge ne peut écarter l’exécution provisoire de droit en matière de référé. Ce qui conduit à neutraliser, en matière de référé, l’exigence de discussion de l’exécution provisoire de droit devant le premier juge. Actuellement, la jurisprudence est divisée, ce qui est d’abord le fait d’une rédaction particulièrement défectueuse des dispositions en question. On aurait aimé voir le Conseil d’État assortir d’une forme de « réserve d’interprétation » l’article 514-3 en matière de référé pour terminer la controverse. Il ne le fait pas. La controverse n’est donc pas près de s’éteindre ; en particulier parce que les décisions en la matière sont insusceptibles de recours en vertu de l’article 514-6, auquel s’attaquent également les requérants.

L’article 514-6 du code de procédure civile. Le premier président, saisi d’une demande d’arrêt de l’exécution provisoire de droit (art. 514-3) ou de rétablissement de celle-ci (art. 514-4), statue en référé par une demande non susceptible de pourvoi (art. 514-6). Il en va de même en matière de radiation (art. 524). À la vérité, les décisions du premier président sont susceptibles d’un pourvoi-nullité – le recours-nullité étant précisément ouvert en cas d’excès de pouvoir lorsque les recours ordinaires et extraordinaires sont fermés par les textes (sur quoi, v. Civ. 2e, 13 janv. 2022, n° 20-17.344, Dalloz actualité, 11 févr. 2022, obs. T. Goujon-Bethan ; Procédures n° 3, mars 2022. Comm. 55, obs. Y. Strickler). Il reste néanmoins qu’il est impossible d’articuler un pourvoi classique à l’encontre d’une décision du premier président statuant en matière d’exécution provisoire. L’article 514-6 ne peut au demeurant être regardé, suivant les mots du Conseil d’État, comme purement confirmatif des dispositions précédemment en vigueur, en particulier l’ancien article 525-2 du code de procédure civile, en ce qu’il doit être appréhendé dans le nouveau contexte normatif institué par le décret attaqué ayant généralisé l’exécution provisoire de droit. Le Conseil d’État avalise néanmoins les dispositions de l’article 514-6. Le Conseil d’État considère que dans la mesure où les décisions du premier président ont « pour unique objet » l’exécution provisoire de droit et non le « fond du litige », il n’est pas problématique qu’elles soient insusceptibles de pourvoi. Ce d’autant que « la décision rendue au fond au terme de la procédure d’appel peut, le cas échéant, faire l’objet d’un pourvoi en cassation » (consid. 24).

C’est là un passage particulièrement décevant de la décision, qui montre que le Conseil d’État ne prend pas la pleine mesure du problème. À suivre le juge administratif, si l’on caricature, les décisions sur l’exécution provisoire seraient de l’ordre du détail technique, cependant que seule la décision au fond de la cour d’appel importerait. Ce qui expliquerait la différence drastique de régimes de recours. À quoi l’on répondra uniquement que lorsque l’exécution provisoire de droit est maintenue et que la radiation pour défaut d’exécution est prononcée, par exemple faute d’avoir convaincu le magistrat compétent de l’impossibilité d’exécution, aucune décision n’est rendue sur le fond même de l’appel. Nul n’ignore aujourd’hui que les décisions relatives à l’exécution provisoire sont décisives du sort de l’appel. En sorte qu’il y a quelque chose d’incongru à interdire les recours à l’encontre des décisions en la matière qui ne sont pas, tant s’en faut, assimilables à de simples mesures d’administration judiciaire. La décision du Conseil d’État est donc décevante de ce chef.

L’article 524 du code de procédure civile. La décision relative à la légalité de l’article 524 – siège de la radiation pour inexécution de la décision frappée d’appel – est également décevante mais n’est pour sa part pas surprenante : le dispositif existait déjà à l’identique avant la réforme ; il n’a fait que prendre de l’importance avec la généralisation de l’exécution provisoire de droit. Le juge administratif détaille la procédure de radiation et se contente, peu ou prou, d’en affirmer l’équilibre global, pour conclure sèchement à sa légalité (consid. 27).

La représentation obligation

Furent également soumises à l’examen du Conseil d’État les nouvelles dispositions relatives à la représentation obligatoire en opérant une extension (v. A. Bolze, Réforme de la procédure civile : extension de la représentation obligatoire par un avocat et procédure sans audience, Dalloz actualité, 19 déc. 2019). La réforme de 2019 a effectivement opéré en la matière un petit bouleversement. Pour mémoire, un décalage a été opéré : avant, les procédures écrites obéissaient au principe de représentation obligatoire cependant que les procédurales orales y échappaient ; désormais, l’oralité de la procédure n’est plus un marqueur décisif et certaines procédurales orales obéissent bien au principe de représentation obligatoire. Techniquement, il faut donc parfois mobiliser un postulant dans les procédures orales couvertes par la représentation obligatoire et se déroulant hors ressort territorial du dominus litis.

Tribunal judiciaire

Pour le tribunal judiciaire, le principe est fixé par l’article 760 du code de procédure civile, à savoir le principe général de représentation obligatoire. Une exception est cependant posée à l’article 761 du même code. Les parties sont dispensées de constituer avocat : dans les matières relevant de la compétence du juge des contentieux de la protection ; dans les matières relevant, pour l’essentiel, de l’ancien tribunal d’instance devenu chambre de proximité du tribunal judiciaire ; pour les demandes portant sur un montant inférieur ou égal à 10 000 € et assimilées. Exception à l’exception : dans les matières relevant de la compétence exclusive du tribunal judiciaire, la représentation par avocat est obligatoire. Ces dispositions doivent, en un sens, être lues en conjonction avec d’autres, dont l’article 750 du code de procédure civile. Aux termes de celui-ci, la demande en justice devant le tribunal judiciaire est normalement formée par assignation mais peut l’être par requête lorsque le montant n’excède pas 5 000 € en procédure orale ordinaire ou dans certaines matières déterminées. Dit autrement, pour ce qui nous intéresse, il y a là un régime procédural un peu particulier notamment pour les demandes excédant 5 000 € mais ne dépassant pas 10 000 € : la constitution n’est pas obligatoire mais l’instance n’en doit pas moins être introduite sur assignation. La légalité de ces dispositions est mise en cause devant le Conseil d’État.

Le juge administratif valide ces dispositions sans coup férir. Tout d’abord, la circonstance que la combinaison des articles 750 et 761 puisse conduire à imposer le recours à l’assignation dans une matière où les parties sont dispensées de constituer avocat « ne met pas à la charge des justiciables une contrainte manifestement excessive » (consid. 31). Ensuite, en s’en tenant à l’essentiel, le Conseil d’État n’identifie aucune difficulté particulière à ce que la représentation soit rendue obligatoire en procédure orale, même si cela revient à imposer en certains cas la postulation (consid. 33).

À la vérité, on peut s’étonner, non de la décision du Conseil d’État, qui semblait acquise d’avance de ce chef, mais de la critique portée par le CNB et les autres requérants, qui semblent, en un sens, jouer là contre leur propre camp. Le droit d’accès au juge est-il donc mieux garanti dans les procédures sans représentation obligatoire ? C’est l’idée que semblent défendre les requérants… Il est permis de ne pas la partager.

Tribunal de commerce et juge de l’exécution

Le Conseil d’État valide également les dispositions de l’article 853 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret attaqué, faisant logiquement abstraction des modifications ultérieures réalisées par le décret du 27 novembre 2020. Le Conseil d’État n’annule pas davantage les dispositions issues du décret attaqué relatives à la représentation obligatoire et à la notification des décisions devant le juge de l’exécution, en particulier l’article 678 du code de procédure civile rendu applicable par l’article R. 121-5 du code des procédures civiles d’exécution.

Tel in globo le champ de la confirmation réalisée par le Conseil d’État. Voyons à présent le champ de l’annulation.

 

À suivre, dans l’édition du mardi 4 octobre de Dalloz actualité : Contrôle de légalité de la réforme de la procédure civile de 2019. Retour vers le futur au Conseil d’État (Deuxième partie : le champ d’annulation)

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Contrôle de légalité de la réforme de la procédure civile de 2019 : retour vers le futur au Conseil d’État (Première partie : le champ de la confirmation)

Le Conseil d’État a été saisi de la légalité du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile. Il s’est prononcé le 22 septembre 2022 par une décision fleuve d’une trentaine de pages. L’essentiel des dispositions critiquées est confirmé. Seules quelques dispositions, dont le fameux article 750-1 du code de procédure civile, sont annulées. Certaines annulations sont ordinairement rétroactives, d’autres sont d’effet différé. Le Conseil d’État donne ainsi à lire une décision complexe aux conséquences pratiques incertaines. Le principal message adressé au pouvoir réglementaire est là : le différé d’entrée en vigueur d’une réforme doit être proportionnel à l’ampleur de celle-ci.

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Honoraires d’avocats : attention aux clauses abusives et aux pratiques commerciales trompeuses !

La Cour de justice de l’Union européenne continue sa traque des clauses abusives en répondant aux renvois préjudiciels que les États membres lui font parvenir aussi régulièrement que possible. Après avoir étudié il y a quelques semaines la portée du réputé non écrit dans ce contentieux (CJUE 8 sept. 2022, aff. jtes C-80/21 à C-82/2, Dalloz actualité, 16 sept. 2022, obs. C. Hélaine ; D. 2022. 1596 image), la Cour s’attaque dans un arrêt du 22 septembre 2022 à une question particulièrement sensible, celle des honoraires d’avocat. Les renvois préjudiciels que nous allons étudier concernent le droit espagnol mais des prolongements sont possibles en droit français, au moins parce qu’une convention d’honoraires peut comporter des clauses abusives comme en d’autres matières. La pratique doit donc rester très vigilante à ce sujet.

Rappelons les faits ayant été à l’origine du renvoi préjudiciel : c’est dans la ville colorée de Séville, en Espagne que ceux-ci prennent place. Le 9 février 2017, des avocats sont chargés par lettre de mission de l’examen d’un contrat de prêt conclu le 26 novembre 2003 par un consommateur avec un établissement bancaire. La lettre de mission prévoit, outre l’examen convenu, la saisine de la justice si des clauses abusives se trouvaient dans le document contractuel signé. Une clause de la lettre de mission entre le consommateur et son avocat prévoyait que si le client se désiste, il devra payer le montant résultant de l’application du barème de l’ordre des avocats pour la fixation des dépens concernant le recours relatif à l’effacement (une nullité en Espagne) de la clause abusive. La consommatrice avait contacté le cabinet d’avocat par le biais d’une publicité sur un réseau social et elle indiquait ne pas avoir eu connaissance de cette clause avant de signer l’ordre de mission. Nous commençons à voir le problème poindre.

Par un premier recours extrajudiciaire, l’avocat saisi demande le 22 février 2017 à la banque certaines sommes indument payées par son client. Le recours en nullité a été ensuite déposé le 22 mai 2017 par ce même avocat et une avouée auprès du Juzgado de Primera Instancia de Sevilla (le Tribunal de Première instance n° 10 bis de Séville, en Espagne) que la juridiction a enregistré le 12 juin 2017. Coïncidence : l’établissement bancaire propose, le 2 juin 2017 (et donc dans l’interstice entre le recours et son enregistrement) à son client la restitution d’une somme de 870,67 €. Une difficulté se cristallise car le consommateur a décidé d’accepter cette offre mais on ne sait pas à quelle date celui-ci a informé son avocat de la proposition de la banque. Voici donc que l’avocat précise, juste après l’introduction du recours, qu’il n’est pas d’accord avec la proposition de règlement évoquée précédemment puisqu’un recours a été introduit. L’avouée signale à la juridiction le 25 septembre 2017 que le consommateur demandeur à l’action en nullité s’est désisté puisqu’il a obtenu satisfaction par un règlement amiable. L’avouée précise que ce désistement était contraire à l’avis de son avocat et que l’acceptation de cette transaction était, en réalité, postérieure à l’introduction de l’instance. La procédure a donc été terminée à ce moment-là. L’avocat mécontent de la situation saisit la justice à son tour en paiement d’honoraires pour une somme de 1 105,50 € hors taxe soit un total de 1 337,65 €. La demande est accompagnée de la convention d’honoraires renvoyant aux règles applicables en cette matière dont les barèmes sont fixés par l’ordre des avocats de Séville. Le consommateur conteste cette demande en pensant que les honoraires ne sont pas dus. Il formule, devant le greffier, un grief tiré du caractère abusif de la clause de désistement évoquée précédemment. Le greffier de la juridiction de Séville rend une décision motivée (nous reviendrons sur cette procédure non juridictionnelle plus tard) fixant le montant dû des honoraires d’avocat à 1 337,65 € en accordant un délai de paiement de cinq jours. Il ne statue pas sur la question de la clause abusive, faute de pouvoir juridictionnel. Le consommateur conteste cette décision et saisit, à son tour, la juridiction de renvoi d’un recours en révision.

Le doute se cristallise à cette échelle car le tribunal de première instance de Séville émet des réserves sur les règles régissant la procédure nationale en paiement des honoraires. Celles-ci pourraient présenter des aspects non conformes aux exigences découlant de la protection des consommateurs contre les clauses abusives. Le tribunal décide donc de renvoyer cinq questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne. La dernière question intéresse une problématique connexe, à savoir les pratiques commerciales trompeuses.

Nous étudierons les questions et leurs réponses au fur et à mesure en reproduisant les intitulés des renvois préjudiciels au long du commentaire et ce pour davantage de confort de lecture.

De l’importance d’un contrôle juridictionnel des clauses abusives

La Cour commence par répondre aux deux premières questions posées par la juridiction de renvoi :

1) Une procédure sommaire en réclamation d’honoraires engagée par un avocat, qui ne permet pas au juge d’examiner d’office l’éventuel caractère abusif des clauses contenues dans le contrat conclu avec le consommateur étant donné qu’elle ne prévoit son intervention à aucun moment de son déroulement, sauf dans le cas où le client conteste cette réclamation et où l’une des parties forme par la suite un recours contre la décision finale du greffier, est-elle conforme à la directive 93/13/CEE et au principe d’effectivité qui lui est applicable, lus en lien avec le droit à la protection juridictionnelle effective prévu à l’article 47 de la Charte ?

2) Le fait que le contrôle éventuel du caractère abusif par le juge, d’office ou à la demande d’une partie, dans ce type de procédure, de nature sommaire, s’effectue dans le cadre d’un recours en révision facultatif de la décision rendue par un organe non juridictionnel tel que le greffier, qui doit en principe se limiter exclusivement à ce qui a fait l’objet de la décision et qui n’admet pas la production de preuves autres que les preuves documentaires déjà fournies par les parties, est-il conforme à la directive 93/13/CEE et au principe d’effectivité qui lui est applicable, lus en lien avec le droit à la protection juridictionnelle effective prévu à l’article 47 de la Charte ?

La problématique au cœur de ces deux premières questions permet de s’interroger sur la compatibilité entre la réglementation sur les clauses abusives et la procédure tout à fait particulière existant en Espagne de paiement des honoraires d’avocat en cas de litige laquelle fait l’objet d’une décision rendue par une autorité non juridictionnelle, laissant le recours contre cette décision à une autorité juridictionnelle sans réelle possibilité de contrôle des clauses abusives même au moment de ce recours.

La Cour de justice de l’Union européenne commence donc par rappeler une position de principe : le droit de l’Union n’est pas censé harmoniser les procédures qui permettent l’examen du caractère abusif ou non d’une clause (§ n° 53 de l’arrêt). Par conséquent, elle ne saurait s’immiscer dans le droit national concernant la procédure même. Toutefois, la Cour rappelle que dans le cadre où l’intervention du juge n’est réalisée qu’à un stade procédural avancé (par ex. ici dans le cadre du recours en révision), cette intervention respecte la directive 93/13/CEE sur les clauses abusives si et seulement si le consommateur n’est pas dissuadé de faire valoir ses droits à ce stade.

Le droit espagnol est donc particulièrement délicat à ce sujet car le greffier rendant la décision motivée ne peut pas apprécier si une des clauses du contrat peut revêtir un caractère abusif au sens de la directive. La Cour note encore au paragraphe n°61 que le recours contre la décision du greffier (le recours en révision) ne permet pas au juge de réaliser un examen de l’éventuel caractère abusif des clauses du contrat. Mais, sur ce point, le gouvernement espagnol conteste l’interprétation ainsi faite du droit interne par la juridiction de renvoi si bien que la Cour de justice est obligée de rappeler qu’elle n’est pas compétente pour interpréter le droit national, se contentant des éléments constants à sa disposition (à dire vrai donc les éléments retenus par la juridiction de renvoi de la question préjudicielle). Les points nos 65 à 68 montrent toute l’ambivalence des deux questions posées et ne présentent qu’un intérêt assez résiduel tant la Cour de justice semble incertaine des éléments qui lui sont présentés, notamment en raison de la contestation de l’interprétation donnée par le gouvernement espagnol. La formulation employée par la Cour de justice dans ces passages appuie ce constat (« aurait » au paragraphe n° 65, « il ne ressort pas clairement » au paragraphe n° 66, « semble » au paragraphe n °68).

Le résultat est facile à prévoir dans ce contexte : aucune réponse ferme quant au droit espagnol n’est donnée par la Cour de justice dans l’arrêt du 22 septembre 2022. Une chose est certaine : n’est pas conforme à la directive 93/13/CEE sur les clauses abusives une procédure sommaire en paiement d’honoraires d’avocats contre un client consommateur en vertu de laquelle l’intervention d’une autorité juridictionnelle n’est prévue qu’au stade du recours sans que la juridiction saisie puisse contrôler, au besoin d’office, le caractère abusif des clauses. Ce sera à la juridiction de renvoi d’apprécier si le juge statuant sur le recours en révision de la décision du greffier peut utiliser le mécanisme de contrôle des clauses abusives. Si ce n’est pas le cas, il faudra que la juridiction de renvoi applique tout de même les règles issues du droit de l’Union (§ n° 74). La protection contre les clauses abusives ressort victorieuse, sans réelle surprise.

En somme, le droit français ne saurait y craindre une quelconque menace, le contrôle du juge permettant de relever des clauses éventuellement abusives dans ce contexte. Il n’en reste pas moins que l’arrêt a pour mérite de mettre en lumière ce contexte particulier qui peut être un terrain d’élection de certaines clauses abusives.

De l’interprétation stricte des exceptions au contrôle des clauses abusives

La Cour s’attaque ensuite aux deux questions suivantes :

3) Une clause figurant dans un contrat conclu entre un avocat et un consommateur, telle que celle en cause au principal, qui prévoit le paiement d’honoraires dans l’hypothèse spécifique où le client se désiste avant la fin de la procédure judiciaire ou conclut un accord avec l’institution concernée, à l’insu ou contre l’avis du cabinet d’avocats, doit-elle être considérée comme relevant de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE dès lors qu’il s’agit d’une clause principale portant sur l’objet du contrat, en l’occurrence le prix ?

4) En cas de réponse affirmative à la question précédente, une telle clause, qui fixe les honoraires par référence au barème d’un ordre des avocats, lequel prévoit des règles différentes à appliquer selon les cas, et dont il n’a pas été fait mention dans le cadre de l’information préalable, peut-elle être considérée comme claire et compréhensible au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE ?

La troisième question permet d’étudier le mécanisme des clauses portant sur l’objet principal du contrat d’une part et celles portant sur l’adéquation entre le prix et le service dont on sait qu’elles ne font pas partie du contrôle des clauses abusives. La Cour de justice de l’Union européenne commence donc par rappeler l’interprétation stricte de l’article 4, § 2, de la directive 93/13/CEE. Ceci n’étonnera guère les spécialistes de méthodologie : les exceptions sont d’interprétation stricte (exceptio strictissimae interpretationis est). La Cour de justice explicite rapidement une idée connue en jurisprudence : les clauses s’intéressant à l’objet principal du contrat recouvrent une réalité assez étroite, essentiellement liée aux prestations essentielles (§ n° 78).

La réponse donnée est beaucoup plus ferme et beaucoup plus rapide sur cette troisième question : la clause de désistement litigieuse ne relève pas de l’exception de la réglementation des clauses abusives car elle ne saurait concerner ni l’objet principal du contrat ni l’adéquation entre prix et le service. Ce faisant, la réponse à la quatrième question n’est pas nécessaire eu égard au libellé de celle-ci.

Une telle qualification doit être accueillie favorablement en raison de l’éloignement de la clause considérée avec les exceptions prévues par la directive 93/13/CEE, sur les clauses abusives. Elle permet, en outre, de ne pas étirer le tissu des exceptions au contrôle des clauses abusives. Une position contraire conduirait à diminuer drastiquement le champ de la protection et donc l’intérêt de telles dispositions en droit interne.

Sur les pratiques commerciales déloyales

La cinquième question était libellée ainsi :

5) En cas de réponse négative à la question précédente, l’insertion dans un contrat conclu entre un avocat et un consommateur d’une clause telle que celle en cause au principal, qui fixe les honoraires de l’avocat en se référant simplement au barème d’un ordre des avocats, lequel prévoit des règles différentes à appliquer selon les cas, et dont il n’a pas été fait mention dans l’offre commerciale ni dans le cadre de l’information préalable, peut-elle être considérée comme une pratique commerciale déloyale au sens de la directive 2005/29/CE ?

La cinquième question s’éloigne du contentieux des clauses abusives pour s’intéresser aux pratiques commerciales déloyales. On pouvait, effectivement, se demander si la pénalité prévue non mentionnée dans l’offre commerciale qui se trouvait sur les réseaux sociaux pouvait s’analyser ainsi. Or, le problème de la rédaction de la clause litigieuse portait notamment sur le renvoi au barème de l’ordre professionnel des avocats de Séville « dont le contenu serait difficilement accessible et compréhensible » (§ n° 86 de l’arrêt).

Sur ce point, la Cour de justice de l’Union européenne n’hésite pas longtemps avant de considérer qu’une telle stipulation pourrait être analysée comme une pratique commerciale trompeuse. En somme, ici c’est la dissonance entre la publicité faite dans l’offre commerciale et la stipulation contenue dans la convention d’honoraires qui permet la qualification opérée. Mais la juridiction de renvoi doit évidemment vérifier que le consommateur croisant le chemin de la clause a pris une décision commerciale qu’il n’aurait pas pu prendre autrement (§ n° 87 de l’arrêt). On note, encore une fois, la prudence de la Cour de justice notamment en raison de la difficulté sur certains faits constants de l’affaire.

 

Voici donc un arrêt répondant à des questions originales sur le contrôle des clauses abusives. À dire vrai, cette originalité repose sur l’objet même du contrôle lié aux honoraires d’avocat. La réglementation nationale espagnole en question implique une certaine distance pour le lecteur français qui ne peut pas faire de réel parallèle avec la procédure de notre droit positif. Mais les enseignements sont connus : l’intervention du juge si ce n’est à l’étape d’une voie de recours doit pouvoir être l’occasion d’un contrôle des clauses abusives. Une clause de désistement ne saurait, en outre, relever de l’exception liée à l’objet du contrat ou à l’adéquation du prix et de la prestation. Prudence, enfin, sur la pratique commerciale trompeuse qui n’est jamais loin quand – comme ici – une omission importante a été faite lors de la publicité de l’avocat sur les réseaux sociaux espagnols actant ainsi probablement une discordance entre l’offre commerciale et la réalité.

Attention donc aux conventions d’honoraires conclues avec des consommateurs : même en France, celles-ci peuvent receler des clauses abusives et avec elles le risque d’un réputé non écrit !

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Honoraires d’avocats : attention aux clauses abusives et aux pratiques commerciales trompeuses !

Dans un arrêt en date du 22 septembre 2022,Vicente c/ Delia, la Cour de justice de l’Union européenne vient répondre à plusieurs renvois préjudiciels initiés en Espagne intéressant les conventions d’honoraires d’avocats et leurs rapports avec le droit des clauses abusives et des pratiques commerciales trompeuses.

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Une ordonnance du 14 septembre 2022 modifie les ordonnances n° 2021-1735 du 22 décembre 2021 et n° 2022-230 du 15 février 2022 ayant réformé le cadre juridique du financement participatif en application du règlement (UE) 2020/1503 du 7 octobre 2020 pour proroger la période transitoire d’un an prévue par ce règlement pour l’application de ce nouveau cadre juridique.

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Contrôle de légalité de la réforme de la procédure civile de 2019 : retour vers le futur au Conseil d’État (Deuxième partie : le champ d’annulation)

Le Conseil d’État a été saisi de la légalité du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile. Il s’est prononcé le 22 septembre 2022 par une décision-fleuve d’une trentaine de pages. L’essentiel des dispositions critiquées est confirmé. Seules quelques dispositions, dont le fameux article 750-1 du code de procédure civile, sont annulées. Certaines annulations sont ordinairement rétroactives ; d’autres sont d’effet différé. Le Conseil d’État donne ainsi à lire une décision complexe aux conséquences pratiques incertaines. Le principal message adressé au pouvoir réglementaire est là : le différé d’entrée en vigueur d’une réforme doit être proportionnel à l’ampleur de celle-ci.

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Successions dans l’Union européenne : compétence du juge français

Lorsque le défunt avait la nationalité française et possédait des biens en France, les juridictions françaises sont compétentes pour statuer sur l’ensemble de sa succession en application de l’article 10 du règlement européen du 4 juillet 2012, même s’il n’y était pas domicilié.

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Successions dans l’Union européenne : compétence du juge français

Par cet arrêt du 21 septembre 2022, la première chambre civile met un terme à une affaire dont elle avait déjà eu à connaître et qui a donné lieu à un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne.

L’affaire concerne la mise en œuvre du règlement (UE) n° 650/2012 du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions, et l’acceptation et l’exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d’un certificat successoral européen prévoit diverses règles de compétence.

Rappelons que son article 4 pose un principe général : sont compétentes pour statuer sur l’ensemble d’une succession les juridictions de l’État membre dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle au moment de son décès.

Le règlement énonce par ailleurs des règles de compétences subsidiaires. L’article 10 dispose notamment, par son paragraphe 1, que...

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